41 médecins craignent de devoir procéder à un tri des patients. Photo d'illustration. 4:53
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Guilhem Dedoyard , modifié à
Sur Europe 1, Benjamin Davido, infectiologue de l'hôpital Raymond-Poincaré de Garches revient sur le risque de tri des patients qui menace les hôpitaux et l'importance de l'éviter. Face à la hausse des cas graves de Covid, 41 directeurs de crise de l'AP-HP tirent la sonnette d'alarme dans le "JDD" afin d'éviter cette situation.
INTERVIEW

L'alerte est lancée. Dans une tribune publiée par Le Journal du dimanche, 41 médecins réanimateurs et urgentistes de l'AP-HP disent se préparer à devoir "faire un tri des patients" pour faire face à la troisième vague de Covid-19 qui submerge la région parisienne. Si des mesures sanitaires plus fortes ne sont pas adoptées, les soignants n'auront plus de choix, prévient sur Europe 1 Benjamin Davido, infectiologue de l'hôpital Raymond-Poincaré de Garches, signataire de la tribune. 

"Il faut éviter toute perte de chance"

"Le risque est qu'à un moment donné, on se retrouve dans une situation où un malade vient aux urgences avec un infarctus du myocarde et qu'il n'y ait plus de place en unité de soins de cardiologie intensive parce que l'hôpital est plein de malades Covid". Si cela arrive "ce sera une situation de médecine de catastrophe, comme on l'a connu lors des attentats il y a quelques années", estime le médecin.

Les soignants se retrouveraient alors dans une situation complexe sur le plan éthique, celle du tri des patients. Or pour Benjamin Davido, il est essentiel d'éviter "qu'il y ait une perte de chance et qu'on se retrouve à devoir choisir entre quelqu'un de 50 ans et quelqu'un plus âgé. Dans le serment d'Hippocrate, on doit soigner tout le monde. Ces décisions sont d'ordre éthique, ça nous dépasse totalement."

"On a beaucoup dit qu'on était des héros. La réalité, c'est qu'avant d'être des héros, on est des humains. On ne peut pas choisir qui va vivre, qui va mourir", estime l'infectiologue. Surtout, rappelle-t-il, qu'il est aussi possible que les professionnels se trompent dans leur choix "et c'est extrêmement déchirant".

Une saturation hospitalière proche

"La réalité aujourd'hui, malheureusement, c'est un taux très élevé de contaminations quotidiennes qui nous rappelle les chiffres de novembre", rappelle le médecin. "La saturation hospitalière est très impactée. Les malades ressemblent étrangement à mars dernier, c'est à dire des gens relativement jeunes qui ont des formes graves et pour laquelle les places sont de plus en plus rares", explique Benjamin Davido.

Face à cette situation, les évacuations sanitaires et les déprogrammations sont des solutions mais elles ont des limites. "Vendredi, on a rediscuté en cellule de crise de la fermeture possiblement complète du bloc opératoire dans mon hôpital", explique le médecin. Une décision qui ne serait "impacterait des patients qui sont dans une semi-urgence pour des chirurgies".