Corée du Sud : une championne olympique raconte à la barre les violences de son entraîneur

Shim Suk-hee n'avait pas témoigné en première instance de peur d'avoir à "confronter" son ancien entraîneur.
Shim Suk-hee n'avait pas témoigné en première instance de peur d'avoir à "confronter" son ancien entraîneur. © AFP
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avec AFP , modifié à
Devant le tribunal de Suwon,  Shim Suk-hee a accusé lundi son entraîneur Cho Jae-beom de l'avoir frappée depuis ses sept ans, jusqu'à lui briser les doigts, la "traumatisant profondément".

Shim Suk-hee, double médaillée d'or aux Jeux olympiques, s'est effondrée en sanglots en racontant devant un tribunal sud-coréen les années d'abus endurés aux mains de son entraîneur. La patineuse de short-track, 21 ans, a quatre médailles olympiques à son compteur, dont l'or en relais aux JO de Sotchi de 2014 et à domicile à Pyeongchang, en février. Devant le tribunal de Suwon, au sud de Séoul, elle a accusé lundi son entraîneur Cho Jae-beom de l'avoir frappée depuis ses sept ans, la "traumatisant profondément".

"Je pourrais vraiment mourir". À mesure qu'elle grandissait, les violences augmentaient aussi, a-t-elle ajouté. "À partir de sept ans, il me battait souvent, et m'agressait verbalement. À un moment, il m'a frappée avec un bâton de hockey, me brisant les doigts." Une autre fois, il lui avait jeté dessus des boulons en métal, lui ouvrant le front, a-t-elle raconté. Quelques semaines avant les JO d'hiver de Pyeongchang, "il m'a donné des coups de pied et de poing si forts, surtout à la tête, que je me suis même dit, 'Je pourrais vraiment mourir'", a-t-elle dit, éclatant en sanglots.

La Corée du Sud est une puissance sportive régionale, l'un des deux seuls pays d'Asie avec le Japon à avoir accueilli à la fois les Jeux olympiques d'hiver et d'été. Il figure régulièrement dans le tableau des dix premiers médaillés olympiques. Dans une société déjà ultraconcurrentielle, gagner dans l'arène sportive compte plus que tout. Les entraîneurs ont un énorme pouvoir sur la carrière des jeunes athlètes. Les abus physiques et verbaux sont fréquents et ceux qui les dénoncent sont souvent ostracisés en tant que "traîtres". Cho Jae-beom a avoué aux policiers avoir frappé la jeune patineuse ainsi que trois autres athlètes afin "d'améliorer leurs performances". En première instance, il avait été condamné à dix mois de prison mais avait fait appel.

"Je suis en traitement psychologique". La jeune femme a ajouté que Cho Jae-beom lui avait fait subir un "lavage de cerveau". Il la menaçait de mettre fin à sa carrière sportive si jamais elle parlait des abus. Toute sa vie, a-t-elle raconté, elle a été "paralysée par une peur et une angoisse extrêmes" vis-à-vis du coach. "Je suis en traitement psychologique pour dépression, angoisses, troubles du sommeil et stress post-traumatique", a-t-elle dit. Le passage à tabac subi avant les JO d'hiver l'avait commotionnée, ce qui a affecté sa performance.

Elle n'avait pas témoigné en première instance de peur d'avoir "à le confronter". Mais en appel, elle "a rassemblé son courage", car elle "a pensé que je devais dire la vérité". L'équipe féminine de curling, autre star des JO d'hiver, avait elle aussi accusé son encadrement d'abus verbaux et d'exploitation.