Pakistan : la Cour suprême va trancher le cas d'Asia Bibi

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N.M. avec AFP
Cette chrétienne a été condamnée en 2010 à la peine capitale pour avoir insulté le prophète de l'islam. Son appel va être examiné par la Cour suprême.

Elle a été condamnée à la peine capitale en 2010 mais pourrait peut-être voir sa peine changer.  La Cour suprême du Pakistan a en effet accepté mercredi d'examiner l'appel d'Asia Bibi. Cette chrétienne, mère de cinq enfants, a été condamnée à mort pour blasphème après avoir été accusée par des musulmanes de son village d'avoir insulté le prophète Mohammed, des faits qu'elle a toujours niés. Asia Bibi a depuis reçu le soutien de plusieurs dirigeants occidentaux, dont celui du Pape François et de la maire de Paris, Anne Hidalgo.

Des preuves fabriquées de toutes pièces ? Mercredi matin, "la Cour suprême a accepté d'examiner l'appel de ma cliente contre la confirmation de sa peine de mort par la haute cour de Lahore", a annoncé à l'AFP l'un des avocats d'Asia Bibi, Saiful Malook, à la sortie de l'audience, tenue à Lahore. La Cour va désormais fixer une date pour le début de l'examen de l'appel, a ajouté l'avocat, qui dénonce des preuves contre sa cliente fabriquées de toutes pièces.

Le juge Saqib Nisar, à la tête du trio de magistrats de la Cour suprême chargé de l'affaire, a confirmé avoir accepté la demande des avocats d'Asia Bibi. Il a ajouté qu'il examinerait également la demande d'un avocat de l'accusation qui réclame l'annulation de l'appel, interjeté trop tard selon lui.

ARIF ALI / AFP

Ashiq Masih, le mari d'Asia Bibi, mercredi devant la Cour suprême.

Une dispute sur un verre d'eau. Asia Bibi avait été accusée en 2009 d'avoir insulté le prophète des musulmans, Mohammed, par des musulmanes de son village situé dans le Pendjab. Une dispute avait éclaté entre elles lorsque ces musulmanes avaient refusé de boire dans un verre qu'Asia Bibi, non musulmane, avait utilisé. Quelques jours, plus tard, ces femmes étaient allées la dénoncer pour blasphème, provoquant son arrestation et son emprisonnement.

Une loi contre le blasphème particulièrement dure. La chrétienne est depuis devenue un symbole du débat sur la loi sur le blasphème, un sujet ultra sensible au Pakistan. Dans cette république islamique, des accusations non prouvées peuvent conduire une foule à lyncher des suspects. Insulter le prophète de l'islam fait encourir la peine capitale et profaner le Coran, livre saint des musulmans, peut entraîner une condamnation à la prison à vie. Les acquittements, eux, sont rares.

La loi sur le blasphème est cependant défendue bec et ongles par les cercles religieux conservateurs de ce pays musulman à 96%. Elle est en revanche dénoncée par des défenseurs des droits de l'Homme qui l'estiment instrumentalisée pour régler des conflits personnels ou fonciers, notamment contre les minorités religieuses discriminées telles que les chrétiens  qui représentent 1,6% de la population. Ces abus sont régulièrement confirmés par des témoignages sur le terrain.

Au Pakistan, des soutiens rares. Au Pakistan, peu de responsables ont publiquement soutenu Asia Bibi, de peur d'être à leur tour accusés de blasphème ou menacés. L'un des rares fut Salman Taseer, gouverneur de la province du Pendjab, qui s'était également déclaré favorable à une révision de la loi sur le blasphème. Il a été abattu en 2011 par un extrémiste religieux qui lui reprochait ces prises de positions. Un meurtre non condamné depuis.