Sabrina Ali Benali : "Le cerveau des soignants est en surchauffe"

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A.H. , modifié à
Dans Allô Europe 1 vendredi, Sabrina Ali Benali, interne à l'hôpital, dénonce le manque de moyens accordés aux urgences et le malaise du personnel soignant.
INTERVIEW

Sa vidéo "coup de gueule" a déjà été vue près de 12 millions de fois. Sabrina Ali Benali, interne à l'hôpital, y dénonce la politique menée par la ministre de la Santé Marisol Touraine. Invitée d'Allô Europe 1 vendredi, la jeune médecin affirme avoir été "entendue par des centaines de milliers de personnes". "On a probablement dérangé en faisant un peu trop de bruit", estime-t-elle, alors qu'une polémique est née sur le poste qu'elle affirme occuper. "Je suis bien une interne de l’AP-HP et j’irais tout à l’heure dans mon service qui a bien des urgences", a-t-elle tenu à préciser sur notre antenne.

L'administration mise en cause. Le malaise du personnel hospitalier, et des urgences notamment, est bien réel et justifié, selon le docteur Gérald Kierzek, médecin d'Europe 1. Pour lui, l'administration hospitalière a une grande part de responsabilité. "Progressivement, le rôle des soignants a été cantonné à 'soigne et tais-toi'. L’administration a géré les lits de manière comptable. Des dizaines de milliers de lits ont été supprimés. Il n’y a plus de lits généralistes, il n’y a plus que des lits pour des pathologies ultra-spécialisées", dénonce-t-il. Or, en vieillissant, les patients développent plusieurs petites maladies dans différents endroits. Et pour eux, il est difficile de trouver de la place.

Entendu sur europe1 :
Les médecins, les infirmiers, les aides-soignants font ce qu’ils peuvent

Une hausse de la violence. Les actes de violences à l'hôpital augmentent d'année en année. 14.502 signalements d’atteintes aux personnes et aux biens ont été effectués en 2014, contre 12.432 en 2013, selon le rapport annuel de l'Observatoire national des violences en milieu de santé. 15% de ces actes de violence concernent le service des urgences. "Les médecins, les infirmiers, les aides-soignants font ce qu’ils peuvent. Ils courent parce qu’il y a moins de personnel. Et quand on court, on a moins de temps pour les patients. Donc ils ne sont pas contents et cela va générer de l’agressivité", dénonce le docteur Gérald Kierzek.

"C’est cette spirale infernale, ce cercle vicieux qu’il faudrait casser en redonnant plus de temps", prône-t-il. "Le cerveau est en surchauffe en permanence. Je suis obligée de coller des étiquettes au sujet de mes malades pour être sûre de ne pas en oublier un", témoigne Sabrina Ali Benali. "On s’en excuse auprès des usagers mais oui, par moment, on oublie de vous dire qu’on va faire la prise de sang".

Le système de santé français avait la réputation d’être envié dans le monde entier. "Mais c’est fini, il faut arrêter avec ça. On avait, il y a 20 ou 30 ans, un système qui était le premier du monde. Dans les derniers classements, on est passé à la 23e ou 24e place", déplore le docteur Kierzek. "Cette histoire, c'est du passé !"