Emmanuel Macron 2:37
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Michaël Darmon , modifié à
Pour notre éditorialiste Michaël Darmon, Emmanuel Macron a abandonné la présidence silencieuse qu'il voulait en rupture avec la présidence bavarde de François Hollande. En réalité, le chef de l'État tente de s'inscrire dans une histoire nationale en vue de l'élection présidentielle de 2022.
EDITO

Un isolement plutôt productif : loin de rester muet lors de sa semaine passée à La Lanterne, en raison de sa contamination au Covid-19, Emmanuel Macron a tenu à parler directement aux Français. Par une vidéo postée sur Twitter, mais aussi en livrant une interview fleuve à "L'Express", en milieu de semaine. Pour notre éditorialiste, Michaël Darmon, s'exprimer dans les médias serait presque devenu le péché mignon du chef de l'État. Celui-ci cherche à poser les fondations de sa future campagne présidentielle, en 2022.

"On est loin de la parole présidentielle rare ! On se souvient qu'au début du quinquennat, les macronistes se vantaient d'en finir avec la présidence bavarde de François Hollande. Le pouvoir était visiblement le monde du silence. Aujourd’hui, le président Macron sature l’espace médiatique. 

Cette année il sera intervenu une bonne dizaine de fois dans les médias. La situation est  hors du commun, il est vrai : crise sanitaire, attentats terroristes, sans compter les hommages aux personnalités. Ce sont autant d’occasions incontournables pour le président Macron d’intervenir.

"Pas ancré dans une tradition politique"

Mais à côté de ces figures imposées, il y a aussi des figures libres. Pensons à ces entretiens fleuves donnés par le président de la République au Point, il y a deux semaines, et à L'Express, cette semaine. Ces deux interviews sont en fait liées : elles veulent combler un manque. 'Emmanuel Macron n’a pas réussi à être ancré dans un terroir, une tradition politique', dit-on autour de lui. 

Dans L'Express, il disserte longuement sur les convulsion de l’âme française et, dans Le Point, il s'étend sur son rapport aux écrivains et aux mots. Il y fait même une confidence : son mot préféré est saxifrage, une petite fleur qui parvient à pousser entre les rochers. On devine l'autoportrait du président lettré et intello. D’ailleurs le président le confirme : le Panthéon est le temple de la République. 'La langue française est ma patrie', dit-il. Aucun doute : le Président frappe à la porte du roman national 

Il s’agit donc de poser les fondations d’une future campagne présidentielle en s’inscrivant dans une histoire nationale. Pour se rapprocher des Français, il contourne les médias traditionnels. Au site d’information Brut : une interview de plus de deux heures. Pour les magazines d’information : des dizaines de pages. En fait, Emmanuel Macron ne contourne pas le questionnement des journalistes mais cherche à reprendre le contrôle sur le temps de parole. 

Il n'est plus le maître des horloges

C'est d'ailleurs devenu la marque de fabrique de fabrique de son quinquennat : il subit les événements et n'est plus le fameux maître des horloges de 2017. Il est loin le temps béni des sept ou huit heures de marathon devant les élus pendant le 'grand débat national' retransmis sur les chaînes d’information.

Pendant cette période, on n'entendait aucune critique venant de l’Élysée sur ces chaînes en continu. Il faut dire qu'une seule personne occupait l’écran : lui-même. Après l’épisode 'du Président qui a le Covid mais qui travaille quand même', il y aura les vœux du 31 décembre. En 2021, Emmanuel Macron va accompagner l’année François Mitterrand. Pour le chef de l'État, se réinventer revient à plonger dans les archives de l'Histoire."