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En Angleterre à la fin du 17ème, seuls les riches peuvent demander le divorce en étant à peu près certains de l'obtenir, car il faut pour cela faire une requête au Parlement. La procédure est très longue et très couteuse. Comment, dès lors, se séparer d’une épouse importune? En la vendant! La femme n’est-elle pas la propriété de son mari? Ainsi que ses biens et ses enfants? C’est ainsi que va se développer tout au long des 18ème et 19ème siècle, l’incroyable pratique de la vente d'épouse ! Les prix peuvent aller de quelques shillings ou quelques guinées jusqu’à 25 livres, autrement dit le prix d’un cheval...

En Angleterre à la fin du XVIIe siècle, il est possible de vendre sa femme au lieu de divorcer. Mais pourquoi cette pratique étonnante ? Dans le pays, à cette époque, le divorce ne peut s’obtenir que par une requête au Parlement, une procédure très longue et très coûteuse. Seuls les riches peuvent demander le divorce en étant à peu près certains de l’obtenir.

Les plus modestes n’ont pas les moyens de divorcer et pour contourner la loi, une incroyable pratique commence à se développer : la vente d’épouses.

Une pratique qui attire les foules

La première dont on ait connaissance a lieu à Birmingham en 1733. Un journal local relate qu’un certain Samuel Whitehouse a vendu sa femme Mary sur le marché, à un certain Thomas Griffith contre la somme d’une livre sterling.

Comment une telle transaction se passe-t-elle ? La femme est publiquement exhibée par son mari et porte un collier au cou, à la taille ou au bras, parfois même une longe, comme une vache ou un cheval. Le mari demande au public d’approcher et fait l’éloge des qualités de sa femme pour faire monter les enchères.

En 1801, une vente aux enchères frénétique eut lieu entre des agriculteurs misérables, qui firent monter les enchères centime par centime. La pauvre femme fut finalement vendue pour quelques shillings à peine. C’est un spectacle très dégradant mais qui attire les foules. Les femmes sont victimes de remarques graveleuses et insultantes. La pratique atteint son apogée entre 1780 et 1850 et on peut retrouver la trace de 400 femmes vendues.

La femme était la propriété de son mari

Une telle pratique dégradante ne fut possible que parce que dans l’Angleterre victorienne, la femme était considérée comme la propriété de son mari, et un bien comme un autre. Elle ne possède rien en propre et en cas de mariage, tous ses biens deviennent la propriété de son mari. En cas de divorce ou de séparation du couple, la garde des enfants est automatiquement confiée au père, qui peut interdire tout contact entre la mère et ses enfants.

En droit anglais de l’époque, le statut juridique de la femme est appelé Coverture, c’est-à-dire que sa personnalité juridique se fond complètement avec celle de son mari. Toutefois, la femme n’est pas complètement esclave de son mari et possède des droits : elle ne peut être vendue sans son consentement. On peut citer une vente de 1824 où la femme n’était pas contente de son acheteur et a trouvé un nouveau preneur.

La vente de sa femme au marché est surtout une astuce pour mettre fin à un mariage dont on n’est pas satisfait. Si une femme trompe son mari et que ce dernier souhaite s’en débarrasser, il peut la revendre, de préférence à l’amant en question.

Si les arrangements ne sont pas simplement verbaux, mais financiers, c’est aussi pour donner un statut quasiment légal et officiel au concubinage. Au regard de l’Eglise, la femme reste toutefois toujours l’épouse de son premier mari.

La vente de maris fut également pratiquée mais de manière beaucoup plus restreinte : on ne retrouve la trace que de cinq ou six ventes sur la période.

La célèbre histoire d'Anne Wells, épouse vendue

On retrouve une histoire célèbre de vente d’épouse. Un jour, le jeune Henri Bridge, second duc de Chandos, assiste par hasard à une vente d’épouse. La jeune femme, Anne Wells, est servante dans une auberge. Son mari la bat, elle est contusionnée, a la bouche fendue. Il la fait monter sur une table, au bout d’une longe, pour ajouter à l’humiliation.

Le duc l’achète pour une demie-couronne, la prend sous sa protection et lui fait donner une éducation. Elle est aussi très belle, les deux finissent par devenir amants. A la mort du mari violent, le duc de Chandos épouse Anne Wells, faisant d’elle la nouvelle duchesse de Chandos.

Cette pratique, utilisée pendant près de deux-cent ans, a été abandonnée après avoir été qualifiée de répugnante et honteuse. Mais le dernier cas de vente d’épouse est celui d’une habitante de Leeds, vendue à un ami de son mari pour la modique somme d’une livre sterling. La vente eut lieu en 1913…