Mitch McConnell, nouvel homme fort du Sénat américain

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Centriste devenu conservateur, champion autoproclamé du "changement" en place depuis 30 ans, qui est Mitch McConnell, le nouvel homme fort du Sénat américain ?

"Il est temps de changer de direction !". Voilà les premiers mots prononcés par Mitch McConnell après la première vague de résultat des élections américaines de mi-mandat. Son parti, celui des Républicains, s'est emparé de la majorité au Sénat et au Congrès. Un résultat qui consacre le sénateur du Kentucky, facile vainqueur de son adversaire démocrate Alison Grimes, comme très probable futur président du Sénat.

Le changement vu par un sénateur de 72 ans. Et pour cause, la coutume veut que le sénateur le plus âgé de la majorité remplisse cette fonction. Mitch McConnell, 72 ans, a donc des arguments à faire valoir. Mais sa longévité, il est en poste depuis 1984, nourrit les critiques de ces détracteurs, qui ne le voient pas vraiment comme un acteur du changement qu'il appelle de ses vœux.

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Comparé à Franklin la tortue par ses détracteurs. Mitch McConnell, 72 ans, a un physique plutôt souffreteux. Et pour cause, jeune homme, il a souffert de la polio et en a conservé des problèmes de vue. Réformé pour le service militaire, il est décrit ainsi par The Daily Beast : " des lèvres fines qui ne laissent pourtant pas apparaître des dents invisibles, un physique ingrat, une vraie tortue". Le sénateur du Kentucky a subi des attaques, parfois mesquines, à ce sujet.  Dwayne Stowall est l'un de ses plus fervents opposants. Ce sénateur texan, qui militait pour que Mitch McConnell ne devienne pas leader des Républicains au Sénat, l'avait lui aussi comparé à "une tortue" dans l'un de ses clips de campagne.

On y voit le sénateur républicain du Texas ânonner son message, assis à l'arrière de son pick-up : "Je suis Texan, et en tant que Texan, je n'ai pas besoin d'une tortue blanche pour savoir comment me battre". Puis, se tournant vers son chien, il lui demande : "Tu aimes la soupe de tortue, toi ?"

Ambition limitée.  Mitch McConnell n'est pas un perdreau de l'année. Mieux, il cultive cette figure du vétéran qui séduit tant les Etats-Unis. Son âge respectable devrait donc faire de lui le prochain président pro tempore ( pour un temps limité en latin) de la majorité au Sénat, lors de son élection en janvier. L'article du Daily Beast cite le biographe du nouvel homme fort du Sénat qui définit ainsi le parcours de McConnell : "Tout ce dont il a jamais rêvé, c'est d'accéder au Sénat, contrairement à tous les autres qui pensent pouvoir peut-être devenir un jour président."

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Surnommé "le Cynique". Le New York Times brosse de son côté un portrait qui correspond tout à fait au titre de la biographie qui lui a été consacrée -Le Cynique- en soulignant sa capacité d'adaptation. Centriste au début de sa carrière, il s'est peu à peu déporté vers la droite de l'échiquier politique, en prenant position contre les conventions collectives et le relèvement du salaire minimum. 

Le site Politico, lui, insiste sur sa gestion un peu particulière de son image publique : "Alors que la plupart des politiciens cherchent à tout prix l'affection de leurs électeurs McConnell cultive sa réputation de méchant". Pour mener sa carrière, Mitch McConnel bénéficie d'un soutien de poids. Celui de son épouse, Elaine Chao, ancienne secrétaire d'Etat au travail de George W. Bush entre 2001 et 2009.

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Favorable aux écoutes de la NSA. Il a aussi été critiqué pour son engagement en faveur du Protect Act America passé en 2007, qui autorise la NSA de surveiller les téléphones et les communications électroniques de terroristes présumés hors des Etats-Unis sans mandat. De la même façon, il a lutté bec et ongles contre un projet de limitation de 2002 des dépenses de campagne en terme de publicité. Bien lui en a pris, puisqu'une décision de la Cour Suprême de 2010 a autorisé des investissements illimités, ce qui lui a permis de dépenser 73 millions de dollars (58 millions d'euros) lors de la dernière campagne.  Un budget dont une partie provient des frères Koch, patrons d'une multinationale florissante qui affiche 115 milliards de dollars de revenus annuels.

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Le site The Nation a rendu public les enregistrements audio d'un discours de McConnell adressé à ses mécènes, qui en dit long sur ses intentions : "Maintenant que nous tenons la Chambre des représentants et le Sénat, nous tenons les cordons de la Bourse. Cela signifie que nous pouvons maîtriser les lois de finances. Et je peux vous assurer que nous nous battrons contre cette bureaucratie. Nous allons les titiller sur le système de santé, sur les services financiers. Nous ne les lâcherons pas". Un son de cloche confirmé par Phillip Ardoin, professeur de sciences politiques à l'Appalachian State University, sur le site de 20minutes : "La paralysie est probable. Mitch McConnell n'a pas grand chose à gagner en offrant des succès à Obama". 

Les deux prochaines années de mandat de Barack Obama s'annoncent donc compliquées.