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«La maladie de la pauvreté» : pourquoi la tuberculose fait-elle toujours autant de ravages dans le monde ?

Emma Ben Youssef Sudarovich // Crédit photo : Nasir Kachroo / NurPhoto / NurPhoto via AFP (Illustration) - Mis à jour le . 3 min
Pourquoi la tuberculose fait-elle toujours autant de ravages à travers le monde ?
Pourquoi la tuberculose fait-elle toujours autant de ravages à travers le monde ? © Nasir Kachroo / NurPhoto / NurPhoto via AFP

En cette journée mondiale contre cette maladie, l'Organisation mondiale de la Santé alerte la recrudescence de la tuberculose chez les plus jeunes. Comment se fait-il que cette infection, fléau des siècles derniers, soit toujours aussi diffuse ?

Vers un "retour de la Dame aux Camélias", cette héroïne d'Alexandre Dumas, symbole d'une époque où la tuberculose faisait rage ? Cette expression du professeur honoraire à la Sorbonne Éric Caumes, traduit une réalité qui peut surprendre : la tuberculose circule toujours et fait des ravages à travers le monde. Souvent associée à une époque révolue, cette maladie infectieuse souffre parfois d'un manque de moyens octroyés pour l'éradiquer. 

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"La maladie de la pauvreté"

"La tuberculose est la maladie de la pauvreté" affirme Éric Caumes, infectiologue et professeur honoraire à l'Université de la Sorbonne à Paris. Cette maladie infectieuse, potentiellement mortelle, est hautement contagieuse et se transmet par les voies aériennes comme l'explique le site Internet de l'Institut Pasteur. Une personne tuberculeuse la diffuse par gouttelettes, en toussant ou en éternuant. Ainsi, la promiscuité, due à la précarité, favorise grandement le passage de la maladie. "Plus on est pauvre, plus on partage la même pièce. Or, il suffit d'une personne présente dans la pièce pour contaminer les autres" assure le médecin.

La précarité, terreau fertile de la tuberculose, est un facteur connu depuis la fin du XIXe siècle. Effectivement, comme l'explique Éric Caumes, l'histoire sanitaire a prouvé que la révolution industrielle a freiné sa propagation en Occident, avant donc l'apparition des traitements médicamenteux. L'amélioration de la qualité de vie des Occidentaux, symbolisée par "l'amélioration de l'hygiène, l'aération des locaux, l'augmentation du nombre de pièces par habitant" a permis un net recul de l'infection.

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Les jeunes de plus en plus touchés

Mais aujourd'hui, si la pauvreté a été divisée par deux depuis les années 1990, "près de la moitié de l'humanité peut être considérée comme pauvre" assure l'association Oxfam France. Les Nations Unies estiment qu'un enfant sur six dans le monde "vit dans l'extrême pauvreté". Or, ce sont bien pour les moins de 15 ans que l'OMS tire la sonnette d'alarme. 

Effectivement, l'organisation alerte, en cette journée mondiale de lutte contre la tuberculose, d'une recrudescence du nombre de cas chez les plus jeunes. Alors que 8.2 millions de nouveaux cas ont été recensés en 2023, une augmentation de 10% sur un an est observée chez les moins de 15 ans. Ils représentaient 4.3% des cas en 2023.

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Sont comprises parmi les personnes touchées par la tuberculose, celles dites infectées et malades. Ceci signifie que nous pouvons avoir été contaminé par la bactérie Mycobacterium tuberculosis, sans qu'elle se soit activée pour autant. Éric Caumes indique qu'il y a "dix sujets infectés pour un malade". Les neuf autres présentent "une infection tuberculeuse latente contrôlée par leur immunité". Asymptomatiques, ils ne sont pas contagieux. Cependant, les souches dormantes peuvent se réveiller "à la prise de certains médicaments ou si vous devenez immunodéprimé".

Retour de la "Dame aux camélias" ? 

Avec 1.25 million de personnes décédées de la tuberculose en 2023, la maladie est "probablement redevenue la principale cause de décès due à un seul agent infectieux" dans le monde, signalent les Nations Unies. Pourtant connue depuis plusieurs siècles, elle reste mal prise en charge. L'infectiologue de la Pitié-Salpêtrière l'explique par le fait que "le vaccin développé ne fonctionne pas très bien et ne protège pas contre les formes graves de la maladie". 

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S'il est possible de vivre avec une forme active de la tuberculose grâce à des traitements antibiotiques, ceux-ci n'évoluent pas au rythme de l'apparition "des résistances émergentes". Un point déploré par Éric Caumes, dû aux peu de moyens développés dans la recherche en antibiothérapie et confirmé par Pamela Rendi-Wagner. La directrice de l'ECDC assure ce lundi qu'"avec l'augmentation de la tuberculose résistante aux médicaments, le coût de l'inaction aujourd'hui sera payé par nous tous demain".

L'infectiologue relativise tout de même en confiant qu'au cours des 20 dernières années, "trois nouveaux médicaments ont été trouvés pour traiter certaines formes précises." Ainsi, comme le dit Hans Kluge, directeur général de l'OMS dans un communiqué, "mettre fin à la tuberculose n'est pas un rêve. C'est un choix."