Procès du «tueur de DRH» : la peine maximale requise contre Gabriel Fortin

L'accusation a requis mercredi devant la cour d'assises de la Drôme la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une période de sûreté de 22 ans, à l'encontre de Gabriel Fortin.
L'accusation a requis mercredi devant la cour d'assises de la Drôme la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une période de sûreté de 22 ans, à l'encontre de Gabriel Fortin. © LOIC VENANCE / AFP
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Devant la cour d'assises de la Drôme, l'accusation a requis mercredi la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une période de sûreté de 22 ans, à l'encontre de Gabriel Fortin, accusé de trois assassinats et d'une tentative d'assassinat au cours d'un périple meurtrier en janvier 2021.

L'accusation a requis mercredi devant la cour d'assises de la Drôme la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une période de sûreté de 22 ans, à l'encontre de Gabriel Fortin, accusé de trois assassinats et d'une tentative d'assassinat au cours d'un périple meurtrier en janvier 2021. "C'est un quasi quadruple assassin", a tonné au début de son réquisitoire l'avocat général Laurent de Caigny.

"Il est méthodique, il est organisé, il est adaptatif, il n'est pas fou", donc accessible à une sanction pénale, a-t-il assuré, réclamant la peine maximale pour l'ingénieur au chômage de 48 ans jugé depuis le 13 juin. "Il est le juge et le bourreau. Gabriel Fortin est insensible aux autres mais il n'aime pas qu'on lui donne tort, il est buté, orgueilleux, mais il n'est pas dans un délire paranoïaque". "On aimerait tellement qu'il soit fou, mais c'est son estime de lui qui l'a poussé à agir, à faire le choix de l'assassinat", a-t-il assuré, fustigeant une "médiocre toute-puissance" et le mutisme de l'accusé, forme de stratégie de "retranchement" et "d'obstination" selon lui.

"Un trouble de la personnalité de type paranoïaque"

L'avocate de l'accusé, Laetitia Galland, s'est elle attachée à dresser le "portrait humain" de Gabriel Fortin, qui a grandi dans une famille où seule la "valeur travail" était mise en avant. Selon elle, le "manque d'amour" dans sa vie personnelle a nourri son "isolement" puis son repli, déclenché à partir de 2010 par un sentiment d'injustice suite à une "mise au ban de la société" représentée par le chômage après des licenciements "brutaux". "Il a un trouble de la personnalité de type paranoïaque (...) Vous ne pouvez pas regarder l'accusé avec notre rationalité. Il faut se placer dans sa façon d'appréhender le monde", a-t-elle exhorté.

Auparavant, l'avocate générale Marie-Caroline Gervason avait évoqué "un procès marqué par l'indicible", faisant part de son "effroi et incompréhension" face à un double décalage. Un "décalage temporel immense entre un conflit professionnel et un passage à l'acte bref et extrêmement brutal", et un "décalage innommable entre la réalité d'un conflit à l'emploi et quatre crimes de sang".

L'enquête a établi que sa "culpabilité ne fait aucun doute", de même que la préméditation, a-t-elle ajouté. "Gabriel Fortin savait qu'il irait jusqu'au bout". Pendant les réquisitions et plaidoiries, l'accusé est demeuré tête baissée, prenant des notes.

"Tuer pour ne pas mourir"

Le 26 janvier 2021, Estelle Luce, responsable des ressources humaines d'une entreprise du Haut-Rhin, avait été abattue sur le parking de sa société. Quarante kilomètres plus loin, Bertrand Meichel avait été attaqué chez lui, une balle tirée en sa direction. Il s'était battu avec l'agresseur qui avait réussi à s'enfuir. Deux jours plus tard, Patricia Pasquion, cadre chez Pôle emploi à Valence, était tuée sur son lieu de travail, et moins de trente minutes plus tard, Géraldine Caclin, directrice des ressources humaines de Faun Environnement, avait subi le même sort. Gabriel Fortin avait été interpellé peu après au volant d'un véhicule repéré sur les deux lieux du crime.

A l'exception de Patricia Pasquion, qui travaillait dans l'agence de Pôle emploi où Fortin a été inscrit jusqu'en 2013, les cibles de l'accusé avaient été impliquées dans ses deux derniers licenciements en 2006 et 2009. De nombreuses preuves scientifiques ont relié l'accusé aux homicides: traces de résidus de tirs, projectiles et armes retrouvées, ainsi que de l'ADN retrouvé notamment après l'agression de Bertrand Meichel.

L'accusé est resté muet

Interrogé lundi à la fin des débats, l'accusé, peu coopératif au cours du procès, est resté muet, après avoir répété qu'il n'avait "rien à dire", dénonçant une "enquête à charge" sans vouloir s'expliquer. Plusieurs millions de fichiers retrouvés sur du matériel informatique à son domicile ont mis en évidence des recherches sur les victimes depuis plus d'une décennie, ainsi que des repérages et trajets en lien avec son parcours final, dès 2014.

Refusant l'idée d'un "tueur de DRH" - surnom donné par la presse - qui se bat contre le système, les avocats des parties civiles ont dénoncé une entreprise de vengeance froide et méthodique, minutieusement préparée par un homme "manipulateur" et dénué de compassion blessé dans son orgueil. "Tuer pour ne pas mourir", a écrit l'accusé dans une de ses notes. Les plaidoiries de la défense doivent se poursuivre dans l'après-midi, avant que la cour se retire pour délibérer.