Antony Blinken 1:00
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avec AFP , modifié à
Au 264e jour de l'invasion russe en Ukraine, les Etats-Unis ont annoncé de nouvelles sanctions contre la Russie. Objectif, perturber les chaînes d'approvisionnement de l'appareil militaire russe. De son côté, Zelensky a affirmé que 400 "crimes de guerre" russes avaient été documentés, sans préciser s'ils concernaient uniquement la région de Kherson.

Les Etats-Unis ont annoncé lundi une nouvelle salve de sanctions visant à perturber les chaînes d'approvisionnement de l'appareil militaire russe et des réseaux financiers liés au Kremlin dont des entités en France et en Suisse. Les sanctions visent notamment la société russe d'électronique Milandr et des sociétés-écrans en Arménie, à Taïwan et en Suisse liées à l'entreprise russe, indiquent des communiqués du département du Trésor américain et du département d'Etat.

"En réponse à la guerre non provoquée de Moscou contre l'Ukraine, les Etats-Unis continueront de perturber les chaînes d'approvisionnement de l'armée russe et à imposer des coûts sévères à ceux qui viennent en aide au président Vladimir Poutine, ainsi que tous ceux qui soutiennent la brutalité russe vis-à-vis de son voisin", affirme le secrétaire d'Etat Antony Blinken cité dans le communiqué.

Les informations à retenir :

  • Les États-Unis annoncent de nouvelles sanctions contre la Russie
  • Volodymyr Zelensky a affirmé avoir des preuves documentées des "atrocités" commises à Kherson par les Russes.
  • Le président ukrainien s'est rendu dans la ville de Kherson, reprise aux Russes qui revendiquent pourtant toujours posséder la ville.
  • Sergueï Lavrov est arrivé à Bali où il représentera la Russie au G20, il y balaye des rumeurs d'hospitalisation.

Les Russes ont commis «des atrocités» à Kherson, déclare Zelensky

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a accusé les forces russes d'avoir commis des "atrocités" à Kherson, quelques jours après la reprise de la ville par les Ukrainiens. "Les corps des tués sont retrouvés: ceux de civils et de militaires. Dans la région de Kherson, l'armée russe a laissé derrière elle les mêmes atrocités que dans d'autres régions de notre pays, où elle a pu entrer", a dit Volodymyr Zelensky dimanche soir lors de son allocution quotidienne.

Il a ajouté que 400 "crimes de guerre" russes avaient été documentés, sans préciser s'ils concernaient uniquement la région de Kherson. Nombre d'habitants de la ville ont dit à l'AFP sur place que les forces russes, qui ont achevé d'évacuer la ville vendredi après huit mois de présence, y ont semé la désolation. "Ils ont pillé tous les appartements, ils ont détruit les portes, ils vivaient dans les appartements. Ils ont pris tout le matériel électronique. Ce sont des voleurs", enrage Svetlana Vilna, 47 ans, qui dit s'être "sentie comme en prison pendant neuf mois".

Oleg Nazarenko, 25 ans, raconte que "les jeunes étaient arrêtés et fouillés. Ils nous terrorisaient. Ils étaient pires que les fascistes. C'était comme ça". Un étudiant en philosophie trentenaire, qui dit se prénommer Andrïi, assure que "maintenant nous n'avons pas d'électricité dans la ville, pas d'eau, pas de chauffage central, pas de connexion mobile, pas de connexion internet mais nous n'avons pas de Russes, et j'en suis extrêmement heureux".

Grand soulagement de voir l'occupant partir

Le président Zelensky avait accusé samedi soir les Russes d'avoir détruit les infrastructures essentielles avant de fuir. "Nous sommes en train de rétablir les communications, internet, la télévision et nous faisons tout notre possible pour restaurer la fourniture d'électricité et d'eau aussi vite que possible", a-t-il déclaré dimanche.

Dans ce chaos énergétique et logistique, la liesse prédominait depuis vendredi. Drapeaux ukrainiens, accolades avec les soldats de Kiev, klaxons et sifflets égayaient encore la ville dimanche, a constaté l'AFP. On pouvait aussi voir des véhicules militaires détruits, des bâtiments mutilés, et sentir une odeur de bois brûlé dans ce port stratégique de la mer Noire, où la guerre faisait rage il y a encore quelques jours. Dimanche, la population exprimait surtout un grand soulagement de voir l'occupant parti. 

