LA QUESTION SEXO - Je constate une baisse de ma libido en hiver, est-ce normal ?

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Catherine Blanc
Dans l'émission "Sans rendez-vous" vendredi sur Europe 1, Catherine Blanc répond à un auditeur, Alexis, qui constate une baisse de sa libido en hiver et se demande comment en parler à sa partenaire. Pour la sexologue et psychanalyste, l'être humain n'est pas caractérisé par une saisonnalité de son désir sexuel mais il n'est pas pour autant déconnecté de son environnement.

Les saisons ont-elle un impact sur notre sexualité ? Dans l’émission Sans rendez-vous vendredi sur Europe 1, la sexologue et psychanalyste Catherine Blanc répond à la question d'un auditeur, Alexis, qui remarque une baisse de sa libido en hiver malgré son attirance toujours présente pour sa partenaire. Il se demande si ce phénomène est habituel.

La question d'Alexis

"Chaque année, à la même période en hiver, j'ai une baisse de libido et donc de désir sexuel. Ce n'est pas le fait que ma femme ne m'attire plus, c'est juste que je n'ai pas envie de sexe. Est-ce que ce phénomène s'explique ? Est-ce que je dois prévenir ma partenaire ?"

La réponse de Catherine Blanc

A priori non, nous ne sommes pas des animaux. Enfin nous sommes des animaux mais pas comme ceux qui ont une vie sexuelle rythmée justement par les saisons. Il n'y a pas de saisonnalité de notre désir, mais il y a une lecture, bien évidemment, de son environnement. Pour certains, au contraire, l'hiver est le moment extrêmement douillet. La peau de bête, le feu de cheminée... Ça, c'est pour les fantasmes. On n'est pas obligé de les avoir... Mais en l'occurrence ce peut être au contraire le temps des rapprochements parce qu'on n'est pas en train de jouer au tennis, parce qu'on n'est pas en train de faire des apéros avec les potes. Justement, on est à la maison et on peut vivre sa sexualité douillette et potentiellement très créative.

Mais pour certains d'entre nous, l'hiver est compliqué : soit parce que ça renvoie historiquement à des histoires tristes pour soi, soit parce que lors du dernier hiver il y a eu beaucoup d'empêchement. Évidemment, cela rend difficile le fait d'aller se nourrir à l'extérieur pour pouvoir alimenter la relation à l'intérieur. Très classiquement, il y a aussi un manque de luminosité l'hiver. Et puis il y a des gens qui sont extrêmement sensibles. Leurs neurotransmetteurs sont très fragilisés, que ce soit à cause de leur façon de se nourrir, de leur histoire personnelle ou d'un stress particulier à cette période-là. Ils peuvent en tout cas être dans une grande difficulté pour avoir des hormones comme la sérotonine. Pour ces personnes, il est alors difficile d'avoir une valorisation d'elles-mêmes suffisamment haute pour avoir une ambition pour elles-mêmes et ensuite partir à la conquête de l'autre.

N'est-ce pas aussi parce qu'on a froid en hiver ? Qu'on veut moins se déshabiller ?

Il y a une réalité objective mais elle sert tous les prétextes. C'est-à-dire que là encore, la compétence que nous avons à lutter contre le froid est une réalité. Mais il y a aussi la lecture que nous avons du froid. Si vous avez une envie, si vous êtes amoureux de la neige, vous n'avez qu'une espérance quand c'est l'hiver... C'est d'aller au ski, c'est de voir la neige ! C'est de porter une grosse doudoune et de rentrer chez vous pour un thé chaud. Alors, vous n'avez pas cette notion de froid.

Mais d'autres vont fuir dès qu'ils le peuvent la saison de l'hiver pour aller dans un lieu d'été parce que l'hiver, ils ne se sentent pas en tranquillité. Tout cela est un encombrement qui raconte des tas de choses personnelles. Encore une fois, nous n'avons pas tous la même culture, nous n'avons pas tous les mêmes histoires et nous ne mettons pas de la joie à toutes les saisons de la même façon. Donc, effectivement, nous utiliserons dans ce cas le prétexte du froid comme on utilise les prétextes "demain il y a école", du travail, du stress ou des enfants. Ce sont des réalités mais elles permettent de cacher aussi notre difficulté à trouver de l'entrain en nous-mêmes. 

Est-ce que traiter une éventuelle dépression saisonnière pourrait améliorer sa libido ?

Absolument. C'est pour ça que je parlais tout à l'heure de neurotransmetteurs. La luminothérapie peut par exemple être absolument formidable parce que les gens en ont besoin. Avec le confinement, ils sont restés très enfermés. Ils sont restés sur leurs écrans, souvent dans des pièces peu lumineuses parce qu'il fallait laisser le reste de la famille dans les pièces de vie. Donc effectivement, les gens ont été particulièrement éprouvés et déprimés. Dans le cas d'Alexis, il y a quelque chose de l'ordre de la saisonnalité qui se joue dans sa souffrance et la moindre des choses c'est de ne pas de faire l'ours tous les hivers. Mais peut-être d'aller s'offrir la possibilité de comprendre ce qui se joue à travers une consultation. Ouvrir le champ des possibles pour un peu plus de joie. Sans forcément parler de sexualité, mais au moins un peu plus de joies internes."