Clint Eastwood revient sur le destin brisé d’un suspect de l'attentat des JO d’Atlanta

Clint Eastwood
Le réalisateur Clint Eastwood lors d'une projection du film à Atlanta le 10 décembre 2019 © AFP
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Hugo Delamarre
Deux ans après "La Mule", le réalisateur signe un nouveau portrait de l’Amérique et de ses dérives avec "Le Cas Richard Jewell", un film événement dont Europe 1 est partenaire, au cinéma le 19 février.

Le 27 juillet 1996, pendant les Jeux Olympiques d’été à Atlanta, un vigile du nom de Richard Jewell découvre, caché derrière un banc, un sac à dos contenant un dispositif explosif. Sans perdre une minute, il fait évacuer les lieux et sauve plusieurs vies en limitant le nombre de blessés. Il est acclamé en héros. Mais trois jours plus tard, la vie de ce modeste sauveteur bascule lorsqu’il découvre, en même temps que le monde entier, qu’il est le principal suspect de l'attentat aux yeux du FBI. Cette histoire, qui évoque la trame d’un thriller à suspense, n’est pas le fruit d’une imagination fertile : il s'agit des événements effroyables qui se sont produits dans la vie de Richard Jewell et qui sont traités dans le dernier film de Clint Eastwood, "Le Cas Richard Jewell", dont Europe 1 est partenaire, en salle mercredi.

Richard Jewell a fait l'objet pendant 88 jours d'une enquête poussée du FBI et a été dans le collimateur de médias particulièrement acharnés. Interpellé par ces faits, le réalisateur a souhaité porter à l'écran l’histoire tragique de cet homme dont la vie a été bouleversée par la presse et par les forces de police qu’il idolâtrait. "On entend souvent parler de gens puissants qui se font accuser de choses et d’autres, mais ils ont de l’argent, font appel à un bon avocat, et ils échappent aux poursuites", déclare le réalisateur, cité par Warner. "L’histoire de Richard Jewell m’a intéressé parce que c’était quelqu’un de normal, un monsieur tout-le-monde. Les gens se sont empressés de l’accuser ; il n’a pas pu échapper à ces accusations et pendant longtemps il est resté trop naïf et idéaliste pour se rendre compte qu’il devait sauver sa peau. C’est pour cela que je voulais faire ce film", poursuit-il, "pour réhabiliter l’honneur de Richard. Le jour où il a commis un acte héroïque, il l’a payé au prix fort et a été jeté en pâture aux lions". 

>>> Un projet de longue date pour le réalisateur

Malpaso, la société de production de Clint Eastwood, réfléchissait au projet depuis quelques années. Le producteur Tim Moore raconte : "Je faisais du repérage pour un autre projet à Hawaï et quand je suis rentré, Clint m’a dit : ‘Tu ferais mieux d’enlever ta chemise hawaïenne, on va à Atlanta pour tourner l’histoire de Richard Jewell. C’est le moment de le faire. Cette histoire, il faut la raconter’. Et sans transition, on s’est retrouvés à Atlanta pour préparer le tournage".

L’équipe a mené de nombreuses recherches pour définir comment raconter cette histoire. "Il y avait énormément d’informations", raconte la productrice Jessica Meier. "On a décidé de s'attacher au point de vue de Richard et au binôme qu’il forme avec son avocat Watson Bryant, la première personne à le croire après sa mère. Selon nous, c’était l’angle le plus porteur".

Le scénariste Billy Ray est parti d’un article de Vanity Fair écrit par Marie Brenner en 1997. La journaliste était sur place juste après le drame, et elle a passé du temps avec Richard, sa mère Bobi Jewell et son avocat Watson Bryant. Elle se souvient : "En 1996, la police était obsédée par le 'profilage', et dans la frénésie qui devait régner au sein des bureaux de la police après l’attentat, ils ont regardé ce brave gars un peu excentrique qui avait trouvé la bombe et ils se sont dit : ‘C’est la théorie du terroriste solitaire !’. Ça s’est transformé en une chasse aux sorcières, un terme aujourd’hui galvaudé mais qui désigne parfaitement ce qui est arrivé à Richard".

"Tout le monde voulait résoudre l’enquête et les différents médias et agences de presse sont entrés en compétition les uns avec les autres pour être les premiers à le faire", raconte Clint Eastwood. Étant donné que Richard Jewell était considéré comme un suspect, il a été accusé en place publique et avec le recul, on constate que ces accusations n’ont jamais été officiellement retirées, même s’il a été totalement blanchi après ces 88 jours éprouvants et les aveux du véritable coupable.

Clint Eastwood affirme : "C’est une histoire vraie mais elle n’en est pas moins pleine de suspense et on a envie de soutenir le protagoniste". 

>>> Un casting prestigieux

Pour incarner les rôles principaux, le réalisateur a porté son choix sur Sam Rockwell, acteur oscarisé pour son rôle dans "3 billboards : les panneaux de la vengeance", pour incarner l’avocat Watson Bryant. Pour le rôle de la mère de Richard Jewell, Clint Eastwood s’est tourné vers l’immense actrice Kathy Bates, nommée à l’oscar du meilleur second rôle pour ce film, qui n’avait jamais tourné sous la direction du réalisateur. Paul Walter Hauser, que l’on a pu voir récemment dans "Moi, Tonya", incarne le rôle-titre.

"En tant qu’acteur, j’ai apprécié que le scénario montre l’envers de l’enquête et la façon désastreuse dont Richard a été traité", déclare Paul Walter Hauser. "C’est une rédemption pour cet homme dont la vie a été bouleversée, voire anéantie par ces circonstances tragiques".

Paul Walter Hauser a travaillé d’arrache-pied pour s’approprier les mimiques et l'élocution de Richard Jewell car il voulait lui rendre justice, ainsi qu’à ceux qui l’ont connu. "La production m’a donné des vidéos et des images d’archives à visionner. Avec en plus l’article de Marie Brenner, le scénario et ma rencontre avec Bobi et Watson, j’avais de quoi faire".

Clint Eastwood remarque : "J’ai eu de la chance à plusieurs reprises de faire des films où tout fonctionnait à merveille et dans le cas présent on peut dire que Paul est né pour jouer ce rôle. C’est un acteur exceptionnel. Il s’est effacé et a interprété Richard comme l’homme appliqué et candide qu’il était".