Le marathon judiciaire du créateur de BAK93

© BAK93
  • Copié
, modifié à
Il est poursuivi par les syndicats de police, irrités par ses tee-shirts Brigade Anti-Keuf.

Poursuivi pour “outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique“ et “provocation non suivie d'effet au crime ou délit“, Stéphane da Silva a été relaxé “pour prescription“ jeudi après-midi par le tribunal de Bobigny. Mais le marathon judiciaire de ce créateur d’une marque de vêtements urbains, ciblé par plusieurs syndicats de police depuis 2002, n'est pas fini : le parquet a fait appel vendredi.

Ce commercial originaire de La Courneuve et résidant à Angoulême a en effet fondé la marque BAK 93, à l’origine conçue comme l’acronyme de Brigade Anti-Keuf. Un détournement du label BAC, pour brigade anti criminalité, qui a poussé plusieurs syndicats de police à le poursuivre en justice.

Une incitation à la haine anti-flic

Les syndicats de police avaient déposé plusieurs plaintes pour “appel au meurtre et à la violence“ en 2004, 2005, 2006 et 2009. “Le message est clair, c'est un appel à la violence contre les forces de l'ordre“, s’emporte Xavier Beugnet, du syndicat de SGP-FO, dans Libération.

Pourtant, Stéphane da Silva n’a rien d’un émeutier ou d’un casseur de flic. Hormis une condamnation pour “travail dissimulé“, son casier judiciaire est vierge, comme le rappelle La Charente Libre. C’est donc plus pour surfer sur la vague de la mode banlieusarde que ce jeune entrepreneur a décidé de cibler les forces de l’ordre.

Des slogans adoucis

Ce dernier a d’ailleurs depuis rectifié le tir, délaissant le “Brigade Anti-Keuf“ pour des vêtements estampillés désormais “brigade anti-korrompus“, “anti-kok“, “anti-kons“, “anti-keufs korrompus“ ou encore “anti-Kärcher“.

“J'ai compris que mon message, qui ne visait que les policiers qui ne respectent pas leur code de déontologie, était maladroit. J'avais 10 ans de moins, je baignais dans l'ambiance cité“, se défend Stéphane da Silva dans La Charente Libre.

Une publicité gratuite pour la marque

Le tribunal de Bobigny a privilégié la liberté d’expression défendue par l’avocat de l’entrepreneur, au détriment de l’incitation à la haine dénoncée par les policiers. "Ce jugement est une magnifique réponse au procureur, qui avait considéré que critiquer la police était punissable", s'est félicité son avocat, Dominique Tricaud. Un jugement qui, au contraire, insupporte le syndicat Alliance.

“Peu importe la formulation ou le support sur lequel il est placé, s'attaquer verbalement aux policiers fait parler de la marque“, regrette le syndicat dans Le Figaro. Seule certitude, à l’image des récentes polémiques sur les rappeurs Morsay ou Abdul X, l’ire des syndicats de police offre une publicité gratuite au versant “hardcore“ des banlieues.

Une raison de plus pour Stéphane Da Silva de réclamer la restitution de son stock de 1.000 à 2.000 vêtements, sous scellés depuis 4 ans. Ce dernier devra néanmoins attendre, puisque le parquet de Bobigny "considère pour sa part que l'outrage est constitué" et a donc annoncé vendredi qu'il faisait appel de la relaxe.