Devant la haute cour régionale de Francfort, au début du procès du néonazi accusé du meurtre de Walter Lübcke. 2:28
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Hélène Kohl, édité par Séverine Mermilliod
Un néonazi est en procès en Allemagne depuis une semaine, accusé du meurtre de Walter Lübcke, un homme politique allemand. Le pays semble prendre lentement la mesure de la menace d'extrême droite dans le pays, menace qui s'étend jusque dans la police et l'armée où de nombreux soldats ont été identifiés comme radicalisés.
ENQUÊTE

Depuis une semaine, un néonazi est devant la justice allemande, accusé du meurtre d’un homme politique il y a un an. L’assassinat de Walter Lübcke, abattu de sang-froid chez lui, a été un électrochoc en Allemagne. Le pays a compris qu’il avait trop longtemps sous-estimé la menace d’extrême droite. D'autant plus qu’après la mort de ce préfet de la région de Kassel, il y a eu l’attentat contre la synagogue de Halle, la fusillade xénophobe dans les bars à chicha de Hanau, le démantèlement d’une cellule terroriste néonazie qui voulait attaquer des mosquées…

Des branches de l'AfD placées sous surveillance

L’Allemagne a réalisé cette année que beaucoup de personnes qui gravitent dans les milieux d’extrême droite sont bien plus radicalisées qu’on ne le pensait. Voire déterminées à passer à l’acte. Les renseignements intérieurs estiment maintenant que des mouvements politiques présentés il y a quelques années comme fréquentables sont en fait des fabriques à terroristes d’extrême droite. Comme la branche régionale de l’AfD dans le Brandebourg, placée la semaine dernière sous surveillance, trop proche des néonazis. En mars, c’est l’aile nationaliste du parti qui a été démantelée parce qu’elle représentait une menace pour le pays.

L’Allemagne n’a-t-elle pas voulu voir grandir le phénomène ? Cela va même plus loin. Certains accusent l’ancien patron des renseignements intérieurs d’avoir protégé l’extrême droite pendant des années. Hans-Georg Maassen a été limogé par Angela Merkel après les manifestations de Chemnitz, il y a un an et demi, parce qu’il affirmait qu’il n’y avait pas eu de dérapages racistes sur place, malgré des vidéos.

Depuis, il travaille pour un cabinet d’avocats proche de l’AfD et des identitaires, mais dément les accusations de compromission : "à l’époque, et contre l’avis de la classe politique qui n’en voyait pas l’utilité, j’ai recruté du personnel supplémentaire pour la lutte contre l’extrême droite ! Tout ça, c’est politique ! Contre moi et contre ma ligne politique !", dénonce-t-il. "En disant que nous sommes une bande de nazis, la gauche essaie de discréditer les services de sécurité."

Jusque dans la police et l'armée

Aujourd'hui, le gouvernement lui-même admet qu’il y a un problème dans la police et l’armée. Le service du renseignement militaire a publié récemment un rapport sur la radicalisation des troupes de l’armée allemande. Et les chiffres sont préoccupants : 592 soldats ont été identifiés comme d’extrême droite l’an dernier, dont 20 rien que pour la petite unité d’élite du KSK. 

Et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg, confie sur Europe 1 un ancien parachutiste. Parmi des soldats de son régiment, certains posent sur les réseaux sociaux en uniforme nazi… "Des soldats qui affichent sans complexe sur le net des profils d’extrémistes de droite, et qui pourtant ne sont pas repérés ! Je les ai signalés et après j’ai été écarté. C’est moi qui ai dû quitter l’armée", témoigne t-il.

Cet été, un ancien officier doit être jugé pour sa participation à un complot terroriste. Dans sa nébuleuse, il y avait aussi un formateur des commandos de l’armée et plusieurs policiers. Ils détenaient une liste de plus de 20.000 personnes à abattre en Allemagne. Leurs munitions venaient toutes des stocks de la police.