Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
Le village de Saillans, dans la Drôme, sauvera-t-il sa boucherie ? Une histoire rocambolesque risque d’obliger le boucher du village à plier bagage.
Une histoire édifiante racontée il y a quelques jours dans l’hebdomadaire local Le Crestois. Saillans, c’est un village de 1500 habitants qui comme beaucoup d’autres, se bat pour garder les commerces de son bourg, une supérette, une épicerie bio, une boulangerie et un boucherie, installée depuis plus d’un siècle au numéro 42 de la grand-rue. Un petit monde commercial qui a trouvé son équilibre, avec le marché...
Mais la boucherie va devoir fermer ses portes au 31 décembre, contre son gré, et on ne sait pas ce qu’elle va devenir.
Elle est pourtant florissante.
Oui, et le patron, M. Pascal, devait même la transmettre à sa fille en fin d’année. Mais en juillet dernier, il a été visité pour un contrôle sanitaire de routine. C’était un jour de livraison. Et les inspecteurs sanitaires se sont rendu compte que la viande qui arrivait traversait la boutique pour rejoindre la chambre froide et le laboratoire à l’arrière. Ca a toujours été comme ça. Mais c’est interdit par les normes actuelles, au nom d’un principe qui s’appelle le “ respect de la marche avant”. Les produits qui arrivent dans un commerce de bouche ne doivent jamais croiser les produits transformés, qui ressortent. Il faut une entrée séparée pour les livraisons. Les services de la préfecture reconnaissent que c’est un problème mineur, que le risque est acceptable. Mais le boucher doit se mettre en conformité quand même. Il veut bien. Mais vu la configuration de cette minuscule boutique ancestrale, coincée entre d’autres maisons, c’est impossible.
Il ne peut pas déménager ?
Il a essayé dans le coeur du village, mais il n’y a pas de local susceptible d’accueillir une boucherie. Alors, il est allé voir un peu plus loin, dans une zone commerciale récente, toujours à Saillans, et il a trouvé une ancienne fromagerie, qui ferait bien l’affaire. Il a même signé un compromis de vente. Mais là, nouveau coup de jarnac administratif. Il a découvert que le règlement d’urbanisme local interdit l’installation à cet endroit d’une boutique susceptible d’accueillir du public. Pourquoi ? C’est le pompon : pour éviter la fuite des commerce du centre ville. Centre ville où il ne peut pas rester. C'est Kafka au pays des brochettes.
Il va y avoir une solution pour la boucherie de Saillans ?
La mairie, le boucher, les services d’urbanisme de la communauté de commune doivent se réunir, pour tenter de trouver une issue. Pour voir dans quelle mesure la réglementation d’urbanisme peut être interprétée
Sans quoi Saillans perdra sa boucherie fin décembre, tombée au champ d’honneur du délire administratif français. Les épaisses tartines de normes, c’est bien gentil, mais c'est quand même moins sympa que les entrecôtes et les saucisses au barbecue.