Hausse des faillites d'entreprises en janvier : "Il faut le dire avec force, les 'gilets jaunes' ont porté un coup à l’économie"

3:10
  • Copié

Chaque samedi et dimanche, Nicolas Beytout, directeur du journal "L'Opinion", donne son avis sur l'actualité de la semaine.

Bonjour Nicolas, vous n’avez pas aimé un chiffre qui a été dévoilé cette semaine : il concerne les faillites d’entreprises.

Oui, un chiffre qui est vraiment inquiétant : le nombre des défaillances d’entreprises a augmenté de 6,6% en janvier. C’est la société Euler Hermès, une société spécialisée dans l’assurance-crédit, qui publie cet indicateur. Et qui souligne que cela représente une forte progression des dépôts de bilan.

Est-ce que c’est très étonnant : je suppose que c’est lié au mouvement des "gilets jaunes" ?

Vous avez raison. Alors, il faut nuancer : en réalité, le ralentissement économique a commencé l’été dernier, en France comme un peu partout dans le monde. Il n’y avait aucune chance que notre pays échappe à cette tendance générale. Mais elle a créé un fond de fragilité. Et c’est sur cette base devenue moins solide que s’est greffé le mouvement des "gilets jaunes". Avec des conséquences en chaîne absolument redoutables. Parce que, voyez-vous, l’économie est un tout ; c’est un ensemble de rouages tous dépendants les uns des autres. Il suffit que l’un de ces rouages se grippe, ou qu’il tourne moins vite, pour que l’ensemble se dérègle. Et ce rouage, c’est la consommation des ménages. Celle qui a été empêchée, dans de nombreuses villes françaises depuis 15 semaines. Il faut le dire avec force, les "gilets jaunes" ont porté un coup à l’économie.
Mais vous disiez que le nombre des faillites accélère en janvier. Et pourtant, le mouvement des "gilets jaunes" ralentit, au contraire.

C’est vrai, mais ses effets se propagent. C’est comme un caillou lancé sur un lac tranquille : l’onde se propage loin, et elle met du temps à atteindre le rivage. Et bien c’est le même phénomène. Le chiffre d’affaires qui manque, 1, 2, 3 mois ; les ventes de Noël qui ont été décevantes, et puis on tire sur la trésorerie, on essaye de tenir et puis, à bout, on lâche. On arrête les frais, on dépose le bilan.
Et c’est à ce moment-là que surviennent les conséquences sur l’emploi.

Voilà, on ne les voit pas encore. L’onde de choc continue à se propager. On a déjà vu apparaître le chômage partiel : 70.000 personnes ont été touchées. On va maintenant voir l’arrivée sur le marché du travail des salariés de ces boîtes qui sont en train de faire faillite. Oh, ça fera moins de bruit qu’Ascometal ou l’usine Ford de Blanquefort. Mais les détresses seront les mêmes, et les chiffres seront sûrement aussi lourds. Simplement, il n’y aura pas l’effet masse. Et ces dégâts sociaux passeront plus inaperçu.

C’est un peu la loi du nombre.

Oui. Mais ce qui me fascine, c’est que les "gilets jaunes" (ceux de la première heure, pas les casseurs, pas ceux qui poursuivent d’autres buts politiques), non les "gilets jaunes" des ronds-points… je me demande s’ils réalisent que les premières victimes de ces faillites de petites entreprises, de ce chômage partiel, de ces destructions d’emplois, ce sont eux. Ce sont les mêmes, les Français qui ne roulent pas sur l’or, qui peinent à boucler les fins de mois, et qui tombent parce que la France vit au ralenti, tous les samedis depuis 4 mois. Je ne sais pas ce qu’ils attendent pour le dire à ceux qui, hier encore manifestaient et cassaient.