Alors que des queues s'étirent devant des postes de distribution de nourriture et d'aide d'urgence, de nombreux adultes et enfants se déplacent dans les rues enveloppés dans des drapeaux bleu et jaune. Certains sont réunis sur la place principale de la ville, en vue de communiquer avec leurs proches via le service internet par satellite Starlink, propriété d'Elon Musk, le patron de Tesla et Twitter.

"J'ai besoin de reprendre contact avec ma famille", explique Klavdia Mych, une enseignante à la retraite âgée de 69 ans. "Nous n'avons pas d'eau depuis une semaine, ajoute-t-elle. Et ils disent que tout est miné: ça fait peur". Sur Facebook, Oleksandr Todortchouk, fondateur de UAnimals, un mouvement pour les droits des animaux, affirme que les occupants sont partis en emmenant avec eux "la plupart des animaux du zoo en Crimée [territoire ukrainien annexé par Moscou en 2014], des lamas aux loups en passant par les écureuils.

Après les revers militaires successifs de l'armée russe depuis l'été, le retrait russe de Kherson est une humiliation d'autant plus grande pour le Kremlin que la région de cette grande ville est l'une des quatre annexées par la Russie en violation du droit international à la suite de son invasion de l'Ukraine, le 24 février.

Il s'agit du troisième repli d'ampleur russe depuis le début de la guerre, la Russie ayant renoncé au printemps à prendre Kiev face à la résistance acharnée des Ukrainiens, avant d'être chassée de la quasi-totalité de la région de Kharkiv (nord-est) en septembre.

le service de sécurité dit avoir arrêté à Kherson un militaire russe "déguisé en civil"

Le service de sécurité ukrainien a affirmé lundi avoir arrêté à Kherson (sud) un militaire russe "déguisé en civil", alors que les craintes que des soldats de Moscou soient toujours présents incognito dans la ville libérée vendredi sont fortes.

"Les agents du service de sécurité ont arrêté un militaire russe dans Kherson libérée. L'homme était déguisé en civil et a tenté de se faire passer pour un +local+", a indiqué cette structure (SBU) dans un communiqué, quelques heures après la visite surprise du président Volodymyr Zelensky. Selon le SBU, "il a admis qu'il était un soldat professionnel" des forces russes, en charge de "recueillir du renseignement (...) et effectuer (des opérations) de sabotage".

L'Ukraine reprend le contrôle de dizaines de localités

Les forces armées ukrainiennes ont repris le contrôle de dizaines de localités dans la région de Kherson, qui avait été la première grande ville à tomber après l'invasion russe. Après l'évacuation de Kherson, sur la rive occidentale du Dniepr, un ordre d'évacuation vers la région russe de Krasnodar, près de la Crimée, a été lancé par les autorités locales prorusses samedi soir à l'attention de leurs employés du district de Kakhovka, sur la rive orientale du fleuve.

Dans la nuit de dimanche à lundi, le commandement sud de l'armée ukrainienne a affirmé que les forces russes continuaient à "mettre en place une défense sur la rive gauche du Dniepr" et "des lignes de défense supplémentaires à plusieurs niveaux pour tenir les frontières occupées".

Moscou "continue d'infliger des dommages par le feu à nos troupes et aux localités libérées le long de la rive droite du Dniepr en utilisant aviation, artillerie lourde, MLRS (lance-roquettes, ndlr) et mortiers", a-t-il ajouté. Sur le plan diplomatique, la secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen a estimé lundi, à la veille du sommet du G20 en Indonésie, que mettre fin à la guerre en Ukraine était "tout simplement la meilleure chose à faire pour l'économie mondiale".

L'invasion lancée il y a neuf mois par le président russe Vladimir Poutine a de profondes répercussions économiques, avec l'envolée des prix de l'énergie et des produits alimentaires. Officiellement, l'invasion de l'Ukraine ne figure pas à l'agenda du club des 20 grandes économies dont les dirigeants se retrouvent mardi et mercredi sur l'île indonésienne de Bali. Moscou a d'ailleurs appelé le G20 à se concentrer sur les questions économiques et financières plutôt que politiques et sécuritaires.

