Afghanistan : une manifestation de soutien aux Iraniennes perturbée par des tirs de talibans

Soutien aux femmes iraniennes
Les talibans ont tiré en l'air pour disperser les femmes afghanes venues soutenir les Iraniennes. © QUENTIN VERNAULT / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP
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avec AFP
En soutien aux manifestantes iraniennes, plusieurs femmes afghanes étaient venues se rassembler devant l'ambassade d'Iran à Kaboul jeudi 29 septembre. Lors de cette manifestation, les talibans sont intervenus avec des tirs en l'air afin de disperser les personnes présentes lors de ce rassemblement.

Les talibans ont dispersé en tirant en l'air, jeudi 29 septembre, un rassemblement devant l'ambassade d'Iran à Kaboul. Des femmes afghanes étaient venues soutenir les manifestantes iraniennes, dont elles disent partager la lutte. Aux cris de "Femme, Vie, Liberté", quelque 25 femmes, foulard sur la tête, ont manifesté pendant une quinzaine de minutes sur la route en face de l'ambassade iranienne. Cela avant d'être dispersées par des coups de feu tirés en l'air par les talibans postés devant le bâtiment, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Les talibans ont également tenté de frapper les manifestantes à coup de crosse, selon la même source. "L'Iran se soulève, maintenant c'est à notre tour. De Kaboul à l'Iran, dites non à la dictature !", ont scandé les manifestantes, derrière des banderoles que les talibans leur ont arrachées des mains.

Des dizaines de personnes tuées par la police en Iran

Des manifestations ont lieu tous les soirs en Iran, depuis le 16 septembre dernier, date à laquelle la jeune Mahsa Amini est morte à l'hôpital, trois jours après son arrestation à Téhéran par la police des mœurs pour non respect du code vestimentaire strict pour les femmes en République islamique d'Iran, qui doivent se couvrir les cheveux en public. Plusieurs dizaines de personnes ont été tuées par la police pendant ces manifestations. Dans la capitale afghane, les femmes, dont certaines avaient dissimulé leur visage derrière des lunettes de soleil et des masques chirurgicaux, ont ramassé les débris de leurs bannières. Ceci dans le but d'en faire des boules de papier et de les jeter sur les talibans qui leur faisaient face.

Ces derniers ont également ordonné à des journalistes d'effacer les vidéos et les photos de la manifestation. "Nous devons apprendre des femmes iraniennes sans craindre d'être tuées ou emprisonnées, nous devons défendre nos droits", a témoigné sous couvert d'anonymat une manifestante auprès de l'AFP. "Tant que ces deux gouvernements seront au pouvoir, nous ne pourrons jamais être libres (...) Ici aussi les gens sont fatigués des crimes des talibans. Nous sommes sûrs qu'un jour notre peuple se dressera de la même manière que le peuple iranien", a-t-elle ajouté.

Des règles très strictes sur la conduite des femmes

Depuis le retour des talibans au pouvoir en août 2021, plusieurs manifestations sporadiques de femmes ont été organisées dans la capitale et d'autres villes du pays, malgré leur interdiction. Que ce soit contre la perte de leur emploi ou pour réclamer le droit de travailler. Certaines d'entre elles ont été réprimées avec force et les militantes qui avaient appelé aux rassemblements arrêtées par les talibans. "L'Afghanistan est un pays qui recule de jour en jour, posant un sérieux défi, en particulier pour les femmes", a déclaré, sous couvert d'anonymat, une autre femme ayant participé à la manifestation et jointe ensuite au téléphone par l'AFP.

Après 20 ans de guerre et le départ de l'armée américaine d'Afghanistan, les nouveaux dirigeants du pays ont en effet imposé des règles très strictes sur la conduite des femmes, notamment dans la vie publique, ordonnant aux femmes de porter un voile intégral en public, de préférence la burqa. Le ministère de la Promotion de la vertu et de la Prévention du vice, dont les agents vêtus d'une blouse blanche sillonnent la ville, a vite remplacé celui des Affaires féminines. Chargé de veiller au respect des règles, il a notamment ordonné la séparation des femmes et des hommes dans les parcs publics de Kaboul.

Des écoles secondaires pour filles fermées

Les fondamentalistes islamistes ont également fermé les écoles secondaires pour filles dans la plupart des provinces. Mardi 27 septembre dernier, un rapport des Nations unies a dénoncé ces "restrictions sévères" aux droits des femmes, notamment l'interdiction de l'enseignement secondaire, et a appelé les talibans à "revenir immédiatement sur cette décision".

La levée des restrictions sur les droits des femmes est une condition essentielle à la reconnaissance du gouvernement taliban, a insisté la communauté internationale. Jusqu'à présent, aucun pays n'a reconnu le gouvernement islamiste.