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Nicolas Tonev (à Kiev), Thiabdu Hue, avec AFP , modifié à
Au dix-huitième jour de l'invasion russe, une base militaire ukrainienne tout près de la Pologne a été bombardée par l'armée russe, qui a affirmé dimanche y avoir "éliminé" des "mercenaires étrangers" et des "armes étrangères", tandis qu'un journaliste américain a été tué près de Kiev. Europe 1 fait le point sur la situation.
L'ESSENTIEL

Une base militaire ukrainienne tout près de la Pologne a été bombardée par l'armée russe, qui a affirmé dimanche y avoir "éliminé" des "mercenaires étrangers" et des "armes étrangères", tandis qu'un journaliste américain a été tué près de Kiev, la capitale de l'Ukraine. Sur le front des pourparlers russo-ukrainiens, un négociateur russe a évoqué dimanche des "progrès significatifs", Kiev indiquant de son côté que Moscou avait cessé de lancer "des ultimatums" et commençait à "écouter attentivement nos propositions".

Les principales informations :

  • La ville de Marioupol est assiégée et attend un convoi humanitaire
  • Un journaliste américain tué, un autre blessé
  • Les Occidentaux refusent d'entrer dans le conflit
  • Une frappe sur une base militaire près de Lviv fait 35 morts

L'économie de guerre en Ukraine

Kiev est de plus en plus cernée. Les troupes russes veulent neutraliser les localités avoisinantes pour bloquer la ville. L'envoyé spécial d'Europe 1, Nicolas Tonev, souligne que la population locale s'installe dans une économie de guerre. Une retraitée confiait à l'envoyé spécial d'Europe 1 que pour les files d'attente, qui peuvent être très longues devant les pharmacies, il est possible maintenant pour les plus âgés de s'inscrire afin de ne pas rester debout pendant des heures.

Pour ce qui concerne la nourriture disponible en magasin, l'économie de guerre se traduit par des livraisons totalement erratiques et irrégulières. Des rayons se vident, constate Nicolas Tonev, en particulier la viande fraîche, le poisson frais, et les produits laitiers sont rares. Parfois, c'est au contraire l'abondance inexplicable, inattendue. Le centre commercial près de l'hôtel de l'envoyé spécial d'Europe 1 a reçu jeudi une quantité énorme de kiwis. Les fruits sont partis très vite, il n'y en a déjà presque plus. Le même jour, ajoute Nicolas Tonev, il y a eu un arrivage de pommes de terre. Ce qui rassure les habitants, c'est qu'il y a du pain dont le prix a presque doublé néanmoins. Certains magasins l'offrent aux clients les plus modestes.

L'autre difficulté est pour prendre soin de soi. Quelques rares coiffeurs sont encore ouverts à Kiev, témoigne Nicolas Tonev, mais c'est plus difficile pour les vêtements. Toutes les enseignes sont fermées, avec un repère temporel sur les devantures qui ramènent quelques jours après le début de la guerre.

De nouvelles négociations russo-ukrainiennes lundi

Une session de négociations par visioconférence entre la Russie et l'Ukraine se tiendra lundi, a confirmé un conseiller du président Zelensky. Un négociateur russe a évoqué dimanche des "progrès significatifs", Kiev indiquant de son côté que Moscou avait cessé de lancer "des ultimatums" et commençait à "écouter attentivement nos propositions". Depuis le début de l'offensive russe, trois tours de pourparlers ont eu lieu au Bélarus. Ils étaient focalisés sur la création de couloirs humanitaires pour les civils.

Moscou dit avoir tué des mercenaires étrangers

L'armée russe a affirmé avoir tué des "mercenaires étrangers" lors de frappes dimanche contre "la localité de Staritchi et la base militaire de Yavoriv" dans l'ouest de l'Ukraine, près de la frontière polonaise. "En conséquence de cette frappe, jusqu'à 180 mercenaires étrangers et une importante quantité d'armes étrangères ont été éliminés", a affirmé lors d'un briefing le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konachenkov, sans que ce chiffre ne puisse être confirmé de source indépendante par l'AFP.

