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L'un des réacteurs EPR de la centrale nucléaire de Taishan, dans le sud de la Chine, a subi une "augmentation de la concentration de certains gaz rares" dans un circuit, a annoncé le groupe français EDF ce lundi. Toute la filière nucléaire française se demande s'il ne serait pas préférable d'arrêter le réacteur. Nicolas Barré fait le point sur une question d'actualité économique.

Faut-il arrêter le réacteur EPR de Taishan, en Chine ? Toute la filière nucléaire française se pose la question.

Et elle répond officieusement oui. Car c’est clair, s’il s’était produit en France, cet incident aurait, selon nos propres normes de sûreté, provoqué l’arrêt du réacteur de manière préventive. En Chine, les normes sont moins exigeantes et permettent donc la poursuite de l’exploitation. À ce stade en effet, la fuite de gaz rares dans le système primaire de refroidissement reste parfaitement confinée et ne peut pas conduire à des rejets dans l’environnement.

Mais toute la filière française scrute cet incident à la loupe et avec une certaine inquiétude.

Pour plusieurs raisons. D’abord parce que les éléments clés dans le nucléaire, on le sait, c’est la confiance dans les autorités de sûreté et la transparence de l’opérateur. Or c’est la Chine et nous ne savons pas si nous avons toutes les informations sur ce qui se passe vraiment. EDF est actionnaire à 30% de la société qui exploite Taishan, elle a été informée dès octobre dernier de "présomptions de défauts" sur les crayons de combustibles de la centrale, c’est très bien. Mais il est possible que l’on ne sache pas tout. Et puis l’autre raison d’inquiétude, c’est que l’EPR de Taishan est le premier à avoir été mis en service dans le monde.

C’est un peu notre vitrine.

Exactement or cette technologie EPR en est encore à ses débuts. Le premier réacteur de Taishan a été raccordé au réseau en 2018, un deuxième l’a été depuis, c’est donc récent, or nous n’avons pas d’autres retours d’expérience. L’EPR d’Olkiluoto en Finlande n’est toujours pas en service, pas plus que celui de Flamanville. Et nous avons vendu cette technologie aux Britanniques, nous sommes en train de construire des EPR à Hinckley Point, puis d’autres contrats vont venir. Bref, l’enjeu pour toute notre filière, pour EDF, pour sa filiale Framatome, pour Orano, l’ex-Areva, pour toute cette industrie est capital. Voilà pourquoi il est essentiel que les Chinois gèrent cet incident de manière exemplaire, en total transparence. On aimerait être pleinement rassuré. Ce matin, personne ne l’est tout à fait.