Les troubles bipolaires concernent 1 à 2 % des Français. 5:35
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Antoine Terrel , modifié à
Invité mardi de "Sans rendez-vous", sur Europe 1, le psychiatre Charles Laidi a donné quelques clés pour mieux comprendre les troubles bipolaires, qui touchent entre 1 et 2% de la population. Le spécialiste a insisté sur l'importance de se faire diagnostiquer le plus tôt possible. 
DÉCRYPTAGE

Ils touchent entre 1 et 2% de la population. Les troubles bipolaires, maladie mentale apparaissant notamment chez les jeunes adultes, peuvent avoir de lourdes conséquences sur la vie du patient et nécessitent un traitement approfondi et sur le long terme. Et si des troubles bipolaires correctement traités peuvent tout à fait se stabiliser, de nombreux patients sont diagnostiqués très en retard, avec des symptômes méconnus ou parfois confondus avec ceux de la dépression. Invité mardi de Sans rendez-vous, Charles Laidi, psychiatre au sein des Hôpitaux universitaires Henri Mondor, donne quelques clés pour mieux comprendre cette maladie. 

Que sont les troubles bipolaires ? 

Il reste difficile d'expliquer précisément l'origine des troubles bipolaires. "Il y aurait probablement une modification de la connectivité entre le cortex préfrontal et le cerveau qui est responsable des émotions", explique Charles Laidi. "Le trouble bipolaire est une alternance entre des phases de dépression et des phases de manie et d'hypomanie (épisode maniaque un peu moins fort)", poursuit-il. Plus concrètement, "les personnes vont être ralenties, avoir parfois des idées noires, une tristesse de l'humeur, puis, au contraire, des phases où elles sont plus excitées, avec un sommeil altéré, des idées inhabituelles". 

Cette maladie, rappelle le spécialiste, n'est pas réservée à une seule catégorie de la population, et "touche à peu près autant les hommes que les femmes". Et si le fait d'avoir un membre de sa famille, notamment un apparenté au premier degré, lui-même atteint de troubles bipolaires, augmente le risque, "ce n'est pas pour autant une maladie génétique", assure Charles Laidi. 

Par ailleurs, "des facteurs aggravants présents dans l'environnement" peuvent favoriser l'apparition de ces troubles, ajoute-t-il, citant notamment "la maltraitance, la consommation de certaines substances comme le cannabis". 

Comment faire le bon diagnostic ? 

Sur Europe 1, Charles Laidi rappelle l'importance pour ces personnes atteintes de troubles bipolaires de se faire diagnostiquer le plus tôt possible, "un vrai problème de santé publique". "On parle d'une dizaine d'années en moyenne de retard dans le diagnostic du trouble bipolaire", indique-t-il, et ce retard va s'avérer "très préjudiciable" pour les patients, qui "ont du mal à s'insérer dans la vie professionnelle" et qui connaissent aussi des difficultés dans leurs relations amicales ou amoureuses.

L'une des clés est de reconnaître les épisodes maniaques. S'il y en a plusieurs types, dans tous les cas, "il y a altération du sommeil", précise le psychiatre. Autre symptôme, "les patients vont avoir envie de parler à tout le monde, avoir beaucoup d'idées qui se bousculent dans leur tête, vont être souvent dans la séduction avec leur entourage de manière inappropriée, peuvent dépenser de l'argent de façon inconsidérée". 

Identifier la maladie est crucial car les personnes souffrant d'un trouble bipolaire peuvent perdre jusqu'à 10 ans d'espérance de vie. Explication : "les gens qui en souffrent ont souvent moins le temps de s'occuper de leur santé physique, ont plus de comorbidités, et plus souvent des problèmes de syndrome métabolique, de surcharge pondérale, voire d'obésité". Enfin, "ils vont moins aller chez le médecin qui pourrait leur diagnostiquer des pathologies comme des cancers".

Quels traitements ? 

Un trouble bipolaire est "une maladie qui va durer en général toute la vie", rappelle tout d'abord l'invité d'Europe 1. "Ça ne se guérit pas, mais ça se stabilise." Et, tient à rassurer Charles Laidi, "on a des patients qui arrivent à travailler, à avoir une vie de famille, même avec un trouble bipolaire".

Pour bien vivre avec un trouble bipolaire, il faut trois piliers : les médicaments, la psychothérapie, et une bonne hygiène de vie. Concernant les traitements, on peut notamment citer le lithium, qui "va permettre de stabiliser l'humeur pour éviter les épisodes de dépression et maniaques", mais aussi les traitements antiépileptiques. Dans certains cas, "on peut donner des antipsychotiques". Par ailleurs, la luminothérapie, ajoute le médecin, peut être une "alternative intéressante pour les patients qui ont une dépression". 

Les médicaments sont pris "tous les jours et de façon prolongée". Et s'il existe certains effets secondaires pour le lithium, comme "une légère somnolence ou parfois des problèmes rénaux", les médecins peuvent proposer des alternatives. 

D'un autre côté, "la psychothérapie est essentielle", explique Charles Laidi, et va permettre au patient "de mieux comprendre sa maladie. Enfin, une bonne hygiène de vie est importante. Le patient doit donc veiller à se coucher à des heures régulières, et faire attention à son alimentation, car les personnes atteintes d'un trouble bipolaire "sont plus à risque de présenter un surpoids ou de l'obésité". Si l'alcool peut continuer à être consommé avec modération, le cannabis est en revanche "un produit à éviter absolument", met en garde l'invité d'Europe 1.