Maurice Papon est mort

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Maurice Papon est mort samedi après-midi dans une clinique de Pontault-Combault en région parisienne. Il est décédé à 15h20. Maurice Papon, seul responsable du régime de Vichy condamné pour son rôle dans la déportation des juifs durant la Seconde Guerre mondiale, avait été opéré mardi dernier pour une insuffisance cardiaque. Il avait 96 ans.

Maurice Papon est mort samedi après-midi à l'âge de 96 ans dans une clinique de Pontault-Combault en région parisienne. Il avait été hospitalisé il y a dix jours pour une insuffisance cardiaque, puis opéré mardi dernier. Son avocat avait alors expliqué que cette intervention s'était bien passée. Les causes exactes du décès n'ont pas été rendues publiques dans l'immédiat. Le cabinet du ministre de la Justice, Pascal Clément, n'a pas souhaité réagir. Condamné à dix ans de réclusion criminelle par la cour d'assises de Gironde le 2 avril 1998, plus de 40 ans après sa responsabilité, pour "complicité de crimes contre l'humanité", Maurice Papon avait été incarcéré fin 1999 après avoir été arrêté en Suisse où il avait fui. Après trois ans de détention, il avait été libéré le 18 septembre 2002 pour raisons de santé, deux experts médicaux l'ayant déclaré "impotent" et "quasi-grabataire". Son dossier avait été ouvert à la suite de premières plaintes déposées en 1981, elle-mêmes consécutives à des révélations du Canard enchaîné entre les deux tours de l'élection présidentielle de 1981. Alors que Jacques Chirac, élu président, venait de reconnaître pour la première fois en 1995 que la France avait été complice de l'holocauste, le procès fut unanimement considéré comme historique. Préfet, député, ministre, couvert d'honneurs dans l'après-guerre, Maurice Papon s'est toujours montré fier, voire arrogant pour ses contradicteurs. Il avait même affirmé avoir été résistant et avoir sauvé des vies. Un soir de janvier 1997, à la télévision, les Français avaient découvert un vieil homme sombre, repoussant de la main la photo de deux fillettes juives mortes en déportation. Et disant au journaliste qui lui tendait le cliché: "Vous faites du cinéma !".Un premier choix en 1940. Alors que Maurice Papon est un jeune fonctionnaire du ministère de l'Intérieur, il prend la route de Vichy, dix jours après l'entrevue Pétain-Hitler à Montoire. En 1942 à Bordeaux, une ville considérée comme particulièrement "collaborationniste", il devient secrétaire général de préfecture, une place stratégique qui coiffe le bureau des questions juives. Il a alors 32 ans. Le 2 juillet 1942, une lettre des SS, qui demande l'organisation d'une rafle de juifs des deux sexes, parvient à la préfecture. "Il y a lieu de suivre les ordres des SS", écrit alors le jeune secrétaire général. Un document qui pèsera lourd devant les juges. Début 1943, alors que le sort des armes bascule, Maurice Papon affirme avoir rendu des services à la Résistance et avoir fait libérer des juifs. Une affirmation qui ne pourra jamais être authentifiée, malgré les témoignages de plusieurs anciens résistants en sa faveur. Il fait carrière sous l'égide du général de Gaulle, devenant préfet en Algérie, avant d'être nommé en 1958 à la tête de la prestigieuse préfecture de police de Paris. Ce passage à Paris sera marqué par une nouvelle polémique historique. Le 17 octobre 1961, plusieurs dizaines d'Algériens (200 selon des rapports établis par des historiens) sont tués et jetés dans la Seine. Et là aussi, ce crime ne sera reconnu que quarante années plus tard. Valéry Giscard d'Estaing en fera son ministre du Budget, un sommet de la carrière du fonctionnaire. Paradoxe suprême, c'est grâce à Maurice Papon que la justice a reconnu explicitement pour la première fois que la France était bien responsable des crimes commis par l'Etat français pendant le régime de Vichy. Dans un jugement historique, la justice administrative, saisie par lui, a en effet ordonné à l'Etat de payer une partie des réparations qu'il devait à ses victimes.