Le prince Philip, une vie dans l’ombre d’Elisabeth II (partie 1)

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SAISON 2020 - 2021, modifié à

Le prince Philip vient de nous quitter à deux mois de ses cent ans. Il avait été hospitalisé le 16 février dernier à la suite d'un problème cardiaque. Dans cet épisode spécial du podcast Europe 1 Studio "Au coeur de l'Histoire", Jean des Cars retrace la vie singulière de l'époux de la reine Elisabeth II.

La nouvelle a été annoncée sur le compte Twitter officiel de la famille royale : le prince Philip est mort "paisiblement ce (vendredi) matin au château de Windsor". Dans cet épisode spécial du podcast Europe 1 Studio "Au cœur de l'histoire", Jean des Cars revient sur le parcours de cet homme au tempérament bien trempé, qui a passé sa vie dans l'ombre de sa femme : la reine Elisabeth II.   

Nous sommes à Londres, le 20 novembre 1947. Il est 11h15, un carrosse quitte le palais de Buckingham. A l’intérieur, le roi George VI, dans un des uniformes qu’il a portés toute la guerre et sa fille aînée, la princesse héritière Elizabeth, dans une robe de satin ivoire. A cause du rationnement des tissus, ses cousines et ses amies ont offert leurs propres coupons pour que le couturier Norman Hartnell réalise cette merveille, un long voile brodé retenu par une tiare de diamants complète la tenue de la mariée. Arrivés à l’abbaye de Westminster, les femmes sont en robe longue et chapeautées, les hommes en habit ou uniforme, malgré les restrictions de l’immédiat après guerre. La mariée gagne sa place devant l’autel au bras de son père, profondément ému. Son futur époux, Philip, l’attend au pied de l’autel, superbe en lieutenant de la Royal Navy. La cérémonie est historique : c’est la première fois, depuis 1816, qu’est célébré le mariage d’une princesse héritière d’Angleterre dans l’abbaye. C’est aussi le premier mariage princier de l’après-guerre. Le futur marié a enterré sa vie de garçon la veille au soir à l’hôtel Dorchester en compagnie de ses amis officiers. Tout avait été organisé par son oncle Lord Mountbatten, Dickie pour la famille. La soirée a été très joyeuse, des photos en témoignent. Tard dans la nuit, Philip a regagné le palais de Kensington où il loge dans les appartements de sa grand-mère, la marquise de Milford-Haven. Ce titre avait été donné à l’aîné des Mountbatten par le roi George V. 

Philip est rentré très tard (ou  très tôt, c’est selon!) Il a peu dormi. Il s’est réveillé à 7 h. Il a revêtu son uniforme et porte, pour la première fois, son insigne de chevalier de l’Ordre de la Jarretière que lui a décerné le roi. Son épée est celle de son grand-père décédé, le prince Louis Mountbatten. Ce grand fumeur sort une cigarette de son étui puis il y renonce : il a promis à Elisabeth de ne pas fumer le jour de son mariage. À la place, il prend un gin-tonic avec son cousin germain et témoin Milford-Haven avant de gagner l’abbaye de Westminster à onze heures du matin. Il n’est pas du tout nerveux, il est de bonne humeur et détendu. Il va épouser la princesse héritière de la Couronne britannique et il en est très heureux. Mais qui est donc Philip Mountbatten ?

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Un prince à l’enfance tourmentée

Dès le commencement, sa vie n’a pas été facile. Il est né le 10 juin 1921 à Corfou, sur la table de cuisine de la villa familiale  “Mon Repos” où s'était réfugiée la famille royale grecque après un nouveau coup d'État à Athènes. Son père est le prince André de Grèce, frère du roi Constantin 1er. Ils appartiennent à la dynastie danoise. Leur père, George 1er de Grèce, avait succédé au premier souverain du pays, Othon 1er, un Bavarois qui avait échoué dans sa direction de ce nouvel État indépendant. Sa mère est la princesse Alice de Battenberg, une branche de la maison grand-ducale de Hesse-Darmstadt. C’est le roi d’Angleterre George V qui enverra un navire de guerre britannique pour sauver la famille royale grecque. Celle-ci ne dispose pas de grands moyens. Elle dirige l’un des pays les plus pauvres d’Europe et le trône grec en est aussi l’un des plus instables. 

