Yannick Alléno : "Il faut un hommage national pour Paul Bocuse"

© NICOLAS TUCAT / AFP
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A.D , modifié à
Le chef trois étoiles du Pavillon Ledoyen assure qu'il faudrait des funérailles nationales pour Paul Bocuse, connu dans le monde entier comme ambassadeur de la gastronomie française.
INTERVIEW

Il était "le pape de la gastronomie française", "l'empereur", les Américains parlaient de "comète". Le "cuisinier du siècle" Paul Bocuse est mort samedi. Pour rendre hommage à ce ténor de la cuisine traditionnelle française, Yannick Alleno, chef du Pavillon Ledoyen, restaurant trois étoiles, et lauréat des trophées Paul Bocuse était l'invité de l'émission C'est arrivé demain.

"Bocuse, mon Zidane". Yannick Alléno, né en 1968, a eu Bocuse pour modèle : "Bocuse, pour moi, c'était mon Zidane. J'ai rencontré Bocuse en 1998 au moment où je préparais le Bocuse d'or. il a toujours suivi ma carrière de près avec beaucoup d'attention." Le chef se souvient d'une anecdote : pour "le premier service du Meurice, à l'époque où j'ai eu trois étoiles en 2007, il est venu avec des copains. Il m'a dit 'Ecoute Yannick, je vais t'expliquer comment gagner de l'argent' et avant la fin du déjeuner, il a fait le tour de toutes les tables en accompagnant le plateau de fromages. Il a vendu comme ça sur les quinze tables le plateau de fromages." 

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Il avait l'habitude de dire que la France était une immense ferme bordée de sublimes aquariums

Yannick Alléno dresse le portrait d'un chef qui a tout révolutionné. "Et il y avait aussi le Paul diplomate", ajoute-t-il. "La France, grâce à sa gastronomie, a réussi des coups diplomatiques exceptionnels. Il a toujours porté dans sa valise les volailles de Bresse, les vins de sa région. Il avait l'habitude de dire que la France était une immense ferme bordée de sublimes aquariums."

Funérailles nationales. Et le chef d'insister sur la cuisine goûteuse de l'icône, qui n'était pas "nouvelle cuisine" mais bien davantage "cuisine néo-classique". "Il a vite compris que dans les années 70, la nouvelle cuisine ne convenait pas au Lyonnais, qu'il fallait retourner dans un bain de sauce, dans une cuisine beaucoup plus gourmande que trois petits pois dressés sur le coin gauche d'une assiette. Et il avait une intuition commerciale et communicative exceptionnelle." Il a en quelque sorte inventé le personnage de cuisinier star "et la reconnaissance. Ce fameux col bleu blanc rouge a été inventé grâce à Paul. Ça a été un signe identitaire très fort", souligne Yannick Alléno, qui verrait tout à fait un hommage national pour Paul Bocuse, après ceux de Jean d'Ormesson et Johnny Hallyday. "Il était peut-être même plus connu que Johnny. Johnny était une grande figure française mais Paul rayonnait dans le monde entier."