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Chaque jour, Vincent Hervouet traite d’un sujet international.

Au Cambodge, le régime autoritaire du Premier ministre Hun Sen renforce son contrôle sur les médias.
Dimanche matin, les lecteurs et les rédacteurs du vénérable Phnom Penh Post ont appris que leur journal avait été racheté. Tous ignoraient qu’il était en vente. Et en faillite, le fisc lui a soudain réclamé cinq millions de dollars. En cherchant bien et les reporters du Phom Penh Post savent chercher et c’est pour cela que leur journal a de la valeur et qu’il a des ennuis, le nouveau patron vit en Malaisie et s’occupe de communication, notamment celle du premier ministre du Cambodge, l’indéboulonnable Hun Sen.
Le monde est petit. Le monde est sournois.  
"Indéboulonnable" parce que cela fait quand même 38 ans que le camarade Hun Sen se maintient à la tête du Cambodge. En comptant les années où il était n°1 bis, piaffant de devenir N°1, cela fait quarante ans. Cela ne lui suffit pas, cela ne suffit jamais. En juillet, il va obtenir un rab de cinq ans. Comme il a dissous le grand parti de l’opposition cet automne, poussant ses dirigeants à l’exil ou en prison, les élections seront une formalité. En vieillissant l’ancien khmer rouge Hun sen ressemble à un Jerry Lewis asiatique mais il ne plaisante jamais. 30 radios ont été fermées et l’autre grand journal indépendant en anglais, le Cambodia daily a été mis en faillite, là encore le fisc qui se réveille et se déchaîne.
Deux quotidiens en anglais.
Et pourtant, c’est officiellement un pays francophone… Le Cambodge, ancien protectorat français, cela crée une responsabilité. En réalité, la France ne se sent guère concernée par ce que fait Hun Sen, ce qui arrive aux Cambodgiens et dans quelle langue ils le racontent…  
Pourquoi ?
La culpabilité, peut-être ?  C’est à Paris, que les principaux chefs khmers rouges ont fait leur apprentissage, dans l’agitation des mouvements anticolonialistes. C’est à la Sorbonne qu’ils ont été dressés à la lutte des classes, carburant de l’histoire, au mépris des libertés bourgeoises. L’idée sommaire mais efficace que la révolution exige des boucs émissaires, qu’il faut passer un groupe humain par dessus bord n’a pas été importée de l’enfer, elle a été rapportée de Paris.
La mise en pratique a fait 1,7 million de morts. Tous ceux qui avaient été pollués par la culture ancienne devaient disparaître.
Un génocide commençait. Le Monde titrait : Phnom Penh libéré !
Cela s’est déroulé de 1975 à 1979, c’est loin !
Pour les survivants du génocide, c’était hier soir. D’ailleurs, ils viennent seulement d’inaugurer un mémorial pour les victimes du génocide. Il est planté dans le parc de Choisy, dans le XIII° arrondissement. C’est un monument modeste dans le plus modeste des jardins publics parisiens. Il a été financé par la diaspora, pas un sou d’argent public. Après bien des embarras, la mairie de Paris s’est résignée à laisser faire. Les rescapés du génocide, les exilés d’Hun Sen ne font pas partie de ses protégés. Elle préfère exposer Che Guevara à Paris. À quand une expo Pol Pot à Paris ?