Après avoir été évacuée de Corfou, la famille, très désargentée, de Philip trouve refuge à Paris, ou plus exactement à Saint-Cloud, dans une villa prêtée par un des frères du prince André, le prince Georges. Ce dernier est le plus riche de la famille. Il a, en effet, épousé Marie Bonaparte, héritière de la fortune du fondateur de la Société des Bains de Mer de Monaco. Sur ce terrain, de Saint-Cloud, il y a d’autres maisons, dont celle du prince Georges. Paris, à cette époque, est rempli de cousins royaux russes et grecs, chassés les uns comme les autres de leurs pays par des révolutions.

Le prince Philip évolue dans un univers cosmopolite : père grec, mère allemande. Par son père, il descend  de la dynastie danoise et des Romanov et par sa mère de la reine Victoria. A Saint-Cloud, il est élevé dans un univers extrêmement féminin : il y a sa mère, ses  quatre sœurs aînées, une dame d’honneur grecque, une gouvernante française, une nurse anglaise, un maître d’hôtel italien et un cuisinier français. C’est sans doute en révolte contre ce matriarcat omniprésent que Philip grandit, devenant un petit garçon plutôt agressif et rude. Ses photos d’enfant montrent un très beau garçonnet, fier et indépendant, mais aussi d’une extrême politesse grâce à sa gouvernante française. 

Ses parents sont un couple désuni. Le prince André est un homme délicieux, extraverti, avec un très grand sens de l’humour dont héritera Philip. Il adore son père, quand il est là mais cela arrive rarement. Sa mère, la princesse Alice, est totalement sourde depuis l’enfance mais elle peut lire sur les lèvres de ses interlocuteurs dans plusieurs langues, l’allemand, l’anglais, le grec et le français. Les rapports de Philip avec elle ne sont pas aussi affectueux qu’avec son père. Lorsqu’il a 10 ans, sa mère sombre dans une profonde dépression. Elle sera soignée à Vienne, à Berlin puis dans une clinique Suisse. Elle subira un véritable calvaire, traitée par électrochocs mais cela, bien sûr, son petit garçon l’ignore. Tout ce qu’il peut ressentir, c’est l’abandon, car en 1931, la vie du petit Philip bascule. Ses sœurs sont toutes mariées à des princes allemands. Sophie au prince Christopher de Hesse, Margarita au prince de Hohenlohe, Dolla au margrave de Baden et Cécile au prince George Donatus de Hesse. 

Son père, André, abandonne Saint-Cloud pour s’installer avec sa maîtresse dans le midi de la France. Philip est envoyé en pension en Angleterre à l’école très aristocratique de Cheam. Après Cheam, il retourne en Allemagne auprès de sa sœur Dolla et de son mari dans leur château de  Salem. Il passe deux trimestres dans l’école fondée par Kurt Hahn à l’intérieur même du château. Mais dès l’arrivée au pouvoir d’Hitler en 1933, Hahn est arrêté parce qu’il est juif et ne peut donc diriger une école. Grâce à l’intervention d’amis anglais haut placés, il est relâché et exfiltré vers l’Ecosse par avion. Il va y fonder le Collège de Gordonstoun, où Philip sera pensionnaire dès l’ouverture, en 1934. Il a tant aimé cette expérience pédagogique qu’il voudra par la suite la faire partager à ses fils. On sait que le prince Charles sera beaucoup moins enthousiaste que son père et détestera Gordonstoun. 

Bien que membre d’une prestigieuse et nombreuse famille, Philip se sent très seul au milieu de ses camarades. A la différence de ceux-ci, il ne sait jamais où il pourra passer ses prochaines vacances. Il aime beaucoup sa troisième sœur Cécile et son mari Georges de Hesse. Il va passer la plupart de ses vacances dans leur château de Wolfsgarten, à Darmstadt. Hélas, le couple meut dans un accident d’avion en 1937, en se rendant à un mariage de cousins à Londres. Désormais, Philip passera généralement ses vacances chez sa grand-mère maternelle, la marquise douairière de Milford-Haven, à Kensington Palace. Elle redoute un peu les extravagances de son petit-fils.  Ses cousins se souviennent qu’il s’élançait parfois comme un fou pour grimper les escaliers, se retournait ensuite vers eux et tirait la langue à sa grand-mère. Il lui arrivait aussi de passer ses vacances chez le frère aîné de sa mère, George, marquis de Milford-Haven. Mais celui-ci meurt d’un cancer en 1938. Désormais, pour prendre en charge Philip en Angleterre, il n’y a plus que sa grand-mère et le deuxième frère de sa mère, Lord Louis Mountbatten. Celui-ci se réjouit que son neveu se décide à passer les examens pour être admis au Royal Naval College de Dartmouth. Il n’est peut-être pas étranger à ce choix. Encore un marin dans la famille ! En effet,  le père de Dickie et grand-père de Philip  était Lord de l'Amirauté en 1914. Mais il avait dû abandonner sa charge très rapidement car il s’appelait encore Battenberg, un nom à consonance trop allemande. Il avait fallu attendre 1917 pour que le roi George V change le nom de la dynastie Saxe-Cobourg-Gotha en Windsor et que les Battenberg installés en Grande-Bretagne deviennent Mountbatten, traduction exacte de leur patronyme germanique.

