Affaire Tapie : l'Etat passe à l'offensive

Bernard Tapie a beau se montrer serein, le gouvernement n'entend pas renoncer à ses intérêts dans cette affaire.
Bernard Tapie a beau se montrer serein, le gouvernement n'entend pas renoncer à ses intérêts dans cette affaire. © Reuters
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et Alexandre Kara , modifié à
Le gouvernement ne veut pas subir les événements. L’Etat se constituera donc partie civile.

L’affaire Tapie n’en finit plus de rebondir. A la mise sous statut de témoin assisté de Christine Lagarde vendredi dernier ont succédé lundi deux gardes à vue, celle de l’un des trois juges arbitres qui a tranché le litige avec le Crédit Lyonnais à l’avantage de l’homme d’affaires et celle de l’avocat de ce dernier. Mercredi, c'est Pierre Estoup, l'un des trois juges du tribunal privé, qui a été mis en examen. Et plus les nouveaux éléments s’accumulent, plus la pression monte sur l’exécutif. "Le gouvernement ne peut rester inactif. C’est le syndrome Cahuzac. Pas question d’apparaître cette fois en retard d’un train dans l’affaire Tapie", résume pour Europe 1 un haut fonctionnaire de Bercy. L'Etat se constituera donc partie civile "dans les meilleurs délais", a annoncé Bercy mercredi matin.

L’Etat partie civile... Au plus haut sommet de l’Etat, l’analyse est la même. Soulagé par l’absence de mise en examen de Christine Lagarde, l’Elysée avait donc donné son feu vert il y a quelques jours à Pierre Moscovici pour que l’Etat se porte partie civile dans cette affaire. François Hollande lui-même l'avait confirmé à demi-mots mardi lors d'une conférence de presse au côté du Président du gouvernement espagnol Mariano Rajoy. "Je n'ai pas tous les éléments encore de cette affaire mais ce que je veux dire comme principe, et cela vaut pour toutes les situations, c'est que l'Etat défendra toujours ses intérêts en temps utiles et pour accéder aux informations", avait lancé le chef de l'Etat.

... Via le CDR ? Selon des proches du dossier, ce pourrait être le cas dans le courant de la semaine prochaine. C’est en fait le Consortium de réalisation, la structure publique chargée de gérer le passif du Crédit Lyonnais, qui pourrait se porter partie civile sur instruction du gouvernement.

Tapie pas inquiet. Pour l’Etat, l’objectif final est clair : obtenir un recours en révision de la sentence arbitrale. En clair, lancer une procédure qui pourrait obliger in fine Bernard Tapie à restituer tout ou partie de l’enveloppe de 403 millions d’euros perçus en 2008 en réparation d’un préjudice lié à la vente d’Adidas par le Crédit Lyonnais en 1993. Dans le viseur de l’exécutif, l’homme d’affaires fait montre de sérénité. Joint par Europe 1, Bernard Tapie affiche son calme et assure qu’il a l’habitude de cet acharnement judiciaire. Enfin, il affirme ne pas avoir été pour l’instant convoqué par la justice. Pour conclure, il se félicite d’avoir le soutien de ses amis et surtout de sa femme.

Un juge arbitre mis en examen. Pierre Estoup, l'un des trois juges du tribunal privé qui a soldé le litige, a été mis en examen mercredi du chef d'escroquerie en bande organisée et faux, a annoncé le parquet de Paris. Les enquêteurs soupçonnent le magistrat à la retraite, âgé de 86 ans, de liens professionnels avec Me Maurice Lantourne, l'avocat de Bernard Tapie, ce qui pourrait constituer un conflit d'intérêts jetant une ombre sur l'arbitrage. Quelques heures seulement après cette décision, Bernard Tapie l'a jugé "incompréhensible". "Il y  a forcement dans ce dossier des choses que j'ignore pour que les motifs de la mise en examen soient si graves", a déclaré l’homme d’affaires. "C'est d'autant plus incompréhensible que mon avocat, Maurice Lantourne, a été entendu ce matin et qu'il est ressorti" sans que rien ne soit retenu contre lui.