Épargne : la "flat tax", un impôt qui change (presque) tout

Gérald Darmanin 1280
La "flat tax" va impacter une vaste partie des ménages français, souvent positivement. © LUDOVIC MARIN / AFP
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Le budget 2018 prévoit l’instauration d’une "flat tax" à 30% sur les revenus du capital. Une taxation unique qui bénéficiera à tous les épargnants, surtout les plus aisés.

Si on parle beaucoup de la réforme de l’ISF, le budget 2018 contient une autre mesure fiscale qui va concerner beaucoup de Français, à savoir l’instauration d’une "flat tax", une taxation unique sur les revenus du capital. Le Prélèvement forfaitaire unique (PFU), c’est son nom, sera appliqué à certains produits d’épargne dès l’année prochaine. Comment ça marche ? Qui est concerné ? Qu’est-ce que ça va changer ? Qui en profitera ? Europe1.fr vous explique les enjeux de cette "flat tax".

C’est quoi cette "flat tax" ?

Le principe d’une "flat tax" est simple : il s’agit d’imposer tout le monde au même taux. Dans le cas présent, le PFU à 30% sera appliqué aux revenus du capital mobilier : intérêts, dividendes, plus-values… Actuellement, ces revenus sont soumis à deux taxations : les prélèvements sociaux, à hauteur de 15,5%, et le barème progressif de l’impôt sur le revenu, entre 0% et 45%. La fourchette de taxation va donc de 15,5% à 60,5%. Plus vos revenus sont importants, plus votre capital mobilier est taxé.

La "flat tax", c’est le principe, met tout à plat en recomposant la taxation du capital. La réforme instaure un taux unique de 30%, décomposé en deux parties : 17,2% de prélèvements sociaux (les 15,5% d’origine, plus la hausse de 1,7 point de la CSG) et 12,8% d’impôt sur le revenu. Sont concernés par cette "flat tax" : les intérêts, les dividendes et les plus-values mobilières (reventes d’entreprise ou d’actions). Les plus-values sur les ventes immobilières ne sont pas affectées, comme l’ensemble des revenus fonciers.

Quels produits d’épargne sont concernés ?

La "flat tax" touche d’abord les livrets bancaires fiscalisés, ces produits d’épargne sans plafond qui viennent en complément des livrets réglementés qui sont, eux, défiscalisés. Ces derniers – Livret A, livret jeune, livret d’épargne populaire, etc. – ne seront pas concernés par la "flat tax" et resteront exonérés d’impôt. En revanche, les Plans épargne logement ouverts en 2018 seront bien soumis au PFU de 30%, alors que le PEL bénéficiait jusqu’ici d’une exonération d’impôt pendant 12 ans. Tout PEL ouvert avant le 31 décembre conservera cette exonération temporaire. Pas de changement pour l’épargne salariale, qui reste soumise uniquement aux prélèvements sociaux (17,2% à partir de janvier).

Reste le cas de l’assurance vie. Le placement préféré des Français est partiellement concerné par la réforme. L’assurance vie conservera ses avantages fiscaux jusqu’au seuil de 150.000 euros d’encours par contrat (300.000 pour un couple). Quand les gains dépassent ce niveau, le PFU à 30% s’applique, quel que soit le type de contrat. Le nouvel impôt s’appliquera aux gains issus de versements faits à partir du 27 septembre 2017. Ainsi, pour un contrat ouvert depuis huit ans (60% des contrats), si l’encours est inférieur à 150.000 euros, le taux d’imposition est de 24,7%, et de 30% si l’encours est supérieur à 150.000 euros. Par contre, l’abattement annuel sur les intérêts de 4.600 euros est maintenu.

Qui va en profiter ?

Globalement, tous les contribuables qui ont un taux marginal d’imposition supérieur à 12,8% (de fait, ceux qui sont soumis au minimum à la deuxième tranche de l’impôt sur le revenu, à 14%), sont avantagés par la réforme. En réalité, ce sont les plus aisés qui bénéficieront le plus de cette "flat tax". Alors que leurs revenus du capital pouvaient être imposés à 60,5%, la nouvelle taxe ne dépassera pas 30%. Pour cette catégorie de la population, l’instauration du PFU aura des effets plus conséquents que la réforme de l’ISF. Le Figaro donne l’exemple d’un couple avec deux enfants qui déclarerait 320.000 euros de salaires et 30.000 euros d’intérêts annuels : alors qu’ils sont actuellement imposés à hauteur de 114.000 euros, avec le PFU, ils devront s’acquitter de 105.000 euros l’an prochain.

Toutefois, pour éviter que cette taxe unique ne pénalise certains ménages, le gouvernement ne rend pas la nouvelle formule obligatoire. Si la "flat tax" vous fait perdre de l’argent, il sera possible de demander d’être imposé selon la formule actuellement en vigueur. Cette possibilité évitera que les Français qui ne sont pas imposables sur le revenu (environ un contribuable sur deux) ne soient lésés : au lieu d’être taxés à 30%, ils pourront continuer de bénéficier d’un taux de 17,2%. Si le choix demeure, alors pourquoi changer ? Simplement car la taxation unique simplifie le processus de l'imposition pour l'administration fiscale.

Au final, outre les épargnants qui ont placé plus de 150.000 euros sur leur assurance vie, la "flat tax" ne pénalisera qu’une poignée de cas bien précis, notamment, comme l’explique Le Figaro, "les dirigeants qui partent à la retraite et vendent leur société après l’avoir détenue durant au moins dix ans", la faute à la suppression d’un abattement de 85% sur la plus-value de cession.

Une taxe unique coûteuse

Cette réforme, destinée à simplifier la fiscalité du capital en France, mais aussi à la rapprocher du niveau en vigueur dans les autres pays européens, coûtera 1,3 milliard d'euros aux finances publiques en 2018 et 1,9 milliard en 2019, selon le gouvernement. Un chiffre sous-évalué, selon l'OFCE, qui évoque un impact de 4 milliards d'euros.