Philip rencontre la princesse Elisabeth

Philip est cadet au Collège Naval de Dartmouth lorsqu’il apprend que la famille royale va venir au grand complet visiter son école le 22 juillet 1939. Il est vraisemblable que c’est Dickie Mountbatten qui a organisé cette visite. Ce jour-là, il accompagne le roi George VI, la reine et les princesses Elisabeth, 13 ans, et Margaret, 9 ans. Si Mountbatten avait dans l’idée que la rencontre de son neveu Philip et de la très jeune héritière de la Couronne pouvait être le prélude à un futur mariage, on pourrait dire qu’il avait du flair ! La visite va durer deux jours. Philip sera presque tout le temps avec la famille royale : déjeuner, tennis, thé, dîner. La princesse Elisabeth est manifestement très impressionnée par ce garçon blond, sportif, charmant et elle ne le quitte pas des yeux. A la fin de la visite, lorsque le navire royal quitte Dartmouth, plusieurs petits bateaux l’escortent dans son sillage. Le dernier à le suivre est celui de Philip. George VI le remarque et dit : “Juste Ciel! Quelle folie” ! Au même moment, Elisabeth, surnommée Lilibeth, vissée à ses jumelles, ne peut détacher son regard de cette embarcation et du marin qui la pilote. Elle est tombée amoureuse. Définitivement. Pour elle, ce sera Philip et personne d’autre… 

Pour lui en revanche, c’est autre chose. Pour la première fois, il a eu l’occasion d’être en contact avec la famille royale dont il faut rappeler qu’il est un cousin. Pour ce jeune homme littéralement abandonné par ses deux parents, c’est une sorte de reconnaissance et de légitimité qu’on lui a donné. Sans doute n’a-t-il encore eu aucun coup de cœur pour sa cousine. En revanche, l’admiration de Lilibeth pour Philip n’a pas échappé à Lord Mountbatten. Il se chargera de le rappeler à son neveu. Mais les mois qui vont suivre ne s’y prêteront guère : la Deuxième Guerre mondiale est sur le point d’éclater…

La guerre de Philip

Philip est mobilisé en 1940. Il aura plusieurs affectations, la première dans l’Océan Indien. A partir de Ceylan, son navire escorte la flotte transportant les contingents australiens qui gagnent la Méditerranée. En janvier 1941, il est affecté à Alexandrie et participe à une bataille navale victorieuse au sud du Péloponnèse contre la Marine italienne. En mai, son bateau, le HMS Valiant, échappe par miracle à une attaque allemande. Plus jeune lieutenant de la Royal Navy, il est ensuite affecté sur le destroyer HMS Wallace chargé de protéger les côtes britanniques, de l’estuaire de la Tamise jusqu’à l’Ecosse. 

Il lui arrive tout de même d’avoir des permissions. Et en septembre 1942, il est à Windsor où les deux filles du roi George VI sont consignées depuis le début de la guerre. Lilibeth a désormais 15 ans et ils ont eu de longues conversations. Pour Noël 1943 et le Nouvel An 1944, Philip est revenu à Windsor où, semble-t-il, on s’est beaucoup amusé et on a beaucoup dansé. En 1944, l’année où Elisabeth va fêter son dix-huitième anniversaire, Dickie Mountbatten et son cousin le roi Georges de Grèce proposent à George VI d’envisager un mariage entre Philip et Elizabeth. Le souverain britannique refuse, jugeant sa fille beaucoup trop jeune, et puis la guerre n’est pas finie ! Mais il en parle à sa mère, la reine Mary, veuve de George V, qui dit : “J’aime Philip. Il est intelligent. Il a un vrai sens de l’humour. Il a un bon jugement”.

