Christophe Deloire : "Loup Bureau était dans un isolement presque total"

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A.D , modifié à
Le secrétaire de Reporters sans frontières est revenu sur la la détention et la libération du journaliste français Loup Bureau, tout en s'indignant du sort réservé aux journalistes sous le régime d'Erdogan.
INTERVIEW

Loup Bureau a foulé le tarmac de Roissy dimanche matin après 51 jours de détention en Turquie. Le journaliste s'est dit "très soulagé" et "très fatigué". Christophe Deloire, secrétaire de Reporters sans frontières, a œuvré à sa libération. Il était au micro de Philippe Vandel dans Village Médias pour évoquer les coulisses de l’événement.

Une "détention très éprouvante". Christophe Deloire était aux côtés du jeune journaliste à son arrivée. "Il marchait lentement. Il était fatigué pour plusieurs raisons, d'abord parce que sa détention a été très éprouvante, non pas parce que les conditions étaient très difficiles - les prisons turques ne sont plus ce que'elles étaient, ce n'est plus le film Midnight Express - mais il était dans un isolement presque total. Il ne parle pas turc et il n'a pu parler à sa famille qu'une fois toutes les deux semaines avec des cartes téléphoniques de deux minutes. Ensuite, il n'avait pas de visibilité et je crois que les autorités françaises non plus. Pesaient sur ses épaules des charges fortes : appartenance à une organisation terroriste, tout ça pour quelques interviews."

Entendu sur europe1 :
Aujourd’hui, c'est la doctrine du pouvoir turc : journalisme égale terrorisme"

"Aberration totale". Il risquait officiellement 27 ans de prison. "Dans ce genre de cas, dans le sien comme dans celui de tous les journalistes turcs qui sont en prison pour des raisons absolument aberrantes, il n'est pas possible que les magistrats" croient en leur culpabilité. "Les dossiers sont tellement creux." les autorités avaient en l'espèce trouvé une photo de Loup Bureau avec des militants kurdes syriens. "C'est une aberration totale que d'assimiler ça à du terrorisme. Mais aujourd’hui, c'est la doctrine du pouvoir turc : journalisme égale terrorisme." Ce qui a permis la libération du journalisme français selon Christophe Deloire a été la mobilisation. "Dire à la Turquie que son image sera affectée même si Erdogan continue à aggraver la situation sans en être très affecté, il y a un risque pour lui économique, pour les investissements, pour le tourisme. Ensuite, il s'agit de faire passer des messages discrets et je dois saluer le travail des autorités françaises."

"Jamais Loup Bureau n'aurait dû passer un jour en détention". Jean-Yves Le Drian s'est en effet rendu en Turquie les 14 et 15 septembre. "Ce n'est pas un hasard si la libération a été prononcée" le 15 septembre. "Et il y a eu deux entretiens entre Emmanuel Macron et Erdogan. C'est ainsi que ça s'est joué même si dans l'absolu, les journalistes ne devraient pas être libérés par l'intermédiaire de pressions diplomatiques. Jamais Loup Bureau n'aurait dû passer un jour en détention."