Un missile tiré depuis un vaisseau français dans la nuit de vendredi à samedi. 24:03
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A.D , modifié à
Invité d'Europe 1, l'ancien ministre des Affaires étrangères souligne le rôle crucial que pourrait avoir la France pour réinventer une politique avec la Russie.
INTERVIEW

La France, l’Angleterre et les Etats-Unis ont frappé la Syrie de manière ciblée, vers 3h, dans la nuit de vendredi à samedi. Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères était l'invité de l'émission C'est arrivé cette semaine pour analyser la situation. Pour lui, l'avenir dépend maintenant des relations que la France réussira à établir avec la Russie, alliée de la Syrie.

"Frappe inévitable". L'opération de la nuit, cette frappe ciblée "était inévitable compte tenu du faisceau d'indices ou de preuves (de l'utilisation d'armes chimiques par Damas), des annonces et compte tenu du traumatisme historique français dans la guerre de 14-18" notamment à cause de l'utilisation du gaz moutarde durant la Grande Guerre (...) "Il y a un vrai engagement français particulier sur la question des armes chimiques", réagit l'ancien ministre. "La question n'est pas tellement syrienne, la question est celle de la prolifération (...) Sur ce point précis, c'était très important et c'est très logique", d'avoir frappé la Syrie. Les cibles étaient d'ailleurs"liées à la fabrication ou à l'utilisation de l'arme chimique."

Entendu sur europe1 :
Ça se joue plus dans la relation future avec la Russie qu'avec la Syrie. C'est quasiment secondaire la question syrienne

"Dialogue politique avec la Russie". Malgré la frappe, les Etats-Unis et la Russie étaient en contact toute la semaine passée. Les frappes "n'empêchent pas de discuter, d'annoncer, de continuer à parler", estime l'ancien homme d'Etat. Hubert Védrine ajoute par ailleurs qu'"il est très important que les Etats-Unis, la France, les uns et les autres continuent à parler aux Russes (...) Énormément de choses dépendent de cette suite." "Cela veut dire un dialogue politique avec la Russie" avec en ligne de mire une "nouvelle Constitution pour la Syrie et des élections", sans pour autant écarter Bachar el-Assad. "Nous les Occidentaux, on n'a plus le pouvoir de décider avec qui on parle ou pas dans le monde. Il y a une sorte de retour à un réalisme nécessaire. Ça se joue plus dans la relation future avec la Russie qu'avec la Syrie. C'est quasiment secondaire la question syrienne", martèle l'ex ministre.

"Je ne vois que la France". Hubert Védrine voit la France comme un leader pour mener à bien cette relation internationale avec la Russie. "Trump est paralysé par ses histoires internes, la Grande-Bretagne est hors jeu, les autres Européens ne cherchent surtout pas à aller sur ce terrain compliqué et dangereux. S'il y a un pays européen qui peut en ce moment réinventer une politique avec la Russie, qui soit à la fois très ferme - on vient de montrer - exigeante, dissuasive et qui en même temps à long terme, je ne vois que la France." Rien n'a été fait selon l'ancien ministre pour humilier la Russie. "Il faut voir la réaction russe." Les frappes n'étaient pas "contre la Russie. C'est peut-être même une façon d'être pris au séreux."