L'enjeu crucial du vote populaire à la présidentielle

  • Copié
Antonin André, chef du service politique , modifié à
Les candidats à la présidentielle savent qu'il est indispensable de s'attirer le vote des classes populaires pour l'emporter. Mais cet électorat est volatile.

Personne ne peut gagner sans lui. Présidentielle après présidentielle, le vote populaire reste incontournable pour accéder à l'Élysée. Les candidats l'ont bien compris en s'adressant directement aux couches populaires avec des slogans chocs : il y a la fracture sociale de Jacques Chirac en 1995, le "travailler plus pour gagner plus" de Nicolas Sarkozy en 2007. Enfin, François Hollande déclarait en 2012 que "[son] ennemi, c'était le monde la finance".

Le Pen en légère baisse. Le vote des ouvriers et des employés est un enjeu crucial : il représente un gros quart du corps électoral, soit environ dix millions d'électeurs. Mais il a profondément évolué. Il n'existe plus de vote de classe, les ouvriers et les employés ne votent plus comme un seul homme. La gauche n'est plus le seul camp à recueillir les suffrages de ces populations. Amorcé dans les années 1980, le divorce s'est accentué au fil des élections. En 2012, 29% des ouvriers ont voté Marine Le Pen, 27% ont choisi François Hollande, 19% se sont portés vers Nicolas Sarkozy. Un autre chiffre témoigne de la division de cet électorat : en 2012, 51% d'entre eux s'étaient portés vers la droite contre 49% pour la gauche.

Depuis, le Front national a continué son opération séduction envers les couches populaires. S'il a su capitaliser sur ce vote, rien n'est pourtant figé. Aux élections régionales, Marine Le Pen atteignait des scores entre 40 et 45% chez les ouvriers, alors qu'elle est aujourd’hui autour de 37/38% dans les dernières enquêtes d'opinion. Les dossiers judiciaires qui s’accumulent autour d’elle y sont peut-être pour quelque chose.

Macron séduit les ouvriers, Fillon impopulaire. Tout cela profite à Emmanuel Macron, qui progresse fortement dans l’électorat populaire. Le "golden boy", candidat des bobos et des urbains, partait en effet de très bas. Comment a-t-il amorcé la reconquête ? Deux mesures spectaculaires ont fait mouche : la suppression de la taxe d’habitation pour 80% des foyers, très efficace auprès des plus modestes, mais aussi la possibilité de démissionner tous les 5 ans en touchant le chômage.

La stratégie du leader d'En Marche! a fonctionné : il est passé de 13% à 23% d’intentions de vote chez les ouvriers. En comparaison, François Fillon pâtit d'une image de candidat des cols blancs et des classes populaires. Il ne récolte aujourd’hui que 8 à 10% du vote populaire et beaucoup, dans son entourage, l’ont déjà alerté sur ce point, sans succès. S’il s’obstine, il prend le risque de ne pas passer le premier tour.