Où en est-on sur l'épidémie de grippe ?

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ON FAIT LE POINT - Le nombre de morts dû à la grippe pourrait être particulièrement important cette année. 

La grippe est particulièrement virulente cet hiver. Selon le dernier bulletin épidémiologique de l’Institut national de veille sanitaire (InVS), 98 personnes admises en réanimation en sont déjà mortes depuis le début de l’épidémie. De son côté, l’urgentiste Patrick Pelloux a estimé mercredi dans les colonnes de Charlie Hebdo que "plus de 5.000 personnes" pourraient mourir de cette maladie en 2015. Comment expliquer un tel gouffre entre les deux chiffres ?

Combien de personnes ont été touchées par la grippe ? Ces chiffres sont connus et publiés chaque semaine par l’InVS. La maladie infectieuse a touché 2,5 millions de Français cette année. Les personnes les plus vulnérables face à cette maladie sont les plus de 65 ans. Ils représentent presque la moitié (48%) des cas graves.  

Le nombre de morts est-il en augmentation cette année ? Depuis le début de l’épidémie, le 1er novembre dernier, 98 personnes admises en réanimation à cause de la grippe sont mortes, selon l’InVS. Si on regarde les chiffres de ces cinq dernières années, le cru 2015 est visiblement élevé. La grippe a déjà tué plus de personnes qu’en 2014 (98) et qu’en 2012 (46). Le nombre de morts ne devrait cependant pas dépasser celui de 2010 (312), l’année où la grippe H1N1 a durement frappé le pays. "Mais ce n'est qu'une toute petite partie de la mortalité due à la grippe", explique le Docteur Daniel Lévy-Bruhl, épidémiologiste et spécialiste de la grippe à l'InVS. 

Pourquoi ce chiffre est "si" faible ? Il y a 15 jours, le professeur Bruno Lina, responsable du centre de référence sur la grippe tablait déjà sur une surmortalité aux alentours 15-20% par rapport à l’année dernière, soit 1.500 décès supplémentaires. Mais pourquoi un tel chiffre ? Comment expliquer un tel écart avec les chiffres officiels de la grippe ? Il faut prendre en compte les "morts indirectes", explique Marc Gentilini, professeur émérite des maladies infectieuses à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris. "On peut mourir de la grippe, mais le plus souvent, on meurt des complications cardio-pulmonaires de la grippe".

Urgences

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L’estimation de 5.000 à 7.000 est-elle crédible ? C’est Patrick Pelloux qui a évoqué ce chiffre en premier. Mercredi, dans les colonnes de Charlie Hebdo, l’urgentiste a estimé que la grippe ferait "bien plus de 5.000 morts en 2015". Le professeur François Bricaire, consultant au service des maladies infectieuses à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris a confirmé cette hypothèse, jeudi dans le Parisien. "Il n’est pas normal d’annoncer une telle estimation à l’heure actuelle avec ce que l’on sait", s’emporte l’infectiologue Marc Gentilini. "Cela entraîne un affolement dans la population qui n’est pas justifié et qui explique en partie l’afflux des malades dans les services d’urgences".

Reste un constat assez alarmant : la hausse de la surmortalité actuelle. "L'épisode de surmortalité hivernale est le plus important depuis ces cinq dernières années", confirme l'InVS. Une surmortalité qui touche notamment les personnes de plus 65 ans. La grippe est sans doute responsable en partie de cette hausse. Mais il est impossible de préciser sa part exacte dans cette surmortalité.

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© Le vaccin contre la grippe a été beaucoup moins efficace que prévu cette année. (AFP)

Pourquoi la grippe est-elle plus virulente cette année ? Première explication : le vaccin a été beaucoup moins efficace cette année car le virus a muté. Et le virus qui circule le plus, le H3N2, est particulièrement violent pour les personnes âgées, les plus fragiles face à la maladie. "On a des décès assez importants, presque un tous les jours", constate une infirmière qui travaille dans une maison de retraite près de Limoges.

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© Le nombre de grippes actuellement en France.

Où en est l’épidémie ? Selon le dernier bulletin épidémiologique de l’Institut national de veille sanitaire (InVS), l’épidémie est bel et bien en train de reculer. "Le nombre d'hospitalisations augmente toujours chez les personnes de 65 ans et plus, alors qu'il diminue dans les autres groupes d'âge", indique l'InVS. "Il est normal que les hospitalisations et les décès continuent à augmenter chez les personnes âgées car il existe un décalage entre le début de la grippe et les complications, comme les surinfections, qui surviennent au bout de plusieurs jours", explique le Docteur Daniel Lévy-Bruhl, épidémiologiste et spécialiste de la grippe à l'InVS.

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