Le 8 mai 1945 il est bien loin d’Elisabeth lors de la célébration de la victoire, alors que la famille royale apparaît au balcon de Buckingham Palace, en compagnie de Winston Churchill, ce qui est sans précédent, Philip est à bord du destroyer HMS Whelp en Extrême-Orient. Le 2 septembre, il escorte le porte-avions américain USS Missouri dans la baie de Tokyo pour la signature de la capitulation du Japon.

Le mariage d’Elisabeth et Philip

Philip a 25 ans lorsqu’il regagne enfin le Royaume-Uni le 20 mars 1946. Il est devenu un officier expérimenté. Il a fait une très belle guerre, et il est séduisant. Lors de ses escales en Australie et dans le Pacifique, il a collectionné les succès féminins. Rien de sérieux... Néanmoins, ces aventures lointaines en compagnie de son ami Mike Parker, avec lequel il a fait toute la guerre et qui deviendra son secrétaire privé, n’ont pas échappé à l’entourage du roi George VI. L’un d’eux dira: “Philip, tout comme son oncle Mountbatten, est un être froid, ils sont deux  Battenberg allemands. C’est un mâle dominant, pas un romantique”. Et les conseillers vont en profiter pour mettre en doute ses capacités à être fidèle à sa future épouse… 

Il est certain que le jeune homme n’aime pas se confier. Il a toujours botté en touche lorsque des journalistes ou des biographes l’ont questionné sur les débuts de sa romance avec Elizabeth. Il reste une énigme. Il est intelligent, pratique et compétent. Mais quand il est contrarié, il peut littéralement exploser. Il a un caractère impatient. Il peut se montrer rude, même cruel, mais il peut aussi être chaleureux et charmant quand il rencontre des gens en difficulté. Il peut être très courtois mais aussi arrogant, voire désagréable, particulièrement avec les hommes politiques. On peut dire que c’est la conséquence de son enfance. Abandonné par ses parents qui vivaient chacun de leur côté, c’est peut-être pire que d’être orphelin. On sait qu’il avait beaucoup aimé son père. Celui-ci est mort le 3 décembre 1944 à Monte-Carlo. La  France et la Principauté étaient occupées. Philip était loin, en mer. Il n’a pu assister à ses funérailles. Dès sa démobilisation, il se rend à Monaco avec son ami Mike Parker. La maîtresse de son père lui remet son maigre héritage : des malles remplies de vieux vêtements, une paire de brosse à cheveux, mais surtout une chevalière qui ne quittera plus jamais son auriculaire gauche. Quant à sa mère, elle est retournée à Athènes après qu’un plébiscite ait restauré la monarchie. Elle a fondé un ordre religieux. Pendant la guerre, elle avait courageusement aidé des juifs à échapper à la Gestapo.

Lorsqu’on évoque la possibilité d’un mariage entre la princesse héritière et le prince Philip de Grèce et que cette union devient vraisemblable, c’est peu de dire que la garde rapprochée très aristocratique et conservatrice du roi George VI a du mal à l’accepter. Philip a un profil trop atypique, il n’a pas fait les bonnes écoles, il n’est pas assez policé et apte à garder, en toute circonstance, son “self control”. Le roi n’en tiendra heureusement pas compte. Mais Philip le saura et gardera toujours une grande méfiance à l’égard des gens de la Cour. A l’été 1946, il est invité à Balmoral. On ne saura rien de sa demande en mariage ni de l’acceptation d’Elisabeth. C’est et ça restera leur secret. 

