Le témoignage de Laurent a fait forte impression à la barre ce vendredi. 1:42
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Justin Morin, édité par Ugo Pascolo avec AFP
Le 8 janvier 2015, Laurent, alors agent municipal à Montrouge, voit de ses yeux Amédy Coulybaly abattre la policière Clarissa Jean-Philippe et blesser un de ses collègues. Il décide d'agripper l'arme du tueur et va réussir à le mettre en fuite. Ce vendredi, lors du procès des attentats, son témoignage a permis d'en apprendre plus sur le tueur. 

"Si je veux survivre, il faut que je lui saute dessus." Ce vendredi, lors de la journée du procès des attentats de janvier 2015 consacrée à Clarissa Jean-Philippe, cette policière municipale abattue par Amédy Coulibaly au lendemain de la tuerie de Charlie Hebdo, c'est le témoignage d'un homme qui a marqué les esprits. Cet homme s'appelle Laurent, et est alors chef d'équipe du service propreté de la ville de Montrouge. Appelé sur les lieux du drame à venir pour un banal accident de la circulation, il croise alors la route du terroriste et l'affronte à mains nues. 

"Ma seul chance, c'est de lui rentrer dedans"

C'est parce que le tueur se colle à lui que Laurent le remarque. À 8h04 ce matin du 8 janvier 2015, Amédy Coulibaly sort son arme et tire, Clarissa Jean-Philippe meurt d'une balle dans la gorge et un collègue de l'agent municipal est grièvement blessé à la mâchoire. Croyant au départ à une mauvaise blague, Laurent crie sur le tueur, puis explique à la barre "devenir fou" après avoir vu la "tête explosée" de son collègue. Il agrippe alors le fusil d'assaut du terroriste.

"Si je lui tourne le dos et que je pars, il a la distance suffisante pour m'abattre. Donc ma seul chance, c'est de lui rentrer dedans", explique-t-il. Une phrase tourne alors en boucle dans sa tête : "Si tu lâches, t'es mort". Une pensée à laquelle Amédy Coulibaly va répondre de vive-voix en lui lançant : "tu veux jouer, tu vas crever". S'en suit une altercation violente et Laurent parvient à arracher la cagoule du terroriste, retrouvée sur les lieux par les enquêteurs qui identifieront formellement Coulibaly grâce à son ADN. 

"Je doute qu'il a eu de la compassion"

À genoux devant le djihadiste "surarmé" et "déterminé", Laurent reste toujours agrippé à l'arme. "En tenant une main sur la kalachnikov, [Coulibaly] a plongé l'autre main dans la doudoune et sorti un pistolet automatique. Il n'arrivait pas à se débarrasser de moi, ça l'énervait", poursuit-il. Mais le terroriste ne le "finit pas". Au contraire, il "fait demi-tour" et repart "en courant". "L'une des hypothèses", rappelle l'avocat général, "c'est que l'arme s'est enrayée et qu'il n'a pas pu tirer". "Oui, je doute qu'il ait eu de la compassion", lui répond Laurent.

Une école juive véritable cible du terroriste ?

Pour ce dernier, il est "clair depuis le départ" que ce n'est pas Clarissa Jean-Philippe qui était visée, mais bien "l'école juive" Yaacov située juste à côté du lieu de l'accident. "C'était l'heure de rentrer en classe. Quelques minutes après, la porte était fermée. J'ai dû faire foirer son timing", fait valoir Laurent. "Et puis comment il aurait pu prévoir qu'il y aurait des policiers ? Coulibaly, c'est pas Madame Soleil." 

Si cette théorie reste encore à ce jour une hypothèse, le lendemain, vers 13 heures, Amédy Coulibaly fera irruption dans la supérette Hyper Cacher de la porte de Vincennes à Paris, tuant quatre hommes, tous juifs.