Agnès Varda et JR : "On a décrété qu'on s'aimait"

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A.D , modifié à
Elle a 89 ans, lui 33. Ensemble, ils ont réalisé une promenade artistique à la rencontre des Français pour livrer un documentaire émouvant, "Visages Villages".
INTERVIEW

Ils sont inséparables après avoir tourné leur film ensemble. La cinéaste et photographe Agnès Varda et le photographe JR étaient les invités d'Un dimanche de cinéma pour présenter Visages Villages, un documentaire co-réalisé pour lequel ils sont partis sur les routes de France. Une émouvante promenade buissonnière récompensée à Cannes.

"On a décrété qu'on s'aimait." La fille d'Agnès Varda est à l'origine de leur rencontre. "Elle savait que j’aimais les œuvres de JR. Il est venu chez moi rue Daguerre." JR pensait la voir une seule fois mais il l'invite dans son atelier et "elle est venue le lendemain", dit-il. "Après, on s'est mis tout de suite au travail sans se connaître, sans savoir qu'on allait faire un film. On a décrété qu'on s'aimait." "Ça semblait plus léger que travailler", précise Agnès Varda.

"L'impression de revivre ce qui s'est passé". Ils partent alors sur les routes, voir notamment les corons et les gens qui y vivent. Dans ce nord, "on savait qu'il y avait des maisons abandonnées." Ils trouvent une femme, Jeanine, qui "vit seule au milieu de sa rue. Elle nous a raconté sa vie et on a eu l'impression, alors qu'on n'avait aucune nostalgie de cet endroit, de revivre ce qui s'était passé : les gens qui jouaient de la musique ensemble, les mineurs qui remontaient", décrit JR. Bref de capter l'âme du lieu. "Au début, c'était vaguement organisé et après, c'est le hasard qui nous a aidé".

"Chacun sur son temps libre, nous a aidé". De hasard en points de chute, les deux artistes ont "discuté de chaque plan, de ce qui devait être net ou flou". Ils sont aussi allés voir les dockers du Havre en pleine gréve, demandent où sont les femmes, rencontrent les leurs. Sur place, à chaque fois, au rythme des gens, ils exposent des photos immenses, filment. "On n'a ralenti aucun bateau, piqué le boulot de personne. Chacun sur son temps libre nous a aidé à construire ces murs gigantesques de containers."

En plus de cet échange avec les Français, le film s’appuie en filigrane sur l'affection née entre Varda et JR. "C'est un jeune homme pimpant et moi je suis une vieille chose et ça ne compte pas, même aux yeux des gens. Ils nous ont pris comme deux artistes."

>> La bande annonce du documentaire :