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Margaux Baralon
Pascal Lamy, ex-directeur général de l'Organisation mondiale du commerce, a relativisé la crise économique engendrée par l'épidémie de coronavirus, samedi, sur Europe 1. Pour lui, il ne faut bien sûr pas la sous-estimer, mais elle n'est pas la priorité du moment. "L'urgence, c'est de sauver des vies."
INTERVIEW

Plutôt sauver l'économie, ou sauver les gens ? Ces derniers jours, de nombreuses déclarations publiques sur l'épidémie de coronavirus ont pu paraître maladroite, à se préoccuper plus de la première que des seconds. L'ancien directeur général de l'Organisation mondiale du commerce, Pascal Lamy, n'a lui entretenu aucune ambiguïté sur Europe 1, samedi soir. "On est en face d’une crise humanitaire, sociale, avant d’être en face d’une crise économique. L’urgence, c’est de sauver des vies, d’éviter des souffrances et notamment pour les gens les plus âgés et les plus faibles", a-t-il déclaré. "Dans ces conditions, les considérations purement économiques, cela passe au second plan."

 

Pascal Lamy ne sous-estime pas l'impact de la crise sanitaire sur l'économie mondiale. La croissance pourrait être amputée sévèrement, entre -0,5 et -1,5%. "Même si, pour l'instant, ce qu'on constate, c'est que la Chine repart", ce repli reste très important. Mais "on est dans un contexte qui ressemble davantage à une guerre qu'à une crise économique", insiste l'ancien directeur général de l'OMC. 

"La facture sera pour plus tard"

Selon lui, "le problème des pouvoirs publics, c'est de naviguer entre éviter la saturation des systèmes de santé, car cela pourrait créer la panique, et ne pas bloquer complètement l'économie". Or, il faut absolument privilégier la première option, affirme Pascal Lamy, qui salue l'"ouverture des vannes" décidée par certains gouvernements, comme la France ou l'Allemagne. Des mesures comme "la prise en compte du chômage partiel par les finances publiques" lui paraissent indispensables, même si coûteuses. "Il y aura une facture bien sûr, mais la facture sera pour plus tard. Si on gérait les choses de manière plus prudente, ce serait une grosse erreur pour l'instant."

 

Cette crise sanitaire pourrait-elle influencer structurellement l'économie mondiale, comme a pu le faire la crise de 2008 ? Peut-être, mais selon Pascal Lamy, il ne faut pas s'attendre à ce que l'interdépendance des économies nationales les unes par rapport aux autres disparaisse. "Cette interdépendance évolue, change, elle va changer à l'occasion de cette crise du coronavirus. [Mais] on ne va pas vers une démondialisation, plutôt vers une mondialisation organisée un peu autrement", anticipe-t-il.