Hygiène, manque de médecin, personnel non qualifié : négligences mortelles à la maison de retraite

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Photo d'illustration. © JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP
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Jean-Luc Boujon et A.D , modifié à
Alors que les premiers résultats de l'enquête laissent entendre que les règles d'hygiène dans l'établissement étaient respectées, plusieurs personnes pointent de lourds manquements.
TÉMOIGNAGE

Depuis la fin du mois de décembre, treize personnes sont mortes de la grippe dans une maison de retraite de Lyon. Parmi ces pensionnaires très âgés, six avaient pourtant été vaccinés contre la maladie. D'après les premiers éléments officiels, les règles d'hygiène pour éviter la propagation du virus auraient été respectées. Mais certains témoignages contredisent ces informations.

Manque de soins et d'hygiène. La fille d'une des résidentes de l'établissement parle même de négligences régulières. La maman de Mireille, âgée de 87 ans, est pensionnaire de l'Ehpad Korian-Berthelot depuis six ans. Depuis l'entrée de sa mère dans l'établissement, Mireille constate des problèmes récurrents : des soins mal faits ou pas faits du tout, un personnel dépassé parce que trop peu nombreux ou carrément une hygiène défaillante. "Je suis descendue pour montrer à la directrice que les vêtements de maman étaient plein d'excréments. J'ai rouspété. J'ai demandé à ce qu'ils soient au moins mis dans des sacs en plastique. Le ménage dans les chambres est mal fait aussi. La dernière fois, c'est moi qui ai nettoyé l'armoire à toilette parce que ça me dégouttait", raconte-t-elle à Europe 1.

L'eau remplace le désinfectant. La direction faisait des économies partout, y compris sur les produits désinfectants, nous a confirmé une ancienne employée qui a préféré garder l'anonymat. "Les produits avec lesquels on devait désinfecter matelas, fauteuils roulants, barrière de lit, on nous faisait croire que c'était du désinfectant alors que c'était de l'eau", accuse-t-elle. Quant aux soins prodigués aux patients, "c'était le minimum, vite, vite, vite : parties intimes, visage et c'est tout. Il n'y avait pas le temps de prendre de douche, les soins n'étaient pas faits correctement", poursuit cette ancienne salariée. 

"Pas de médecin pendant des mois". Pire, il y avait aussi un gros problème de médecins, assure Mireille : "On est restés plusieurs mois sans avoir un docteur. Ce n'est pas normal. Il y a de la négligence". La fille de cette pensionnaire est très remontée contre l'établissement. Si sa mère va bien, la fille ne sait même pas si elle a bien été vaccinée contre la grippe. Sa maman, atteinte de la maladie d’Alzheimer, ne s'en souvient pas et la direction n'a pas tenu Mireille informée. 

Un dysfonctionnement serait aussi à déplorer dans le recrutement selon plusieurs familles. Souvent, le fils, le frère, le cousin de certains employés auraient été recrutés pour remplacer au pied levé par exemple une aide-soignante bien qu'ils soient non qualifiés. 

La direction a précisé lundi midi que six pensionnaires étaient toujours hospitalisés. Quatre d'entre eux vont mieux et pourraient sortir assez vite. La visite de l'inspection générale des affaires sociales doit quant à elle débuter dans la journée.