Le roi George VI et son épouse sont rassurés par la personnalité de Philip. Ils demandent un dernier sacrifice à leur fille aînée :  de patienter encore un an afin de partir avec eux pour un voyage officiel en Afrique du Sud. Ce périple est politiquement important mais aussi nécessaire pour le roi. En effet, George VI est en très mauvaise santé, épuisé par la gestion de la guerre. Il lui faut du repos et du soleil. Le long voyage en bateau le lui permettra. Le quatuor familial, si soudé qu’il se surnomme "Us four" (“Nous quatre”) quitte le côtes anglaises le 1er février 1947. Ils rentreront fin avril, juste après l’anniversaire d’Elisabeth. Le jour de ses 21 ans, le 21 avril, elle prononce un discours fondateur au Cap et sur les antennes de la BBC : elle s’engage à consacrer sa vie, qu’elle soit longue ou courte, à servir le Commonwealth,

Pendant ce temps, Philip change d’identité. Il faut lui trouver un nom de famille prononçable, celui de la Maison royale de Danemark étant Schleswig-Holstein-Sonderburg-Glücksburg est impossible pour les Britanniques. On choisit donc le patronyme de sa mère, Mountbatten. Le 18 mars, le prince Philip devient simplement le lieutenant Philip Mountbatten. Les fiançailles sont  annoncées le 10 juillet 1947 et le mariage a lieu le 20 novembre suivant, comme je vous l’ai raconté au début de ce récit. Sur la liste des invités, il y a quelques exclusions remarquées, celles des trois sœurs de Philip en raison d’engagements trop visibles de leurs époux du côté du IIIe Reich, ainsi que l’ex-roi Edouard VIII, oncle d’Elisabeth, et son épouse la duchesse de Windsor. Mais le reste du Gotha européen est présent. La fête, très réussie, est la première de cette ampleur depuis la guerre. Les jeunes mariés partent en voyage de noces. Ils vont d’abord à Broadlands, la propriété de Dickie Mountbatten et de son épouse, puis en Ecosse, à Birkhall, dans le parc de Balmoral.

Le duc et la duchesse d’Edimbourg

Désormais, Philip, à qui son beau-père a donné de nombreux titres n’en portera plus qu’un : il sera le duc d’Edimbourg. Le couple semble très heureux. Elle et lui se complètent admirablement, lui avec sa fantaisie et ses foucades, elle avec sa douceur, sa réserve, sa persévérance. Il lui apporte sa forte personnalité, elle l’équilibre. Ils vivent d’abord à Buckingham Palace où naît leur premier enfant, l’héritier, le prince Charles, le 14 novembre 1948. L’année suivante, ils s'installent à Clarence House. Pour Philip, c’est un grand moment. C’est sa première vraie maison, celle où il peut enfin se sentir chez lui depuis le triste départ de Saint-Cloud, lorsqu’il avait dix ans. Le couple s'est occupé de chaque détail de sa résidence, du décor, des tableaux, des meubles. Philip est très sensible aux nouveaux gadgets. Il installe des machines ultra modernes dans la cuisine et la lingerie. Sportif, il se maintient en forme en pratiquant le squash et la natation dans la piscine de Buckingham Palace. 

En octobre 1949, le duc d’Edimbourg qui jusque-là travaillait à l’Amirauté, reçoit une nouvelle affectation à bord du navire Chequers, un destroyer de la Flotte basée à Malte. Elle est commandée par son oncle Dickie. Celui-ci, après une très brillante guerre dans le sud-est asiatique, qui lui a valu le titre de Viscount of Burma (la  Birmanie), a été le dernier vice-roi des Indes chargé de négocier l’indépendance du sous-continent. Sa mission accomplie, il a repris du service dans la Royal Navy. Philip est aux anges, il retrouve son vrai métier. Elizabeth l’est aussi car elle sait combien son époux a besoin d’être occupé par ce qui le passionne. Elle viendra le rejoindre à Malte après avoir confié Charles à ses parents. Elisabeth dira que c’est à Malte qu’elle a vécu, avec Philip, les plus heureux moments de sa vie. Une sorte de parenthèse enchantée où le couple trouve un équilibre parfait, avant que le poids de la Couronne ne vienne tout bousculer… 

 

Ressources bibliographiques :

Sarah Bradford,  Elizabeth - en anglais (Penguin Boosks, 1996, nouvelle édition mise à jour en 2002)

Jean des Cars, La saga des Windsor, de l’Empire britannique au Commonwealth (Perrin, 2011)

Jean des Cars, Elizabeth II, la Reine (Perrin, 2018)

 

"Au cœur de l’Histoire" est un podcast Europe 1 Studio

Auteur et présentation : Jean des Cars
Production : Timothée Magot
Réalisation : Jean-François Bussière 
Diffusion et édition : Clémence Olivier et Salomé Journo 
Graphisme : Karelle Villais

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