"Des scènes surréalistes" : le neveu de Vincent Lambert raconte les derniers jours de son oncle

françois lambert
François Lambert était le neveu de Vincent Lambert. © FRANCOIS GUILLOT / AFP
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Sept mois après le décès de Vincent Lambert, l'infirmier plongé dans un état végétatif de 2008 à 2019 à la suite d'un accident de la route, son neveu publie un récit poignant où il raconte les coulisses de sa bataille pour le droit à mourir. De premiers extraits de l'ouvrage sont publiés dans le "JDD", dimanche. 

Le 12 mars prochain sera publié Pour qu'il soit le dernier aux éditions Robert Laffont, le récit de la bataille judiciaire qui a opposé l'épouse et les parents de Vincent Lambert, l'infirmier plongé dans un état végétatif de 2008 à 2019 à la suite d'un accident de la route. L'histoire est racontée par le neveu de ce dernier, François Lambert, très proche de Vincent Lambert et qui s'est consacré à la défense de son droit à mourir, jusqu'à l'arrêt des soins en juillet dernier. Nous avons parcouru pour vous les premiers extraits  de l'ouvrage, publiés en exclusivité dans le Journal du dimanche.

"Cette pression qui m'habitait depuis six ans"

François Lambert revient sur le traumatisme de la lente mort de son oncle, secoué par des "râles raques" et pris d'étouffements, après l'arrêt de l'alimentation et de l'hydratation artificielles. Un médecin lui explique alors que Vincent Lambert "va suffoquer, car ses ­bronches vont se remplir progressivement, puis les reins lâcheront en premier, entraînant un arrêt ­cardiaque qui lui sera ­fatal".

Puis vient le moment du dernier soupir et de l'annonce de sa mort, brutale. "Le 11 juillet à 9 heures, je reçois un appel d’un journaliste de France 3 ­Champagne Ardenne", expose-t-il. "Il me demande de ­confirmer le décès de ­Vincent. Pas encore au ­courant, je raccroche et envoie immédiatement un SMS au docteur ­Sanchez, lui demandant si ­Vincent est mort. Il me répond à 9 h 05 : 'Oui, à 8 h 24.' Enfin…"

 

Mais François Lambert affirme qu'il était préparé au décès de son oncle. "Je perçois seulement l’amorce d’une baisse de cette pression qui m’habitait depuis six ans, à l’annonce de la fin du ­calvaire, la fin du combat étant intervenue quelques jours plus tôt", analyse-t-il avec quelques mois de recul.

"J’assiste à des scènes surréalistes de ­contradiction"

Dans ce récit poignant aux allures d'essai sur l'euthanasie, François Lambert n'hésite pas à pointer les responsabilités de toutes les parties : parents, épouse mais aussi médecins, pétris de paradoxes. "J’assiste à des scènes surréalistes de ­contradiction", se rappelle François Lambert. "[Les infirmières] examinent une blessure qu’il a au pied pour s’assurer qu’elle se ­résorbe. J’ai l’impression qu’il s’agit d’un jeu : on ne le nourrit plus, on ne ­l’hydrate plus, et pour éviter de provoquer la mort, l’équipe ­médicale doit prendre soin de lui, et donc tout faire pour le ­maintenir en vie le plus longtemps possible. Il y a une ­logique : il reste un être humain dont on doit ­s’occuper jusqu’au bout, sans l’abandonner."

Mais François Lambert, lui, n'a pas peur de disséquer méticuleusement les comportements de chacun. "L’abandon peut être aussi le fait pour le ­médecin de provoquer la mort en arrêtant des traitements, et de ne pas l’assumer ensuite en prétendant faire son ­travail de médecin : soigner et maintenir en vie", écrit-il. "Tout en faisant assumer le fait de provoquer la mort à ceux qu’il ­considère comme des idéologues. Lui n’a fait que se retirer."