Royaume-Uni : les élections "les plus incertaines depuis 30 ans"

© AFP / STEFAN ROUSSEAU
  • Copié
, modifié à
La campagne des élections législatives a été officiellement lancée lundi au Royaume-Uni. Le scrutin s’annonce extrêmement indécis.

Le coup d’envoi de la campagne des élections législatives a officiellement été lancé lundi au Royaume-Uni. A cinq semaines du scrutin, qui aura lieu le 7 mai prochain, les travaillistes et les conservateurs sont au coude-à-coude. David Cameron, le Premier ministre sortant et candidat des conservateurs (les Tories), sera opposé à Ed Miliband, le chef de file du parti travailliste (Labour). Alors qu’aucune majorité claire ne devrait se dégager, les trois autres partis, l’Ukip (extrême-droite), le SNP (le parti nationaliste écossais, gauche) et les libéraux-démocrates (centre), devraient jouer un rôle crucial dans la constitution d’une future coalition. Olivier de France, directeur de recherche à l’IRIS (institution de relations internationales et stratégiques), présente les enjeux de cette élection qui s’annonce très serrée.

infographie, intentions de vote, élections, royaume-uni

© AFP

Quel est le bilan de David Cameron, le Premier ministre sortant ?

David Cameron essaye de mettre en avant son bilan économique. La croissance est revenue, et les déficits ont été coupés (la croissance a été de près de 2,5% en 2014, et le chômage est passé sous la barre des 6%, ndlr). Le problème, c’est que le Premier ministre a opéré des coupes sanglantes dans les services de santé, dans l’éducation et dans les forces armées.

Cameron veut également la tenue d’un référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne, mais il n’est pas certain qu’il bénéficie du soutien des forces vives économiques. La City est contre un "Brexit", car l’U.E est un partenaire économique et financier très important. 

Autre point : à force de refuser de participer à la manière dont Bruxelles fonctionne, le Royaume-Uni est moins audible au sein de l’Union Européenne. Et David Cameron n’est plus nécessairement le partenaire privilégié de Barack Obama. Quand le président des États-Unis regarde vers l’Europe, il se tourne désormais vers Berlin. Il y a une vraie inquiétude au Royaume-Uni sur leur perte d’influence dans le monde.

Y’a-t-il un favori pour cette élection ?

Ces élections sont les plus incertaines depuis une bonne trentaine d’années. La semaine dernière, il y a eu deux sondages contradictoires dans les médias britanniques. Le premier donnait 36% contre 32% pour les travaillistes (Labour), et le second donnait 36% contre 32% pour les conservateurs (Tories), soit l’exact inverse ! C’est très indécis et très peu clair.

Cependant il y a une certitude : les conservateurs n’auront pas de majorité, comme il y a 5 ans. Ils ont besoin de 326 sièges pour gouverner seuls, or les sondages les créditent de 270 sièges dans les meilleurs des cas. Le cas le plus probable est que ni les travaillistes, ni les conservateurs n’aient la majorité et doivent entrer en négociations pour former une coalition avec une autre formation politique.

Un troisième parti sera donc le "faiseur de roi", celui qui fera pencher la balance soit pour les uns, soit pour les autres. Pour le moment, l’identité de ce troisième parti est elle aussi incertaine. Ça se jouera entre le SNP (le parti nationaliste écossais, classé plus à gauche, ndlr), les Lib-dem (les libéraux-démocrates, parti centriste, ndlr) et l’Ukip (parti eurosceptique d’extrême-droite, ndlr).

Quels sont les principaux thèmes de campagne ?

L’élection ne se jouera pas sur les personnalités, ce ne sera pas Ed Miliband (leader du Labour, les travaillistes) contre David Cameron, mais un vote pour des politiques de fond. Il y a des thèmes de campagne traditionnels, comme l’économie, les déficits, le NHS (le service de santé), l’immigration et la sortie éventuelle de l’Union européenne. Sur ces dossiers, les positions des conservateurs et des travaillistes sont relativement divergentes.

Le Labour n’est pas favorable à un référendum sur l’Union Européenne, contrairement aux conservateurs. Les positions sur le système de taxation et l’économie sont aussi opposées. Le Labour veut augmenter les taxes, ce que les Tories se refusent à faire. Mais les travaillistes n’ont pas détaillé tout leur programme pour résoudre le déficit.

De toute manière, les positions des deux partis vont évoluer en fonction des coalitions qui émergeront le 7 mai prochain. Par exemple, il est impossible à l’heure actuelle de déterminer si les conservateurs feraient campagne pour le oui ou le non lors d’un référendum pour la sortie de l’U.E, en fonction des alliances et des concessions éventuelles que David Cameron pourra tenter de négocier avec ses partenaires européens. On peut imaginer toutes les variables en fonction des résultats des prochaines élections.

>> LIRE AUSSI - David Cameron victime d'un canular téléphonique

>> LIRE AUSSI - Cameron tient tête à l'U.E sur l'immigration

>> LIRE AUSSI - GB : les europhobes du Ukip décrochent un deuxième siège de député