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Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce vendredi, il revient sur les propos très polémiques d'Emmanuel Macron ce jeudi à Saclay. Le président de la République a notamment dénoncé une "une nation de 66 millions de procureurs" ce qui a provoqué la colère de l'opposition et d'une partie de la population.

Ce jeudi, Emmanuel Macron qui a dénoncé "la traque incessante de l’erreur".

Ce qui n’a évidemment pas manqué de faire réagir ses adversaires politiques. Au fond, c’est un sujet de philo qu’Emmanuel Macron aurait sûrement adoré traiter à l’occasion d’une de ces interviews fleuve qu’il affectionne particulièrement : est-ce que c’est une erreur de revendiquer le droit à l’erreur ?

Et donc, erreur ou pas erreur ?

En fait, le chef de l’État a prononcé ces mots devant des scientifiques, des chercheurs, des étudiants en physique, des gens qui, parce qu’ils passent leur temps à défricher l’inconnu, côtoient en permanence l’erreur. C’est leur univers, l’erreur, ils doivent la surmonter, s’adapter, avancer. Pour trouver, il faut chercher, pour chercher, il faut assumer de se tromper. Donc, oui, Emmanuel Macron, de ce point de vue, a eu raison.

Sauf que sa déclaration est publique et qu’elle peut donc s’adresser à tout le monde.

C’est là que notre exercice de philo se corse. Dans l’entourage du Président de la République, on assure que c’était une façon de glorifier auprès de tous les Français la prise de risque, de rappeler l’ADN du Président sur l’audace, le goût pour l’innovation, la création. C’est sûrement vrai. Mais le message est un peu compliqué à faire entendre dans un contexte où, après les masques, le gel et les tests, c’est la stratégie des pouvoirs publics sur le vaccin qui est maintenant mise en accusation. Bien sûr, le virus est imprévisible, et les médecins qui se bousculent sur les plateaux de télé passent leur temps à faire des erreurs. Mais c’est forcément plus convaincant de plaider le droit à l’erreur lorsqu’on a enfin pu aligner un succès. Et puis, inutile dans ces cas-là d’accuser les autres.

Ces 66 millions de Français qui sont devenus, selon le chef de l’État "une nation de 66 millions de procureurs" ?

Ça ressemble aux tristement célèbres "Gaulois réfractaires". C’est le mot de trop, celui qui, en communication, écrase tout le reste du message en passant pour une tentative de se défausser de ses propres erreurs sur les Français en leur reprochant leur défiance. Pour un dirigeant politique, c’est toujours un exercice compliqué de reconnaître une erreur. Emmanuel Macron l’avait déjà fait publiquement, en soulignant que personne n’a la science infuse, ou en assumant que "des choses n’ont pas été faites parfaitement". C’était plus subtil, moins provoquant, et certainement plus efficace.