35 morts dans une frappe russe près de la Pologne

Des frappes aériennes russes ont visé dans la nuit de samedi à dimanche une base militaire dans l'ouest de l'Ukraine, près de la frontière polonaise, faisant 35 morts et 134 blessés, selon un bilan communiqué par les autorités dimanche à la mi-journée. "La Russie a attaqué le Centre international pour le maintien de la paix et de la sécurité. Des instructeurs étrangers travaillent là-bas", a déclaré le ministre ukrainien de la Défense.

La base de Yavoriv, située à environ 40 kilomètres au nord-ouest de Lviv, a servi ces dernières années de terrain d'entraînement aux forces ukrainiennes sous l'encadrement d'instructeurs étrangers, notamment américains et canadiens. Elle était l'un des principaux centres servant aux exercices militaires conjoints avec l'Otan.

Un journaliste américain tué

Un journaliste américain a été tué et un autre blessé par balles dimanche à Irpin, à la lisière nord-ouest de Kiev, où les forces ukrainiennes combattent les forces russes, selon des sources concordantes. Les deux hommes ont été touchés à la mi-journée alors qu'ils circulaient en voiture avec un civil ukrainien, également blessé, a précisé à l'AFP un médecin engagé auprès des forces ukrainiennes.

Les autorités ukrainiennes ont rapidement accusé les Russes d'avoir tiré sur les journalistes, mais l'origine des tirs était difficile à établir dans l'immédiat.

Les Russes tentent d'encercler Kiev

Les troupes russes cernent de plus en plus Kiev: présentes dans les faubourgs de la capitale, elles cherchent à éliminer les défenses à l'ouest et au nord de la ville pour la "bloquer" et ont détruit samedi l'aéroport avoisinant de Vassylkiv, selon les Ukrainiens. Dans le sud du pays, neuf personnes ont été tuées dans des frappes russes sur la ville portuaire de Mykolaïv, proche d'Odessa, ont indiqué dimanche les autorités.

Dans l'Ouest, une "frappe" a visé tôt dans la matinée l'aéroport d'Ivano-Frankivsk situé à une centaine de kilomètres au sud de Lviv, selon le maire de la ville.

Un convoi humanitaire attendu à Marioupol

Un convoi humanitaire est resté plus de cinq heures bloqué à un barrage russe samedi, et l'espoir était qu'il puisse parvenir à Marioupol ce dimanche, en provenance de Zaporojie via Berdiansk, a avancé samedi la vice-Première ministre ukrainienne Irina Verechtchouk. L'enjeu est crucial pour Marioupol : cette cité portuaire stratégique, située dans le sud-est du pays entre la Crimée et le Donbass, est plongée dans une situation critique, "quasi désespérée" selon Médecins sans frontières (MSF), manquant de vivres et privée d'eau, de gaz, d'électricité et de communications.

Des tentatives d'évacuation de centaines de milliers de civils ont échoué à plusieurs reprises. "Marioupol est toujours encerclée, ce qu'ils ne peuvent pas avoir par la guerre, (les Russes) veulent l'avoir par la faim et par le désespoir. Comme ils ne peuvent pas faire tomber l'armée ukrainienne, ils visent la population", analyse une source militaire française.

Moscou reconnaît que la situation "dans certaines villes" a pris des "proportions catastrophiques", selon les mots du général Mikhaïl Mizintsev, cité samedi par les agences de presse russes. Mais le militaire a accusé les "nationalistes" ukrainiens de miner les zones résidentielles et de détruire des infrastructures, privant les civils de voies d'évacuation et de ressources élémentaires.

Des frappes russes dans l'Est

Des frappes sur un grand monastère de la région de Donetsk ont fait dans la nuit de samedi à dimanche une trentaine de blessés, tandis que des bombes au phosphore ont frappé une localité de la région de Lougansk, ont affirmé des responsables ukrainiens de ces régions de l'est du pays.

