Suppression de CDI : Just Eat France contraint de rétrograder sur le salariat des livreurs

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À l'issue de la réorganisation qui pourrait être effective "dans le courant du 2e semestre" 2022, l'entreprise pourrait conserver 530 livreurs en CDI en France. (Illustration) © BEN STANSALL / AFP
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avec AFP , modifié à
"Ce n'est pas de gaieté de cœur", a déclaré Meleyne Rabot, directrice générale de Just Eat France dans la foulée d'un CSE pour informer les représentants du personnel, alors que la société emploie entre 800 et 900 livreurs en CDI pour l'heure. En France, Just Eat dessert actuellement 2.500 communes et son modèle repose sur le salariat dans 27 villes.

Un an après avoir annoncé le recrutement en France de 4.500 livreurs en CDI, le groupe anglo-néerlandais de livraison de repas Just Eat Takeaway, envisage désormais un plan de sauvegarde de l'emploi pour se séparer de 269 d'entre eux en raison d'un "contexte économique incertain". "Ce n'est pas de gaieté de cœur", a déclaré à l'AFP Meleyne Rabot, directrice générale de Just Eat France dans la foulée d'un CSE pour informer les représentants du personnel, alors que la société emploie entre 800 et 900 livreurs en CDI pour l'heure. En France, Just Eat dessert actuellement 2.500 communes et son modèle repose sur le salariat dans 27 villes.

À terme, la plateforme conserverait des livreurs en CDI seulement à Paris et sa banlieue, Lyon, Marseille, Toulouse, Strasbourg, Lille et Roubaix, "qui représentent 75% des commandes et deux tiers des effectifs", a précisé Meleyne Rabot. En revanche, dans 20 villes, dont Bordeaux ou Nantes notamment, l'entreprise "projette de basculer d'un modèle employé vers un mode de livraison alternatif" restant à définir. Just Eat souhaite également supprimer 23 à 30 postes dans les fonctions support, pour en conserver 41.

Objectif : conserver 530 livreurs en CDI

Selon la dirigeante, à l'issue de la réorganisation qui pourrait être effective "dans le courant du 2e semestre" 2022, l'entreprise garderait uniquement 530 livreurs en CDI en France, où sa situation économique est "plus complexe" qu'ailleurs. "Ces deux dernières années, suite à la fusion (entre Just Eat et Takeaway, ndlr), il y a eu des dépenses importantes. On a pour but de revenir à court terme à la rentabilité, je ne dis pas qu'on va abandonner le modèle du salariat", a ajouté Meleyne Rabot, qui précise que le marché de la livraison de repas est "volatile et compétitif".

Il est notamment dominé en France par Uber Eats et Deliveroo qui, à l'inverse de Just Eat, n'ont pas fait le choix du salariat pour leurs flottes de livreurs.

Concurrence déloyale

Alors que les premières élections des représentants du personnel ont eu lieu mi-mars, FO et CGT, sortis vainqueurs dans cet ordre, ne décolèrent pas après cette annonce. "Nous nous opposons complètement à cette mesure et nous allons entamer des actions", a réagi Jérémy Graça (FO). "La direction dit que c'est lié à une concurrence déloyale d'Uber Eats et Deliveroo. Cela ne nous semble pas justifié. Just Eat est mal géré et c'est sa politique générale qui a provoqué des pertes."

"Notre nouvel employeur s'est présenté comme éthique et plus respectueux des travailleurs et de leurs droits", dénonce dans un communiqué la CGT, alors que Just Eat avait triomphalement annoncé en janvier 2021 qu'il se démarquait de la concurrence en faisant le choix d'embaucher 4.500 livreurs en CDI.

"L'exploitation 'éthique' démontre ses limites"

"On les a bien recrutés", a assuré Meleyne Rabot avant de rappeler qu'il s'agissait majoritairement de contrats courts (10 à 15 heures par semaine) et que cette activité subissait un turn-over énorme. "L'exploitation 'éthique' démontre ses limites", estime pourtant la CGT. "L'argument commercial ne tient pas face à la volonté de l'entreprise de favoriser ses profits au détriment des conditions de travail et d'emploi des salariés".

Les "scénarios devront être discutés et précisés avec notre CSE qui aura un rôle important tout le long de cette procédure et au-delà", rassure Just Eat, qui entend mettre en place des mesures d'accompagnement des salariés, promouvoir le reclassement interne et externe. Just Eat Takeaway opère depuis plus de 250 villes dans 15 pays du monde et compte plus de 40.000 salariés.