LA QUESTION SEXO - Peut-on avoir une sexualité sans pénétration ?

  • Copié
Catherine Blanc
Mercredi, dans l’émission "Sans Rendez-Vous", sur Europe 1, la sexologue Catherine Blanc répond à une auditrice qui dit pratiquer la sexualité avec son compagnon quasiment sans pénétration. Ce qui peut être problématique, estime-t-elle.
EUROPE 1 VOUS ACCOMPAGNE

>> Sexualité ne rime pas forcément avec pénétration. Une auditrice témoigne ainsi du fait qu’elle ne pratique quasi-exclusivement que la masturbation avec son compagnon, rencontrée au lycée. Pour notre sexologue Catherine Blanc, chroniqueuse dans l'émission Sans Rendez-Vous, sur Europe 1, une sexualité sans coït peut tout de même être problématique, si elle cache des peurs enfouies.

La question de Carole, 35 ans

"Avec mon mari, nous nous sommes rencontrés au lycée. Depuis, nous avons construit notre sexualité essentiellement sur des masturbations mutuelles ou côte à côte. La pénétration n’est que très rare. Alors que, dernièrement, j’en parlais naturellement à des amies, elles ont eu l’air de trouver ça très bizarre. Qu’en pensez-vous ?"

La réponse de Catherine Blanc

"Évidemment, ça pose question. Qu’est-ce qui fait qu’on se masturbe et qu’on ne se pénètre pas ? L’intérêt, c’est d’éviter le coït, avec tout ce qu’il représente d’encombrant pour l’un ou pour l’autre, ou de difficultés, ou de difficultés de jouissance. Parce que souvent, dans le couple, chacun séparément, avant de se rencontrer, a eu un rituel de masturbation, une bonne connaissance de sa masturbation et du plaisir ressenti.

Pour peu que le coït n’ait pas apporté les mêmes réponses, les mêmes facilités, ils préfèrent s’apporter du plaisir, donc ils vont là où c’est le plus rapide d’obtenir leur plaisir. Et puis, du coup, ils enferment un petit peu la relation là-dedans. Puis un petit peu beaucoup. Et le coït devient quelque chose plutôt de mis sur la touche, parce qu'il les confronte, d’une certaine manière, à leur impuissance de la jouissance ou de leur capacité à en donner.

C’est donc un problème, cette absence de pénétration ?

Bien sûr que le coït n’est pas obligatoire. Simplement, réduire sa sexualité à de la masturbation, c’est réduire sa sexualité à la connaissance qu’on en a depuis qu’on est enfant. Donc il y a quelque chose d’assez enfantin que de rester là-dessus.

Et puis, il y a quelque chose qui n’arrive pas à se compléter. C’et aussi un déni de nos spécificités. L’emboîtement, c’est aussi faire avec ce qui nous manque, et du coup aller chercher chez l’autre ce qui nous manque pour recréer ce fantasme un peu fou qui est de vouloir faire qu’un en étant complété par l’autre.

Il peut y avoir beaucoup de choses derrière ça : une sexualité qui ne s’est pas autorisée à devenir mature, une peur des conséquences de la pénétration, à savoir un bébé, une peur aussi pour l’homme de se sentir coincé, castré, symboliquement bien sûr. Encore une fois, chacun construit la relation comme il le veut, mais il faut être vigilant."