La vitesse, remède à la somnolence ?

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avec Laure Dautriche
Une étude montre que l’absence de limitation de vitesse favorise l’attention du conducteur.

A quelques jours des grands départs en vacances, les conseils de conduite se multiplient afin, notamment, de limiter la somnolence au volant, un danger qui touche sept conducteurs sur dix.

Mais une nouvelle étude, publiée par le magazine automobile L'Argus en partenariat avec le Centre médical veille sommeil, apporte un éclairage inattendu sur le sujet : l’absence de limitation de vitesse favorise l’attention du conducteur.

Une étude scientifique de la somnolence

L’expérience a consisté à faire conduire le même automobiliste, prénommé Christophe, sur 900 km mais dans deux pays différents. A chaque fois, le conducteur était équipé d’une dizaine d'électrodes sur le visage, reliées à un petit boitier noir qui mesure ses phases de somnolence.

Sur le premier trajet, entre Paris et Nice, l’automobiliste a respecté les limitations de vitesse et fait des pauses toutes les 2 heures. Bilan, Christophe "n'a jamais eu l'impression de s'endormir " mais les enregistrements scientifiques établissent un tout autre constat : il a connu des phases de somnolences cumulées de 11 minutes, la plus longue ayant duré deux minutes trente.

Même conducteur, même distance, mais autre réglementation

Ce même conducteur a ensuite repris le volant pour réaliser la même expérience en Allemagne, parcourant les 830 km reliant Sarrebrück à Berlin. Mais les résultats sont bien différents : les capteurs n'ont saisi aucune phase de somnolence pendant tout le trajet.

"On a roulé de 80 km/h, lorsqu’il y avait des travaux, jusqu’à la vitesse maximale de la voiture, qui était de 240 km/h… avec, au final, absolument aucun problème", témoigne Christophe.

Et le conducteur de souligner le gain de "fluidité apporté par le fait de pouvoir rouler à la vitesse que vous voulez. Vous êtes concentrés sur ce que vous êtes en train en faire et la conduite n’est plus un acte automatique mais un acte réfléchi".

Une conclusion dérangeante

Consulté pour cette expérience, le Centre médical veille sommeil a identifiée une spécificité allemande : l’absence de limitation de vitesse sur les autoroutes allemandes et un trafic plus important.

Conclusion, le conduite est moins monotone et le conducteur plus attentif. "Une succession de travaux, de bouchons et d’endroits où il peut aller jusqu’à 190 km/h. On est plus du tout dans une routine de conduite, on est dans des aléas de conduite qui font que l’attention doit absolument concentrée", analyse le docteur Lévy, du laboratoire du sommeil à Grenoble.

La vitesse reste pourtant un facteur de risque

Accepter la vitesse pour lutter contre la fatigue, une conclusion politiquement incorrecte aux yeux de la prévention routière, qui rappelle que la vitesse est une des principales causes d'accidents mortels sur les routes : plus on roule vite, plus les accidents sont violents. Un chiffre s’impose : depuis 10 ans, plus de la moitié l'ont été grâce à la réduction de la vitesse sur la route.

La vitesse n’est donc pas une solution, d’autant que cette expérience n’est pas valable pour tous les conducteurs. "Ce qui a été vrai pour cette personne ne le sera pas forcément pour un conducteur de 80 ans ou pour un jeune conducteur très preneur de risques", nuance Jean-Pascal Assailly, de l'Institut de recherche sur les transports et leur sécurité.

Et ce spécialiste rappelle que pour lutter contre la somnolence sur les longs trajets, il n'y a qu'une seule solution : s'arrêter et faire une sieste de 10 minutes sur une aire d'autoroute.