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Tiphaine Dubuard avec AFP / Crédits photo : RICCARDO MILANI / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP , modifié à
D'après l'association de consommateurs CLCV, les marges des distributeurs de carburants repartent à la hausse alors que ces derniers s'étaient engagés au début de l'été 2023 à réduire leurs marges brutes de transport/distribution jugées "excessives" .

Les marges des distributeurs de carburants repartent à la hausse depuis cet automne, pour atteindre à nouveau des niveaux "inacceptables", estime jeudi l'association de consommateurs CLCV, alors qu'un rapport commandé par Elisabeth Borne se fait attendre.

Les distributeurs, sous la pression du gouvernement et des consommateurs, s'étaient engagés au début de l'été 2023 à réduire leurs marges brutes de transport/distribution jugées "excessives" (plus de 25 centimes par litre de carburant). "Malheureusement, elles ont de nouveau augmenté dès novembre", constate la CLCV. Cette marge est remontée en janvier à 26 centimes par litre d'essence SP95 et 22,2 centimes par litre de gazole, selon l'association, alors qu'elle se situait en moyenne autour de 15 centimes sur la période 2018-2021, d'après la fédération des industries pétrolières.

"Ces niveaux excessifs ne sont pas acceptables", juge la CLCV qui se base sur les données du ministère de la Transition écologique. "Distributeurs" ne signifie pas "stations-service", a mis en garde jeudi Francis Pousse, représentant des quelque 5.600 stations fonctionnant hors de la grande distribution (soit environ la moitié du parc). Pour les pompistes, "la majorité des contrats incluent une commission fixe, quel que soit le prix du baril. Cette commission, brute, est aujourd'hui entre 3 et 5 centimes", et elle doit couvrir les frais (entretien de la station, salaires), explique-t-il.

Les 26 centimes relevés par la CLCV, qui s'appliquent à toute la chaîne de distribution (pompistes mais aussi transporteurs, stockeurs...), doivent en outre couvrir des frais croissants dans un contexte d'inflation, insiste t-il.

Pas d'"effort significatif" des pétroliers

En 2022, cette marge - soit la différence entre le prix hors taxes du carburant et le prix en sortie de raffinerie - avait chuté à des niveaux très faibles, les distributeurs ayant choisi de ne pas répercuter l'intégralité de la flambée des cours du brut à la suite de la crise ukrainienne. Depuis l'été, les prix à la pompe ont reflué sous l'effet de la baisse du cours du baril. Mais ce recul "aurait pu être plus important si les marges de transport/distribution avaient été tenues", pointe CLCV.

L'association "souligne la nécessité de s'interroger sur la juste rémunération des distributeurs". Elle les appelle "à respecter leur engagement de ne pas pratiquer des marges excessives et de consentir un effort d'environ 5 à 8 centimes par litre".

En septembre, l'ex-Première ministre Elisabeth Borne avait annoncé le lancement d'une mission pour "faire toute la transparence sur les coûts et les marges de l'ensemble de la filière", de la production à la distribution en passant par le raffinage.

Elle devait être publiée début décembre. Les auditions ont eu lieu, indique Francis Pousse. Mais depuis, aucune nouvelle. Dans son rapport jeudi, la CLCV s'intéresse aussi à l'impact des opérations à prix coûtant menées cet automne, et constate "des disparités importantes".

Analysant les prix pratiqués du 29 septembre au 13 octobre, elle estime que les enseignes de la grande distribution (Leclerc, Intermarché, Système U, Carrefour) et les discounters de groupes pétroliers (Esso express, Total access) "ont joué le jeu en baissant leurs prix de 3 à 6%". En revanche, les enseignes de pétroliers (TotalEnergies, AVIA) proposant des tarifs bien plus élevés "n'ont pas fait d'effort significatif", ajoute-t-elle. Le PDG de TotalEnergies Patrick Pouyanné a confirmé la semaine dernière le maintien du plafonnement du prix de ses carburants à 1,99 euro sur l'année 2024 et "peut-être même au-delà".

"Il y a encore quand même 500 stations en France", sur les 3.400 du parc de TotalEnergies "qui profitent de ce plafonnement", surtout en zones rurales où les coûts de logistique sont plus élevés, indiquait le PDG le 7 février. TotalEnergies n'a jamais donné de chiffre sur le coût éventuel pour lui de ce plafonnement.