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Ariane Ménage avec AFP / Crédit photo : ALEXI J. ROSENFELD / GETTY IMAGES EUROPE / GETTY IMAGES VIA AFP , modifié à
71 jours après l'attaque du Hamas, Israël pleure la mort de trois otages tués "par erreur" par ses propres soldats dans la bande de Gaza, où l'armée multiplie les raids aériens malgré les pressions de son allié américain pour plus de retenue.
L'ESSENTIEL

L'armée israélienne a livré samedi les premiers éléments de son enquête sur la mort de trois otages tués "par erreur" par ses soldats à Gaza, expliquant qu'ils avaient brandi un drapeau blanc et appelé à l'aide en hébreu. Les victimes, Yotam Haïm, 28 ans, Samer al-Talalqa, 25 ans et Alon Lulu Shamriz, 26 ans, ont été tués au cours d'opérations dans un quartier de la ville de Gaza, selon l'armée. Tous trois faisaient partie des quelque 250 personnes prises en otage lors de l'attaque sans précédent lancée le 7 octobre par le Hamas sur le sol israélien, qui a fait environ 1.140 morts, en majorité des civils, selon les dernières données officielles israéliennes. A ce jour, 129 otages sont toujours retenus à Gaza.

En représailles, Israël a promis de "détruire" le Hamas et bombarde sans relâche la bande de Gaza. L'armée mène depuis le 27 octobre une offensive terrestre contre le mouvement terroriste à présent étendue à tout le territoire, y compris au sud où se sont massés des centaines de milliers de civils déplacés par la guerre. Selon un dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas, au pouvoir à Gaza, 18.800 personnes, à 70% des femmes, des enfants et adolescents, ont été tuées par les bombardements israéliens.

Les informations à retenir :

  • Trois otages israéliens ont été tués "par erreur" par les soldats de leur propre armée, Benjamin Netanyahu évoque "une insupportable tragédie"
  • Les otages avaient brandi un drapeau blanc, indique l'armée israélienne
  • Parmi les 240 personnes capturées le 7 octobre, 129 seraient toujours retenus à Gaza
  • Une seconde trêve humanitaire pourrait voir le jour, supervisée par le Qatar
  • La riposte d'Israël dans la bande de Gaza a fait 18.800 morts, dont 70% de femmes, enfants et adolescents, selon le Hamas
  • Des familles d'otages retenus dans la bande de Gaza ont exhorté samedi le gouvernement israélien à mettre un terme aux combats et à mener des négociations en vue de leur libération
  • L'armée israélienne a annoncé samedi qu'un soldat avait été tué et que deux autres avaient été blessés par un "véhicule aérien ennemi" dans la région de Margaliot
  • L'armée israélienne a annoncé samedi avoir découvert des armes et arrêté environ 80 membres du Hamas dans le secteur d'un hôpital du nord de la bande de Gaza

Netanyahu dit avoir "le cœur brisé", veut maintenir la "pression militaire"

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a affirmé samedi qu'il avait eu "le coeur brisé" à l'annonce de la mort de trois otages tués par l'armée israélienne dans la bande de Gaza, mais qu'il fallait y maintenir "la pression militaire".

"Cela m'a brisé le coeur. Cela a brisé le coeur de la nation toute entière", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse. "Malgré tout le profond chagrin, je veux préciser une chose: la pression militaire est nécessaire tant pour le retour des otages que pour assurer la victoire sur nos ennemis".

Des familles d'otages demandent à Israël de "proposer maintenant un plan" de négociation

Des familles d'otages retenus dans la bande de Gaza ont exhorté samedi le gouvernement israélien à présenter rapidement un nouveau plan de négociation en vue de leur libération, plus de deux mois après le début de la guerre avec le Hamas.

"Tout ce que nous recevons encore et encore, ce sont des otages morts. Notre revendication n'est pas un combat, c'est une demande qu'aurait fait n'importe qui s'il s'agissait de son père. Prenez-nous en considération et proposez maintenant un plan" de négociation, a déclaré Noam Perry, la fille d'un Israélien otage à Gaza, lors d'un rassemblement de familles d'otages à Tel-Aviv.

Israël annonce la fin d'une opération autour d'un hôpital, "un massacre" dit le Hamas

L'armée israélienne a annoncé samedi avoir découvert des armes et arrêté environ 80 membres du Hamas dans le secteur d'un hôpital du nord de la bande de Gaza, une opération lors de laquelle elle a perpétré un "massacre" selon le mouvement islamiste palestinien. Le porte-parole du ministère de la Santé du Hamas avait affirmé mercredi que l'armée avait tiré sur des chambres de patients de l'hôpital Kamal Adwan, dans la ville de Gaza, et dénoncé un "siège" de plusieurs jours, faisant état d'arrestations de membres du personnel.

