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L’ancien directeur de la police nationale s’alarme de la dispersion des djihadistes et de leur famille après l’offensive de la Turquie en Kurdistan syrien. Mais il plaide toujours pour qu’ils soient jugés sur place.
INTERVIEW

L’offensive turque continue de semer le chaos au nord de la Syrie. Aux nombreux morts et blessés causés par les bombardements, aux milliers de personnes contraintes de fuir les zones de guerre, se pose un autre problème pour les pays européens en général, et pour la France en particulier : la dispersion des djihadistes et de leur famille, jusqu’alors détenus par les Kurdes, dans la nature.

Alors que des avocats réclament le rapatriement en urgence des ressortissants français, le gouvernement reste pour l’heure sans réponse, autre que mettre la pression sur Ankara. "C’est clairement une grande menace pour la France", a confirmé Frédéric Péchenard, ancien directeur de la police nationale, lundi matin sur Europe 1. "Il faut qu’on pense à la France et aux Français".

"Il y a au Kurdistan, à peu près, 10.000 combattants de l’Etat islamique qui sont actuellement détenus. Sur ces 10.000, il y a 2.500 à 3.000 étrangers dont une part non négligeable de Français. C’est effectivement extrêmement inquiétant", a détaillé Frédéric Péchenard. "Il faut qu’ils restent détenus, c’est absolument indispensable pour notre sécurité, pour la sécurité des Français. J’ai toujours pensé qu’il fallait qu’ils soient jugés sur place, là où ils ont commis leurs exactions."

"On parle de ces djihadistes qui sont là-bas. On peut parler aussi de ceux qui sont chez nous"

Mais que faire alors des enfants et des épouses des djihadistes, parfois présentés comme victimes de leur mari et de l'Etat islamique ? "Les enfants sont naturellement des victimes, surtout les petits enfants. Mais les femmes sont des combattantes de l’Etat islamique à leur place mais qui était tout à fait clair. Ce sont des gens qui sont partis, qui se sont engagés pour créer l’Etat islamique. On voit bien qu’un certain nombre de femmes ont pu participer à des actions", a répondu Frédéric Péchenard.

"Il n’y a pas d’un côté des méchants djihadistes et de l’autre des familles malheureuses. Il y a des djihadistes, des gens qui nous combattent, qui sont nos ennemis. Et à l’exception des enfants, et notamment les isolés, leur place est d’être jugée là où ils ont commis leurs exactions", a-t-il insisté.

L'actuel vice-président de la région Ile-de-France chargé des questions de sécurité avance un autre argument pour plaider contre le retour des djihadistes français et de leurs proches. "On parle des djihadistes qui sont là-bas. On peut parler aussi de ceux qui sont chez nous", a relevé Frédéric Péchenard. "Et notamment une des raisons pour lesquelles il est difficile de prendre ces djihadistes, c’est que nous en avons beaucoup en prison. Il y a plus de 500 djihadistes qui sont actuellement incarcérés. Il y a plus d’un millier de détenus radicalisés. On a 1.500-1.700 personnes qui sont en prison aujourd’hui mais qui vont nous poser des problèmes, dont un certain nombre vont sortir dans les mois à venir. Les services de renseignement français auront déjà fort à faire avec ces gens-là, en termes de surveillance, de détection, pour ne pas se rajouter des problèmes supplémentaires", a-t-il conclu.