SFR-Numericable veut racheter Bouygues Telecom

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L'homme d'affaires Patrick Drahi, 3e fortune de France, aurait proposé 10 milliards d'euros à Bouygues pour le rachat de sa filiale de téléphonie. © ERIC PIERMONT / AFP
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Simon Ruben et C.P.-R. avec AFP , modifié à
TRÈS GROSSE OFFRE - D’après le Journal du Dimanche, le propriétaire de SFR, Patrick Drahi, propose de racheter pour 10 milliards d’euros la filiale téléphonique du groupe Bouygues. Emmanuel Macron a jugé dimanche matin que cette "consolidation n'est pas souhaitable". 

Patrick Drahi, le patron du groupe SFR-Numericable, a fait une offre de 10 milliards d'euros à Bouygues Telecom, il y a dix jours, révèle le JDD, citant "plusieurs sources" non identifiées. 10 milliards d’euros pour la seule branche télécoms, c’est colossal puisque c’est quasiment la valeur de l’ensemble du groupe Bouygues. Après l'annonce de cette offre, le ministre de l'Economie et des Finances, Emmanuel Macron a estimé, dimanche matin, que cette "consolidation n'est pas aujourd’hui souhaitable". 

Les concurrents dans la poche. Avec cette offre de rachat, SFR frappe très fort. Et pour réussir son coup, Patrick Drahi le patron de l’opérateur de téléphonie ne se lance pas totalement seul dans cette opération. Afin d’éviter les bisbilles avec la concurrence, SFR a inclus ses rivaux dans la boucle. Au groupe Free par exemple, Patrick Drahi , aurait promis une partie des fréquences, des antennes et des boutiques Bouygues Telecom - qui comptabilise 11 millions de clients. Quant à Orange, le numéro 1 du mobile récupérerait "plusieurs centaines de salariés" de Bouygues, et surtout, en guise de bonus, SFR serait prêt à lui céder ses abonnés Virgin Mobile.

Une proposition examinée mardi. Le conseil d’administration de Bouygues a été convoqué mardi pour étudier cette offre. D’ici là, Martin Bouygues pourrait faire grimper encore les enchères et demander un effort supplémentaire à SFR. L’offre pourrait alors atteindre jusqu’à 11 milliards d’euros, très au-dessus des propositions précédentes de SFR ou Free, qui dépassaient à peine les 7 milliards. Martin Bouygues, qui s’était obstiné à refuser toutes les offres jusque-là, serait cette fois sur le point de réaliser un coup de maître, l’une des plus grosses ventes de ces dernières années. 

Macron ne valide pas l'offre. "Une consolidation" dans le secteur des télécoms n'est "pas souhaitable", a indiqué dimanche matin le ministre de l'Economie et des Finances dans une déclaration écrite. "Le temps n'est pas à des rapprochements opportunistes auxquels plusieurs peuvent trouver un intérêt qui ne retrouve pas ici l'intérêt général", a jugé Emmanuel Macron, qui poursuit : "Je dis et répète que la consolidation n'est pas aujourd'hui souhaitable pour le secteur. L'emploi, l'investissement et le meilleur service aux consommateurs sont les priorités. Or les conséquences d'une consolidation sont à ces égards négatives, comme l'ont prouvé les cas récents en Europe".

Totalement hostile à cette opération, le ministre de l’Économie a ajouté : "Je continuerai à être très vigilant sur l'ensemble de ces sujets et sur le respect des engagements pris par les opérateurs. Je les réunirai à nouveau le 16 juillet prochain afin de faire le point, entre autres, sur le très haut débit".

Des inquiétudes pour l'emploi. Cette offre suscite également des craintes pour l'emploi. "Cette nouvelle est une surprise et une douche froide. Il faut voir ce qui s'est passé lors du rapprochement entre SFR et Numericable. Il y aura des doublons, ça va être un désastre. Il y aura donc des suppressions de postes. C'est inquiétant pour les deux entreprises autant que pour le marché du télécom. Ca va être un désastre aussi pour les clients, car je pense que le travail de Bouygues Telecom était tourné vers les clients. Je suis perplexe", s'inquiète Nicolas Faber, délégué CFTC chez Bouygues Telecom, interrogé par Europe 1. 

Drahi érige son empire. En mars 2014, Patrick Drahi avait réussi à s'emparer de SFR à l'issue d'une bataille homérique contre Bouygues. L'homme d'affaires franco-israélien, également à la tête des journaux L'Express et Libération, avait remporté la partie en mettant sur la table 13,36 milliards d'euros pour racheter l'opérateur de télécoms à Vivendi. L'opération avait ouvert la voie à la formation du groupe Numericable-SFR, qui a depuis absorbé Virgin Mobile et Telindus, tandis que sa maison mère Altice, pilotée par Patrick Drahi, a pris le contrôle de Portugal Telecom et tout récemment de Suddenlink Communications, le septième câblo-opérateur américain, présent dans 15 Etats américains avec un million et demi de clients.