Samedi, l'armée israélienne a indiqué avoir "terminé son opération" dans ce secteur, qui "a été utilisé par le Hamas comme un centre de commandement et de contrôle". "Les soldats ont interpellé environ 80 terroristes", "détruit des infrastructures terroristes et localisé de nombreuses armes", d'après l'armée, qui a précisé que du personnel médical avait été "interrogé". "Le personnel a admis que des armes étaient cachées dans des couveuses censées être utilisées pour des bébés prématurés", selon l'armée.

Le Hamas a lui dénoncé un "massacre horrible" dans l'hôpital, l'armée ayant "détruit avec des bulldozers les tentes des déplacés" qui s'y étaient réfugiés, provoquant "un certain nombre de décès". Les "crimes" israéliens ont "pour but d'intimider notre peuple et de le chasser de sa terre", a accusé le mouvement, qui a pris le pouvoir dans la bande de Gaza en 2007.

Un soldat israélien tué dans le nord d'Israël par un "véhicule aérien ennemi"

L'armée israélienne a annoncé samedi qu'un soldat avait été tué et que deux autres avaient été blessés par un "véhicule aérien ennemi" dans la région de Margaliot, dans le nord d'Israël, près de la frontière libanaise. Un porte-parole a confirmé à l'AFP que les victimes avaient été tuées par un "véhicule aérien ennemi". "Le sergent-major (réserviste) Yehezkel Azaria est tombé au cours d'une activité opérationnelle. Il était âgé de 53 ans au moment de sa mort", a déclaré l'armée dans un communiqué.

"Cessez les combats et négociez", demandent des familles au gouvernement israélien

Des familles d'otages retenus dans la bande de Gaza ont exhorté samedi le gouvernement israélien à mettre un terme aux combats et à mener des négociations en vue de leur libération, plus de deux mois après le début de la guerre avec le Hamas. "Nous ne récupérons que des corps. Nous voulons que vous arrêtiez les combats et commenciez les négociations", a déclaré Noam Perry, la fille d'un Israélien otage à Gaza, lors d'un rassemblement de familles d'otages à Tel-Aviv.

L'événement survient au lendemain de l'annonce de la mort de trois otages, tués "par erreur" par l'armée israélienne. "On a l'impression d'une roulette russe : qui sera le prochain à apprendre la mort d'un être aimé ? Nous voulons savoir quelle proposition est sur la table du gouvernement", a déclaré Ruby Chen, père d'Itay Chen, un otage de 19 ans. "L'armée sioniste connaît très bien nos conditions pour libérer (les otages), aucun d'entre eux ne sera libéré si nos conditions ne sont pas acceptées", a déclaré le porte-parole de la branche armée du Hamas, Abou Obeida.

Les otages tués par des soldats israéliens ont brandi un drapeau blanc

Selon les premiers éléments de l'enquête ouverte par l'armée israélienne, les trois otages étaient apparus dans un secteur où les troupes subissent de nombreuses embuscades. Ils ont agité un drapeau blanc improvisé et parlé en hébreu. "Un des soldats les a vus lorsqu'ils sont apparus. Ils ne portent pas de t-shirts et ils ont un bâton avec un tissu blanc dessus. Le soldat s'est senti menacé et tir (...) Deux (otages) sont tués", a déclaré un responsable militaire à des journalistes. "Immédiatement, un autre est blessé et se rue dans le bâtiment", a-t-il ajouté, précisant que les soldats ont ensuite "entendu un appel à l'aide en hébreu". L'incident va "à l'encontre de nos règles d'engagement", a-t-il encore dit.

"Une insupportable tragédie"

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a aussitôt regretté "une insupportable tragédie" qui plonge "tout l'État d'Israël dans le deuil", tandis qu'à Washington la Maison Blanche évoquait une "erreur tragique". Peu après cette annonce, des familles d'otages et des sympathisants ont défilé avec des photos de captifs devant le ministère israélien de la Défense à Tel-Aviv pour demander un accord immédiat en vue de leur libération.

"Chaque jour, un otage meurt", pouvait-on lire sur une affiche alors qu'un drapeau israélien placé dans la rue a été aspergé de peinture rouge évoquant du sang. "Le seul moyen de libérer les otages vivants est la négociation", a déclaré sur place Motti Direktor, un manifestant de 66 ans. "Nous sommes ici après une soirée bouleversante, et je meurs de peur. Nous exigeons un accord maintenant", a déclaré Merav Svirsky, dont le frère Itay est otage à Gaza.

