Des centaines d'afghans tentent de fuir leur pays. 2:00
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Côme Bastin et Chloé Goudenhooft, avec AFP , modifié à
Dimanche soir, les talibans se sont emparés de la capitale afghane alors que le président du pays avait fui à l’étranger. Depuis les réactions de la communauté internationales se multiplient : les Etats-Unis justifient le retrait de leurs troupes, le Royaume-Uni veut rassembler et l’Inde, voisin de l’Afghanistan séparée seulement par le Pakistan, s’inquiète. 

"Je suis le quatrième président à gouverner avec une présence militaire américaine en Afghanistan (...) Je ne veux pas, et je ne vais pas, transmettre cette guerre à un cinquième", a lancé Joe Biden. Le président américain a défendu dimanche sa décision de mettre fin à la guerre la plus longue qu'ait connue les Etats-Unis. Vingt ans après avoir été chassés du pouvoir, les talibans sont entrés dans Kaboul dans la soirée. Dès le retrait des troupes américaines, à partir du mois de mai, les talibans se sont lancés dans une conquête éclaire du pays, prenant en l'espace d'une dizaine de jours les principales villes du pays.

"Ceci n'est pas Saïgon", a assuré le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken sur CNN, évoquant la chute de la capitale vietnamienne, en 1975, un souvenir encore douloureux pour les États-Unis. Mais la pilule est amère pour Washington dont l'image en ressort profondément écornée et qui déplore 2.500 personnes tuées, ainsi qu'une facture de plus de 2.000 milliards de dollars

Le Royaume-Uni appelle l’Occident à adopter "une position commune"

Au Royaume-Uni, ces derniers jours ouvertement critique concernant son allié américain, le Premier ministre britannique Boris Johnson a appelé les Occidentaux à adopter "une position commune" face aux talibans "pour éviter que l'Afghanistan ne redevienne un terreau pour le terrorisme". Boris Johnson a même convoqué les députés au Parlement, mercredi, malgré la pause estivale pour évoquer le sujet. Le premier ministre, qui devait prendre des vacances cette semaine, a été obligé d'organiser une réunion d'urgence dimanche dans l'après-midi.

En France, le gouvernement est également inquiet face à l’arrivée des talibans. Emmanuel Macron conduira lundi midi un Conseil de défense en visioconférence puis il s’exprimera à 20 heures sur la situation en Afghanistan. Ces trois pays ont envoyé des renforts militaires pour faciliter l’évacuation de leurs ressortissants civils et diplomates.

L’inquiétude grandissante en Inde

Les Indiens, également affectés, ont vécu une étrange journée dimanche : ils célébraient les 75 ans de leur indépendance tout en regardant avec effroi le gouvernement afghan s'effondrer. Mais pourquoi une telle attention ? L'Afghanistan est un pays voisin et ami dans lequel l'Inde a investi pas moins de 3 milliards de dollars, estime The Indian Express, avec la construction d'infrastructures importantes comme le Parlement afghan ou encore le barrage de l'amitié Indo-afghan. Tout est désormais tombé aux mains des talibans.

L'objectif était d'assurer une gouvernance stable sur les flancs ouest du Pakistan. L'ennemi juré, qui est accusé par le Time Of India, comme la plupart des titres en Inde, d'avoir soutenu les talibans en sous-main pour nuire à l'Amérique et bien sûr, à l'Inde. La colère est grande contre le voisin, avec la peur qu'en Afghanistan, taliban accentue les risques terroristes. 

L’ONU "préoccupé par l'avenir des femmes et des filles"

Enfin, la conquête de Kaboul par les combattants du mouvement fondamentaliste a également été commentée par le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres. Il a appelé dimanche les talibans et toutes les autres parties afghanes "à la plus grande retenue". Les talibans sèment déjà la terreur dans les zones conquises : meurtres de civils, décapitations, enlèvements d'adolescentes pour les marier de force, entre autres.

"Le secrétaire général est particulièrement préoccupé par l'avenir des femmes et des filles, dont les droits durement acquis doivent être protégés", a également dit l'ONU dans un communiqué. La militante pakistanaise pour les droits des femmes réfugiée au Royaume-Uni et prix Nobel de la paix, Malala Yousafzai, s’est également alarmé. La jeune femme explique regarder en état de choc ce qui se passe dans ce pays et partage sa profonde inquiétude pour les femmes, les minorités et les défenseurs des droits humains. Le Conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir lundi pour débattre de la situation en Afghanistan. Cette réunion, au cours de laquelle Antonio Guterres fera un rapport, se tiendra à 14 heures, à New-York.

L'ambassadeur russe à Kaboul va rencontrer les talibans mardi

L'ambassadeur de Russie à Kaboul va pour sa part rencontrer les talibans mardi, a annoncé lundi l'émissaire du Kremlin pour l'Afghanistan, Zamir Kaboulov. "L'ambassadeur russe (Dmitri Jirnov) est en contact avec les talibans, demain, il va rencontrer leur coordinateur pour la sécurité" pour évoquer notamment les questions liées à la sécurité de l'ambassade de Russie à Kaboul, a indiqué Zamir Kaboulov à la radio Echo de Moscou. Les talibans "assurent déjà la sécurité du périmètre extérieur de l'ambassade russe. Demain, ils vont discuter des détails pour le long terme", a-t-il précisé.

Selon Zamir Kaboulov, la reconnaissance ou non par la Russie du nouveau pouvoir afghan "va dépendre de ses agissements". "Nous allons regarder attentivement à quel point leur approche de la gouvernance du pays sera responsable (...). Et les autorités russes vont en tirer les conclusions nécessaires", poursuit le diplomate russe.

La Russie avait déjà indiqué dimanche ne pas envisager une évacuation de son ambassade à Kaboul, en assurant avoir reçu des "garanties" de la part des talibans quant à la sécurité de sa mission diplomatique. "Aussi étonnant que ce soit, la situation est calme actuellement" à Kaboul, a assuré Zamir Kaboulov.