Zelensky visite Kherson

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a visité lundi Kherson, ville clé du Sud du pays reprise aux Russes la semaine dernière, a indiqué à l'AFP une source au sein de la présidence ukrainienne. M. Zelensky s'est promené en tenue de style militaire dans les rues de la ville, entouré de gardes du corps lourdement armés, sans toutefois porter lui-même de casque ni de gilet pare-balles, selon des vidéos publiées sur les réseaux sociaux.

"Gloire à l'Ukraine!", lui ont crié des habitants depuis le balcon d'un immeuble. "Gloire aux héros!", ont répondu conformément à la tradition le chef de l'État et ceux qui l'accompagnaient. Les forces russes s'étaient retirées quelques jours plus tôt de Kherson après huit mois d'occupation, laissant le champ libre aux soldats ukrainiens pour entrer vendredi dans la ville.

Le Kremlin a pourtant souligné lundi que la ville ukrainienne de Kherson appartenait à la Russie, réagissant à la venue dans cette cité du sud ukrainien du président Volodymyr Zelensky quelques jours après la retraite des forces russes. "Nous ne commenterons pas, vous savez bien que c'est le territoire de la Fédération de Russie", a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, alors que les forces russes se sont retirées la semaine passée de cette ville, capitale de la région de Kherson dont Moscou revendique l'annexion.

Avant midi, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a chanté l'hymne national à Kherson, où le drapeau bleu et jaune a été hissé devant le bâtiment de l'administration régionale. Selon une vidéo postée sur Twitter par le chef de cabinet de la présidence ukrainienne, Andriï Iermak, on pouvait voir M. Zelensky, main sur le cœur, entonner devant des militaires et des habitants les paroles de l'hymne national: "Nos ennemis périront, comme la rosée au soleil, et nous aussi, frères, allons gouverner, dans notre pays".

Au G20, Sergueï Lavrov hospitalisé ?

Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov est arrivé dimanche sur l'île indonésienne de Bali pour le sommet du G20 où il représentera mardi et mercredi Vladimir Poutine, ont constaté des journalistes de l'AFP. Le Kremlin a expliqué vendredi l'absence du président russe au G20 par des contraintes d'agenda, mais son absence est perçue comme un signe d'isolement en pleine intervention militaire en Ukraine. Le ministre russe a atterri à bord d'un avion officiel russe à l'aéroport de Denpasar depuis Phnom Penh, où il a assisté au sommet de l'Association des nations d'Asie du Sud-Est (Asean).

Lundi, des murmures sur une hospitalisation de Sergueï Lavrov en Indonésie ont pris de l'ampleur. La Russie a démenti, vidéo à l'appui, des rumeurs d'hospitalisation du ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, à son arrivée au G20 à Bali, en Indonésie. "C'est du fake du plus haut niveau", a déploré sur Telegram la porte-parole du ministre, Maria Zakharova, après la diffusion d'informations sur l'hospitalisation du chef de la diplomatie russe. Elle a ensuite publié une vidéo du ministre, assis en short sur une terrasse, dans laquelle il balaye les rumeurs sur sa santé et conseille aux journalistes occidentaux "d'écrire plus souvent la vérité".

"Les mois à venir seront difficiles" pour l'Ukraine, avertit le chef de l'OTAN

"Les mois à venir seront difficiles" pour l'Ukraine, a averti lundi le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, alors que le pays célèbre la libération de Kherson, ville clé du sud du pays reprise aux Russes la semaine dernière. Le retrait de la Russie de Kherson "démontre l'incroyable courage des forces armées ukrainiennes", mais "nous ne devons pas commettre l'erreur de sous-estimer la Russie", a déclaré M. Stoltenberg lors d'une conférence de presse à La Haye, après avoir discuté avec le gouvernement néerlandais.

"Les forces armées russes conservent des capacités importantes ainsi qu'un grand nombre de soldats et la Russie a démontré sa volonté d'assumer des pertes importantes", a ajouté le chef de l'OTAN.