Une seconde trêve ?

Environ 240 personnes ont été capturées dans l'attaque sanglante de commandos du Hamas le 7 octobre en sol israélien qui a fait environ 1.200 morts, en majorité des civils, selon les autorités. En représailles, Israël a promis de "détruire" le Hamas et lancé une offensive militaire dans la bande de Gaza qui a fait 18.800 morts, dont 70% de femmes, enfants et adolescents, selon le Hamas.

Un accord de trêve obtenu grâce à une médiation du Qatar avait permis fin novembre une pause d'une semaine dans les combats, la libération d'une centaine d'otages détenus par le Hamas et de 240 prisonniers palestiniens écroués en Israël, ainsi que l'acheminement d'une aide humanitaire d'urgence. Après l'annonce de la mort des trois otages, le site Axios a indiqué que David Barnea, le chef du Mossad, les services secrets extérieurs israéliens, doit rencontrer ce week-end le Premier ministre qatari, Mohammed ben Abdelrahmane Al-Thani.

La rencontre, en Europe, doit porter sur la libération d'otages, poursuit Axios sans préciser le lieu de cet entretien ni le nombre de captifs qui pourraient être libérés parmi les quelque 129 estimés toujours retenus à Gaza.

Journaliste tué

Si Israël est endeuillé samedi, le Qatar et Gaza le sont aussi après le décès de Samer Abou Daqa, caméraman d'Al Jazeera tué dans une frappe aérienne israélienne à Khan Younès, principale ville du sud de la bande de Gaza, selon la chaîne qatarie. Le chef de bureau d'Al Jazeera à Gaza, Waël Dahdouh, qui avait perdu son épouse et deux de ses enfants au début de la guerre, a lui été blessé au bras par des éclats d'obus et transféré dans un hôpital de Khan Younès.

"Nous étions en reportage, nous avions filmé, nous avions terminé et nous étions avec la défense civile mais alors que nous revenions, ils nous ont frappés avec un missile. Tant que je respire, il n'y a pas de problème. Dieu nous aide, c'est tout", a déclaré à l'AFP Waël Dahdouh. Plus de 60 journalistes et employés de médias sont morts depuis le début de la guerre Israël-Hamas, selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ). "Les équipes de Gaza, en particulier Waël et Samer, ont joué un rôle crucial pour révéler l'ampleur des destructions et des horreurs des atrocités israéliennes", a estimé Al Jazeera.

Kerem Shalom

Après plus de deux mois de guerre et un siège total imposé par Israël depuis le 9 octobre, les conditions de vie à Gaza sont cauchemardesques pour les civils palestiniens acculés dans des zones toujours plus petites, estime l'ONU. Israël a autorisé vendredi l'ouverture "temporaire" d'un nouveau point d'entrée pour l'aide humanitaire à Gaza assiégée, tout en poursuivant d'intenses frappes aériennes malgré les pressions américaines pour plus de retenue.

La décision d'autoriser l'aide humanitaire à entrer à Gaza par le terminal de Kerem Shalom vise à décongestionner celui de Rafah, unique point d'entrée de vivres et de médicaments, alors qu'Israël resserre l'inspection des camions acheminant de l'aide.

"Tout est détruit"

Quelque 1,9 million d'habitants, soit 85% de sa population, ont été déplacés, selon l'ONU, dont beaucoup ont dû fuir plusieurs fois face aux bombardements et aux combats qui s'étendent. Tôt samedi, le Hamas a fait état de "combats acharnés" dans le secteur de Jabaliya (nord) tandis et de frappes aériennes et de tirs d'artillerie intenses à Khan Younès, nouvel épicentre des combats dans le sud du territoire.

La veille, à Rafah, Bakr Abu Hajjaj avait survécu à l'une de ses frappes. "Tout est détruit, cela fait 70 jours que nous subissons cette guerre et cette destruction", se désole-t-il, interrogé par l'AFP. De passage en Israël jeudi et vendredi, le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, Jake Sullivan a demandé aux responsables israéliens de passer à court terme à une phase de "plus faible intensité".

Dans un signe de crispation inédit face à l'ampleur des pertes palestiniennes, le président américain Joe Biden avait d'ailleurs dénoncé des bombardements "aveugles", prévenant son allié israélien qu'il risquait de perdre son soutien international. La cheffe de la diplomatie française Catherine Colonna est attendue samedi au Liban et dimanche en Israël pour tenter d'éviter un embrasement régional à l'heure de tensions croissantes à la frontière libano-israélienne et en mer Rouge où les rebelles yéménites Houthis, proches du Hamas, menacent le trafic maritime.