Bonnemaison se défend : "on ne s'habitue jamais à l'agonie"

Le docteur Nicolas Bonnemaison.
Le docteur Nicolas Bonnemaison. © NICOLAS TUCAT / AFP
  • Copié
Noémie Schulz avec CB
Nicolas Bonnemaison, l'ex-urgentiste jugé en appel à Angers pour "empoisonnement" de patients en phase terminale, a retracé mardi l'enfer de l'extrême fin de vie.

Il a retracé mardi l'enfer de l'extrême fin de vie. L'ex-urgentiste, Nicolas Bonnemaison, acquitté à Pau en 2014 pour avoir abrégé la vie de patients en phase terminale, a défendu sa décision de sédation, "en aucun cas" pour tuer, mais pour "soulager". Il comparaît depuis lundi devant la Cour d'appel d'Angers pour sept cas "d'empoisonnement". Une nouvelle fois, c'est un débat autour de la fin de vie et des difficultés de l'encadrer juridiquement qui s'est ouvert, avec un Nicolas Bonnemaison qui a fait entrer les jurés cœur de son service.

"C’est affreux pour le patient et pour sa famille". Une plongée éprouvante dans le monde de la vie : l’agonie des dernières heures, quand le malade convulse, se cogne, ne maîtrise plus sa respiration, qu’il est pris de "gasps". "C’est comme un poisson que l’on sort de l’eau, c’est affreux pour le patient et pour sa famille", explique avec émotion Nicolas Bonnemaison. "On ne s’habitue jamais à ce type d’agonie. Surtout, les médecins ont beaucoup d’interrogations : le patient souffre-t-il ?", témoigne l'ex-urgentiste.

"Pour soulager, jamais pour provoquer la mort." Pour l’ancien médecin, la réponse est claire, il faut sédater ces malades, en partant du principe qu’il n’y a aucune certitude et qu’il faut donc imaginer le pire. C’est pour cela, qu’il a injecté, en 2010 et 2011, des produits sédatifs puissants à sept patients incurables, dont le traitement était arrêté et le pronostic vital engagé à court terme. Une mesure qu’il a pris "pour soulager, jamais pour provoquer la mort." Cette phrase, il l’a répétée cinq fois.

"Faut-il laisser agoniser au XXIe siècle ?" L’avocat général le questionne alors presque naïvement : "puisque l’on est proche de la fin, pourquoi sédater et ne pas attendre la fin naturelle ?". En face, Nicolas Bonnemaison, s’anime et s’emporte. "Mais on ne peut pas attendre les bras ballants que cela s’arrête. On ne peut pas laisser ces patients seuls sans rien faire. Oui, ces sédations vont diminuer l’espérance de vie, c’est vrai. Mais faut-il laisser agoniser au XXIe siècle ?", questionne-t-il.

La perpétuité encourue. Mardi matin, aux assises d’Angers, la délicate question de la fin de vie a donc une nouvelle fois été posée sans être résolue. Une plongée dans la fin de vie sur laquelle de nombreux témoins (plus de 60 cités), soignants, médecins ou anciens ministres, devraient s'exprimer dans les jours à venir. Le procès doit durer jusqu'au 24 octobre. Nicolas Bonnemaison risque la réclusion criminelle à perpétuité.