"Les chevaux ressentent des choses que nous ne sommes plus capables de ressentir"

Le cavalier et metteur en scène Bartabas, fondateur de l'Académie équestre de Versailles, était l'invité de Frédéric Taddeï, dimanche sur Europe 1 (photo d'archives).
Le cavalier et metteur en scène Bartabas, fondateur de l'Académie équestre de Versailles, était l'invité de Frédéric Taddeï, dimanche sur Europe 1 (photo d'archives). © Martin BUREAU / AFP
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Margaux Lannuzel
Invité de l'émission "En balade avec", le cavalier et metteur en scène Bartabas, fondateur du théâtre Zingaro et de l'Académie équestre de Versailles, raconte au micro de Frédéric Taddeï le jour où il a assisté à une scène profondément humaine entre deux de ses chevaux dans leurs boxes respectifs. 
INTERVIEW

"Les boxes, c'est un peu comme des confessionnaux. On entend et on voit beaucoup de choses extraordinaires." La nuit, Bartabas, fondateur du théâtre Zingaro et de l'Académie équestre de Versailles, va souvent observer ses chevaux. Pour s'endormir, l'auteur d'Un cheval l'autre (Gallimard) les compte parfois : "c'est comme les moutons, j'en ai eu tellement...". Invité de Frédéric Taddeï dans En balade avec, dimanche sur Europe 1, le cavalier et metteur en scène, "un peu insomniaque", a raconté une anecdote qui dit beaucoup, selon lui, du caractère de ces animaux. 

"Son voisin lui passait sa propre paille par les barreaux"

Lors de ces visites nocturnes, "il faut se taire, il faut écouter", souffle Bartabas, qui assure avoir déjà "vu les chevaux rêver" - à en juger par leur sommeil parfois agité. Une nuit, alors qu'il se livre à cet exercice d'observation, le cavalier est témoin d'une scène qui le laisse sans voix. Il se trouve alors près de deux boxes, occupés par deux chevaux. "Les chevaux normalement, sont sur la paille", explique-t-il. Mais en l’occurrence, l'un des animaux ne l'est pas : "C'était un cheval qui dévorait toute sa paille, donc on l'avait mis sur des copeaux de bois, il était interdit de paille, de litière."

 

"Et la nuit, je me suis aperçu que son voisin lui passait sa propre paille par les barreaux pour lui donner", sourit Bartabas. "C'est quelque chose qui m'a beaucoup marqué, parce que non seulement il avait senti chez l'autre ce besoin de glucose, grâce à une communication qui est au-delà des mots, et en plus il le faisait la nuit, il avait la notion de l'interdit. Il le faisait quand il n'y avait personne pour regarder."

"Un cheval n'est pas un animal domestique"

Pour le cavalier, pourtant fin connaisseur des animaux, cette scène est une vraie surprise. "Ça n'a l'air de rien, mais c'est quelque chose qui m'a drôlement fait réfléchir sur l'animalité. Observer les chevaux, c'est regarder l'animal s'humaniser, mais pas s'humaniser comme un animal domestique, comme un chat ou un chien qui va singer vos comportements", détaille-t-il.

"Parce qu'un cheval n'est pas un animal domestique. Il a sa propre vie, son propre rythme et c'est nous qui nous mettons à son rythme. Quand je dis le voir s'humaniser, c'est le voir découvrir le mouvement qui fut le nôtre à l'origine. C'est-à-dire le mouvement qui nous a permis de devenir humains", conclut le cavalier. "Peut-être que les chevaux ont un moyen de communication et ressentent des choses que nous ne sommes plus capables de ressentir maintenant."