La réforme de la garde à vue critiquée par l’Intérieur

Dans 40% des cas, les enquêteurs ne parviennent plus à obtenir d'aveux.
Dans 40% des cas, les enquêteurs ne parviennent plus à obtenir d'aveux. © MAXPPP
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Leur nombre aurait baissé de 26,3% depuis la nouvelle législation, adoptée en mars dernier.

Le ministère de l’Intérieur a écrit à l’Elysée pour dresser un bilan très négatif de la réforme de la garde à vue, indique lundi matin le site du Figaro. Cela, seulement quatre mois après sa mise en œuvre.

Début juillet, le Figaro avait révélé une baisse de 26,3% du nombre de gardes à vue effectuées par la police et la gendarmerie nationale. Le nombre d’élucidations chute quant à lui « brutalement » de 2,5%.

De même, semble aujourd’hui indiquer le ministère de Claude Guéant dans cette note transmise à la présidence, le nombre d’aveux enregistrés par les différents services subit de plein fouet un recours au droit au silence dans près de 40% des affaires. La raison, selon un spécialiste cité anonymement par le Figaro : la présence de l’avocat, qui en dissuade généralement son client.

Décourager les avocats

Le Figaro évoque ainsi les techniques employées par les enquêteurs pour décourager les avocats lors des gardes à vue. L’une d’entre elles consiste à faire traîner la procédure en longueur pour les inciter à abandonner l’affaire. Un point confirmé sur Twitter par le blogueur Maître Eolas, avocat parisien, par ailleurs très critique sur les autres conclusions du ministère.

La note transmise à l’Elysée, indique le Figaro, demande un allègement des procédures, passant par «une modification de la législation, à moyen terme, afin de garantir l'efficacité des services enquêteurs».

"Vers un système accusatoire"

Carlos Garcia, conseiller technique PJ du Syndicat national des officiers de police, estime lundi sur Europe 1 que ses collègues ne peuvent pas être tenus pour responsables de cette baisse du nombre de gardes à vue : "Ils n’ont pas vraiment le choix. Lorsque les faits rentrent dans les objectifs préconisés par la loi, la garde à vue est prise."

La vraie raison, selon lui, est que "certaines infractions 'simples' comme les délits routiers, usages de stups, même certains vols à l’étalage ou des infractions à la législation sur les étrangers ne sont plus forcément mises en garde à vue, mais reconvoquées ultérieurement. Mais c’est une bonne chose, elles sont traitées sous forme de procédure simplifiée."

La baisse du taux d’élucidation et du nombre d’aveux recueillis lors des gardes à vue est par contre "beaucoup plus inquiétante" à ses yeux, car "on a plus la relation qui s’établissait entre l’enquêteur et la personne gardée à vue".

D’un système inquisitoire, explique Carlos Garcia, "on se dirige un peu vers un système accusatoire à l’instar des pays anglo-saxons, mais en gardant très peu d’avantages de notre système et en prenant les inconvénients du système anglo-saxon. C’était prévisible", estime-t-il.