Usine Bosch de Rodez : la crise couve, le gouvernement veille

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Bosch est confronté au désamour des automobilistes pour le diesel (photo d'illustration). © THOMAS KIENZLE / AFP
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Confrontée à la baisse d’attractivité du diesel, l’usine Bosch de Rodez est contrainte de se moderniser, menaçant la survie de 300 à 800 postes. Un dossier que le gouvernement suit de très près.

Après GM&S dans la Creuse et Whirlpool à Amiens, Bosch à Rodez ? L’équipementier allemand doit moderniser son usine de l’Aveyron, où  1.600 personnes fabriquent des pièces pour les moteurs diesel, avec plusieurs centaines de postes menacés à la clé. Les syndicats tirent le signal d’alarme et en appellent au gouvernement. Vendredi, Bruno Le Maire a assuré sur Europe 1 s’être saisi du dossier et réclame au PDG des investissements supplémentaires.

Le diesel n’a plus la cote. Comme dans le cas de GM&S, l’usine Bosch d'Onet-le-Château, près de Rodez, produit des pièces pour l’industrie automobile, pour les moteurs diesel précisément. Sauf que le diesel n’a plus la cote. Nombre de gouvernements, en France comme ailleurs, abandonnent ce carburant trop polluant et mauvais pour la santé. Les mesures incitatives pour changer sa voiture diesel contre une essence ou hybride se sont multipliées ces dernières années dans l’Hexagone. Avec des résultats concrets : en six ans, la part des diesels dans les véhicules immatriculés en France est passée de 74% à moins de 50%.

300 à 800 emplois menacés. Pour survivre, l’usine d’Onet-le-Château doit moderniser ses deux lignes de production afin de fabriquer des injecteurs diesel nouvelle génération, la technologie actuelle devant disparaître à l'horizon 2020/2021. Selon les syndicats, 300 à 800 emplois seraient menacés par cette réorganisation. Mais ils craignent aussi une fermeture pure et simple du site. L'intersyndicale (SUD, CGT, CFE/CGC, CFDT) de l'usine Bosch de Rodez, reçue mardi à Bercy, a ainsi mis l'État en garde face à un potentiel "désastre économique".

Un territoire dépendant de l’usine. "Le projet actuel de la direction - qui n'est pas acté - serait de modifier une ligne sur deux", avec pour conséquence un sureffectif de "350 à 450" salariés, a expliqué Julien Rul (SUD). Sans aucun investissement, "700 à 800" personnes se retrouveraient "sur la paille", selon lui, et "la pérennité du site (serait) en jeu". Ce scénario noir "condamnerait" en effet l'usine en raison des coûts fixes trop élevés, a abondé Pascal Raffanel (CFE-CGC), évoquant un "désastre économique" car le site représente "8.500 à 10.000 emplois indirects sur un bassin de vie de 80.000 habitants". L'équivalent de "la fermeture d'Airbus pour la région toulousaine ou la disparition de Peugeot sur la région de Sochaux".

La fermeture de l’usine Bosch, premier employeur privé du département avec 1.600 employés, serait en effet un énorme coup dur pour le territoire. "C'est sûr que si l'usine supprimait des emplois, on le verrait, ça impacterait tous les commerces. Les ouvriers viennent acheter des viennoiseries, des entrées ou des sandwichs à longueur de journée. Ceux qui ont travaillé la nuit viennent aussi beaucoup le matin", raconte une commerçante de Rodez, à La Dépêche.

Le gouvernement déjà à la manœuvre. Soucieux d’éviter une nouvelle crise sociale alors qu’il est parvenu à régler plus ou moins sans soubresauts celles de GM&S et Whirlpool l’année dernière, le gouvernement s’est pleinement saisi du dossier. Et pour cause : Emmanuel Macron connaît bien l’usine Bosch pour l’avoir visitée en août 2016, alors qu’il était encore ministre de l’Économie de François Hollande… qui avait lui-même prononcé un discours sur le site de Rodez en 2013.

Bruno Le Maire a indiqué qu’il verra le président de Bosch lundi à Versailles, à l’occasion du Sommet sur l’attractivité organisé par Emmanuel Macron. "Je vais lui faire deux demandes. La première, c'est qu'il fasse un nouvel investissement sur l'une des deux lignes de production", a indiqué le ministre de l’Économie, vendredi sur Europe 1, ajoutant que cela n'était "pour l'instant pas prévu". La deuxième, "c'est la diversification de l'activité de Bosch à Rodez. Aujourd'hui, ils font des injecteurs de voitures diesel. Je pense que ça ne suffira pas à garantir la charge de travail dans l'usine", a poursuivi le ministre.

Les constructeurs mis à contribution ? La direction de Bosch se déplacera le 26 janvier à Onet-le-Château pour y faire "des annonces", selon les syndicats. "Si les investissements ne sont pas décidés là, ce sera trop tard", a affirmé Yannick Anglares (CGT). A l'inverse, une modernisation de l'appareil de production offrirait "un délai de 4 à 5 ans pour envisager une mutation industrielle du site". Par ailleurs, les salariés attendent un geste des constructeurs automobiles français, comme dans le dossier GM&S.

Interrogé sur les attentes des syndicats, Bruno Le Maire a dit "comprendre leurs inquiétudes", liées à la restructuration en cours de la "filière diesel", qui emploie directement 12.000 personnes en France. "Il faut accompagner le mieux possible" l'ensemble de la filière, a estimé le ministre, disant être "déjà en discussion avec Renault et Peugeot" sur ce sujet. "Ils sont extraordinairement positifs et constructifs, ils ont parfaitement conscience qu'il faut accompagner cette filière et qu'ils sont aussi responsables de leurs sous-traitants." Des mots que le gouvernement devra transformer en acte sous peine de voir le dossier Bosch lui échapper.