Afghanistan 1:26
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Marion Gauthier et Louis de Raguenel, édité par Manon Fossat , modifié à
Des milliers de personnes continuent à camper dans l'aéroport de Kaboul dans l'espoir de trouver une place dans un avion pour pouvoir quitter le pays. Mais le compte à rebours est lancé pour ces Afghans, car la France doit faire décoller son dernier engin ce jeudi. Et certains craignent de rester piégés sur place.

Le compte à rebours a commencé pour les dernières évacuations à l'aéroport de Kaboul. La France doit en effet faire décoller son dernier avion vendredi soir.  Cette date-butoir est "imposée par les Américains" dont le dispositif se retirera le 31 août, a précisé une source gouvernementale. Les évacuations de populations afghanes s'effectueront jusqu'à jeudi soir voire vendredi matin, "quelques heures" avant le départ des militaires et services de l'ambassade à la manœuvre sur place, selon cette même source. Au total, 2.000 Afghans menacés par le retour des talibans auront été exfiltrés par les autorités françaises. Mais sur place, de nombreux candidats à l'exil restent toujours coincés et pour eux l'angoisse grandit. C'est notamment le cas de cette famille, contactée par Europe 1.

"Tout le monde a peur"

Le père, Mohammed, risque un dernier trajet vers l'aéroport et espère qu'il n'aura pas à revenir sur ses pas alors que certains parlent d'une chasse à l'homme lancée dans la capitale contre ceux, comme lui, qui ont collaboré avec les forces étrangères ou le gouvernement de la République d'Afghanistan. "Les rues sont vides, remplies de talibans, et tout le monde a peur. Je ne sors pas, je reste chez moi. J'ai reçu tellement de messages de menaces me disant que mon temps est passé", raconte le sexagénaire nerveux, usé par des jours et des jours d'attente, de plans élaborés et finalement avortés. 

Mercredi, un bus devait l'emmener sur le tarmac et ainsi éviter les talibans. Mais ce dernier a été annulé à la dernière minute. "Je suis en colère. J'ai essayé plein de fois d'aller à l'aéroport, j'ai reçu des lettres du ministère, mais je ne peux même pas entrer, il y a trop de monde. Et maintenant la route pour y aller est bloquée. Le temps nous manque, nous devons partir", désespère-t-il. Et leur temps est en effet compté puisque Mohammed et sa famille vont devoir tenter une dernière fois de se frayer un chemin jusqu'au dernier avion français cet après-midi. 

L'ambassadeur pour fermer la marche

Dès le dimanche 15 août, plusieurs centaines de Français et d'Afghans s'étaient réfugiés à l'ambassade de France à Kaboul alors que la ville était prise par les talibans. La plupart ont pu être exfiltrés jusqu'à l'aéroport, comme l'ambassadeur David Martinon, qui est resté dans le pays et continue d'assurer sa mission depuis ces lieux. Car comme le capitaine d'un bateau, en cas de crise, il est celui qui doit fermer la marche et partir en dernier.

Concernant sa propre évacuation, plusieurs options ont été étudiées. La première et plus probable est qu'il monte à bord de ce fameux dernier avion prévu vendredi en partance de Kaboul pour Paris. Quant à sa sécurité, "ça devrait bien se passer car il y a suffisamment de policiers du Raid et de militaires des forces spéciales", assure un acteur du dispositif. L'autre option envisagée est que David Martinon rejoigne un autre pays proche de l'Afghanistan où la France est présente afin de continuer à assurer sa mission. Si mercredi soir l'option d'une évacuation vers Paris était privilégiée, dans un contexte si instable, les prochaines heures s'annoncent décisives et tout peut encore changer. 

Et pour preuve, la France ne devait quitter l'Afghanistan que le 31 août prochain. Seulement pour organiser leur repli, les Américains ont souhaité que les autres pays quittent l'aéroport de Kaboul plusieurs jours avant cette date fatidique. Une volonté assortie d'un principe de précaution. Les autorités françaises estiment également avoir accompli leur mission et préfèrent ne pas jouer les prolongations au risque que la situation sécuritaire ne se dégrade.