Selon le chef de la police de Popasna, située à une centaine de kilomètres à l'ouest de Lougansk, les Russes ont utilisé des bombes au phosphore sur sa localité. Cette information était invérifiable dans l'immédiat.

Bombes sur Mykolaïv

Toujours au sud, la métropole d'Odessa continue à se préparer à une offensive des troupes russes, qui se concentrent pour l'heure à une centaine de kilomètres à l'est sur la ville de Mykolaïv. Les bombardements massifs ont notamment touché un centre de cancérologie et un hôpital ophtalmologique, a constaté une journaliste de l'AFP.

Les victimes jonchent les rues de certaines villes, et les bilans sont impossibles à vérifier. "Environ 1.300" militaires ukrainiens ont été tués depuis le 24 février, a indiqué samedi le président Volodymyr Zelensky, dans un premier décompte officiel fourni par les autorités ukrainiennes depuis le début de l'invasion.

Une manifestation antirusse à Kherson

Une grande manifestation a eu lieu dimanche dans la ville de Kherson, dans le sud de l'Ukraine, pour protester contre son occupation par les forces russes, selon des médias locaux. Des vidéos postées sur le site d'un média indépendant, Ukraïnska Pravda, laissaient entendre une foule crier "Rentrez chez vous !", "Rentrez chez vous tant que vous êtes encore vivants!" ou "Kherson - c'est l'Ukraine".

Un deuxième maire enlevé

Un maire ukrainien a été enlevé dimanche par des soldats russes dans le sud du pays, deux jours après le kidnapping d'un autre maire, selon le gouverneur de la région de Zaporojie (sud). Ce dernier a affirmé que l'armée russe avait capturé le maire de la ville de Dniproroudné, après avoir enlevé celui de Melitopol, à environ 80 km au sud de Dniproroudné. L'Union européenne a condamné ces deux enlèvements.

100.000 réfugiés en 24 heures, près de 2.200 habitants de Marioupol tués depuis le début de l'invasion

Quelque 100.000 personnes en 24 heures sont venues grossir les rangs des réfugiés qui ont fui les combats en Ukraine, portant leur nombre à 2.698.280, selon un décompte publié dimanche par le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) de l'ONU. "Environ 1.300" militaires ukrainiens ont été tués depuis le 24 février, a indiqué samedi le président ukrainien Volodymyr Zelensky, dans un premier décompte officiel fourni par les autorités ukrainiennes.

Si au moins 596 civils ont été tués, selon le décompte dimanche de l'ONU, la mairie de Marioupol estime que plus de 2.187 habitants ont été tués depuis le début de l'offensive russe.

Entre "mensonges" et "signal"

Vladimir Poutine affiche lui aussi toujours sa détermination. Samedi, le président russe a accusé les forces ukrainiennes de "violations flagrantes" du droit humanitaire, lors d'un entretien téléphonique avec les dirigeants français Emmanuel Macron et allemand Olaf Scholz. "Mensonges", a réagi la présidence française. Et les appels de MM. Macron et Scholz à un "cessez-le-feu immédiat" sont restés lettre morte.

Mais sur le front diplomatique, une inflexion s'est peut-être fait jour en cette fin de semaine : Volodymyr Zelensky s'est félicité d'une "approche fondamentalement différente" de Moscou dans ses récents pourparlers avec Kiev, notant que la Russie ne se contentait plus de "juste poser des ultimatums".

Interrogé sur des déclarations faites vendredi par Vladimir Poutine évoquant des "avancées" dans les pourparlers russo-ukrainiens, son homologue ukrainien s'est dit "content d'avoir un signal de la Russie", lors d'une conférence de presse à Kiev. Une rencontre avait eu lieu jeudi entre les chefs de la diplomatie russe et ukrainien en Turquie, sans résultat. Auparavant s'étaient tenu trois sessions de pourparlers au niveau de délégations. Pourparlers qui se poursuivront par visioconférence, selon le Kremlin.